ABRÉGÉ DE LART DES ACCOUCHEMENS, DANS lequel on donne les préceptes néceffaires pour le mettre heureusement en pratique, & auquel on a joint plufieurs Obfervations inté- reffantes fur des cas finguliers: OUVRAGE très-utile aux jeunes Sages-femmes, & généralement à tous les Eleves en cet Art, qui deferent de s'y rendre habiles. SIXIEME ÉDITION, Avec Figures en couleurs. PAR Madame LE BOURSIER DU COUDRAY; Maîtreffe Sage-femme de Paris, penfionnée & envoyée par le Roi pour enfeigner à pratiquer l'Art des Accouchemens dans tout le Royaume. Le Prix eft de fept livres quatre fols, relié. A PARIS, Chez THEOPHILE BARROIS le jeune, Libraire, quai des Auguftins, no. 18. M. DCC. LXXXV. Avec Approbation, & Privilege du Roi A MONSEIGNEUR BERNARD DE BALLAINVILIERS, Chevalier, Seigneur de Villebouzin & du Mefnil, Confeiller du Roi en fes Confeils, Maître des Requêtes ordinaire en fon Hôtel, Grand-Croix de l'Ordre Royal & Militaire de SaintLouis, Intendant de Juftice, Police & Finances en la Généralité de Riom & Province d'Auvergne. MONSEIGNEUR, UN petit Ouvrage de cette nature, paroîtra fans doute fort étranger, & bien peu afforti aux affaires importantes, dont l'adminiftration vous attire tant d'éloges. Je n'hésite point cependant à vous en faire hommage; tout ce qui a quelque caractere d'utilité, acquiert des droits à fon Auteur fur vos bontés & fur votre protection. Vous avez faifi au premier inftant, MONSEIGNEUR, avantages que peut produire la Machine que j'ai inventée pour la facilité de l'Art que je traite: votre amour pour le bien public a encouragé mon zele, & j'ai perfectionné une invention que la pitié m'avoit fait imaginer. Les Eleves, que vous m'avez donné les ay 1 occafion de former, font déjà reffentir dans les Campagnes l'utilité de ma Machine. Vous achevez ce que votre illuftre Prédéceffeur n'avoit eu que le temps de commencer : nombre de Sujets béniffent le Protecteur de l'Art, qui les a préfervés de devenir les triftes victimes de l'ignorance. Votre nom, Monseigneur, à la tête de ce Livre, ne fauroit donc ternir l'éclat des éloges que la poftérité vous devra : il n'eft pas moins glorieux de veiller à la confervation des Sujets de Sa Majefté dans le fein de fon Royaume, que d'éloigner de fes Frontieres, & de détruire les ennemis de fes États; l'un a plus de rapport que l'autre aux fentimens d'humanité qui vous animent votre cœur fe fatisfait tous les jours à foulager les malheureux, & les marques de bonté qu'ils en éprouvent, donnent un prix nouveau à vos bienfaits. Je me repofe fur leur reconnoiffance du foin de les publier, & j'ajoute à un fentiment femblable, l'affurance du profond refpect avec lequel je fuis, MONSEIGNEUR, Votre très-humble & très-obéiffante Servante, LE BOURSIER DU COUDRAY AVANT-PROPOS. JE n'entrerai pas dans un détail fort étendu, fur ce qui concerne l'Art des Accouchemens; j'avoue même qu'il me feroit impoffible d'y parvenir, à moins que je ne tranfcriviffe ce que tant d'Auteurs ont écrit fur ce fujet. Tout mon objet est de renfermer en peu de mots les vrais principes de cet Art, & de les préfenter fous un point de vue qui puiffe les faire comprendre par des Femmes peu intelligentes. Combien yen a-t-il de cette efpece, qui, fans prévoir aucune fuite fàcheufe, fe mêlent d'accoucher, & combien de malheureuses ne deviennent-elles pas les victimes de cette ignorance? La feule compaffion m'a rendue Auteur; & n'écrivant point pour les perfonnes éclairées, je ne faurois me rendre trop intelligible. Après avoir appris dans la Capitale, l'Art que je profeffe, & l'avoir exercé l'espace de feize ans, mon fort me conduifit en Province. Pour répondre aux marques d'eftime que me donnoient ceux qui m'y avoient appellée, j'annonçai que je donnerois volontiers mes avis aux pauvres femmes qui en auroient befoin. Je ne puis dire le nombré de celles qui m'exposerent leur trifte fituation, & dont la plupart étoient affligées de relâchement de matrice. Je les fis entrer dans le détail de leurs accouchemens, & par le récit qu'elles me firent, je ne pus douter qu'elles n'euffent lieu d'attribuer leurs infirmités à l'ignorance des femmes à qui elles avoient eu recours, ou à celle de quelques Chirurgiens de Village peu expérimentés. Mon zele me détermina donc à offrir de donner gratuitement des leçons à ces femmes. Je fis cette proposition à M. le Subdélégué, qui, charmé de procurer un auffi grand bien, accepta mes offres. Le feul obstacle que je trouvois à mon projet, étoit la difficulté de me faire entendre par des efprits peu accoutumés à ne rien faifir que par les fens. Je pris le parti de leur rendre mes leçons palpables, en les faifant manœuvrer devant moi fur une Machine que je construisis à cet effet, & qui représentoit le baffin d'une femme, la matrice, fon orifice, fes ligamens, le conduit appellé vagin, la veffie & l'inteftin rectum. J'y joignis un modele d'enfant de grandeur naturelle, dont je rendis les jointures affez flexibles, pour pouvoir les mettre dans des pofitions différentes; un arriere-faix, avec les membranes & la démonftration des eaux qu'elles renferment; le cordon umbilical compofé de fes deux arteres, & de la · veine, laiffant une moitié flétrie & l'autre gonflée, pour imiter en quelque forte le cordon d'un enfant mort, & celui d'un enfant vivant, auquel on fent les battemens des vaiffeaux qui le compofent. · ! J'ajoutai le modele de la tête d'un enfant féparé du tronc, dont les os du crâne paffoient les uns fur les autres je crus qu'avec une démonstration auffi sensible, fi je ne pouvois pas rendre ces femmes fort habiles, je leur ferois du moins fentir la néceffité de demander du fecours affez tôt, pour fauver la mere & l'enfant ; fecours dont les Villes ne manquent pas, mais qui feroit très-néceffaire dans les Campagnes, où l'habileté d'un Chirurgien appellé trop tard, devient souvent inutile, ne pouvant qu'être le spectateur de deux victimes expirantes, pour lesquelles fon art & fon zele font alors infructueux. Ainfi, mon projet fut de faire connoître à ces femmes les divers dangers où leur incapacité expofe la mere & l'enfant, de leur montrer la néceffité de procurer au plutôt le Baptême à ceux qui font prêts à périr, & de conferver des fujets à l'Etat. J'ai raffemblé les différentes leçons que je donnois à lire, & se me hasarde aujourd'hui de les faire imprimer; ce qui eft moins l'effet de la préfomption, que vingt années d'expérience auroient pu m'infpirer, que le defir de me rendre, par ce moyen, plus utile à ma Patrie trop heureufe fi je puis y parvenir. C'est par ce motif que j'efpere obtenir. de mes Lecteurs la grace de ne point faire attention aux fautes qu'ils pourront remarquer dans ma diction, lorsqu'elles n'altéreront point le fens des préceptes que je donne à mes Éleves. J'avoue qu'en compofant les leçons que je leur donnois à lire, je n'avois en vue que les Sages-femmes de la Campagne ; mais ayant fait réflexion que ces leçons pourroient paffer entre les mains de perfonnes plus intelligentes, par conféquent fufceptibles d'une inftruction plus étendue, j'ai cru que, fans rien changer à l'ordre que j'avois donné à ces préceptes, je devois y ajouter quelques remarques particulieres, pour les faire lire avec plus de fatisfaction, & en même temps plus de fruit. Chargée par ordre du Roi, & comblée de fes bienfaits pour inftruire, à l'aide de la Machine que j'ai imaginée, les femmes & filles qui fe destinent à cet état, furtout dans les Campagnes, j'ajoute à ma feconde Édition des Planches qui puiffent rappeller à mes Éleves mes mêmes démonstrations; & pour pouvoir leur rendre encore plus fenfibles, je les ai fait imprimer en couleur, pour que les différentes couleurs donnaffent plus de clarté dans les objets. Je ne me suis attachée qu'à faire fentir l'impoffibilité des mauvaises manœuvres des perfonnes qui fe mêlent de pratiquer les Accouchemens, fans la connoiffance de la conformation intérieure. Après avoir présenté la Matrice dans fa pofition, son orifice, fes dilatations par gradation, sa contraction & fes obliquités, j'ai cru que l'enfant feul dans le baffin deviendroit plus frappant, fur-tout pour mes Éleves. L'AUTEUR fait fentir dans fon Avantpropos, qu'elle n'a pas eu feulement pour objet l'inftruction des Sages-femmes de la Campagne, mais auffi celle de toutes les perfonnes qui voudront embraffer l'Art des Accouchemens. C'est pour répondre à ce zele pour le bien public, que l'on a jugé à propos de placer ici des notes particulieres fur quelques endroits de l'Ouvrage, & d'y joindre quelques Obfervations intéreffantes, qui ont paru y avoir beaucoup de rapport. ABRÉG É DE L'ART DES ACCOUCHEMENS. CHAPITRE PREMIER. Des qualités requises aux femmes qui fe deftinent à l'Art des Accouchemens. PÉNÉTRÉES de notre Religion, nous ne devons pas ignorer qu'elle nous oblige exercer avec honneur l'état que nous avons choifi; mais puifque dans quelque profeffion que ce foit, l'on doit y faire de bonnes œuvres, nous n'aurons là-deffus rien à nous reprocher, fi nous pratiquons celles que notre Art nous met à portée de faire par nos veilles & nos foins pour les pauvres femmes qui ont befoin de notre fecours. Nous fatisfaifons au Commandement d'ai A mer Dieu dans fes membres, & nous devons nous empreffer de les foulager, & de leur donner même la préférence fur celles qui, par leurs richeffes, font moins exposées à périr faute de foin. Ainfi ne faifons point acheter à ces pauvres malheureuses nos fervices, en les obligeant de mauvaise grace, & avec un air dur. Ne nous impatientons pas de la longueur de leur travail; raffurons-les fur la crainte qu'elles ont fouvent que nous les abandonnions pour aller fecourir celles qui font plus fortunées, C'est une alarme qui augmente leur peine; elles ne fentent que trop, que ce n'eft point l'intérêt qui nous fixe auprès d'elles, n'attendant que de notre charité le fecours qui leur font néceffaires. Calmons leurs inquiétudes, compatiffons à leur fituation; c'eft le feul moyen de les confoler: fouffrons mille incommodités & tous les dégoûts que l'on trouve dans leurs chaumieres; la récompenfe que Dieu y a attachée, doit nous donner la force & le courage de les fupporter. Gardons-nous bien, ce que je n'ai vu que trop fouvent, les femmes étant A dans les dernières douleurs, & l'enfant au paffage, de les abandonner inhumainement pour courir au fecours de quelque autre plus en état de payer nos foins; c'est un crime affreux fans doute. Mais de quel nom pourrois-je caractériser ceux qui, pour ne pas abandonner la femme, & pour s'en débarrasser promptement, accélerent l'accouchement, & violentent la mere & l'enfant, fans rougir d'être la caufe de la mort prochaine de deux infortunés, que leur obfcurité empêche de regretter. Mais que faifons-nous? Ignorons-nous que ces deux victimes étoient cheres aux yeux de Dieu, utiles à leur famille, & néceffaires à l'Etat? C'étoit un dépôt qui nous avoit été confié. Pouvons-nous, en le facrifiant à un vil intérêt, ne pas trembler fur le compte exact que nous en rendrons un jour à celui qui leur avoit donné l'être? On commet un autre crime dont on cherche vainement à se juftifier par des fophifmes auxquels on donne l'apparence de la' vertu; on refufe tout fecours à une fille qui a ceffé de l'être, & qui donne les marques de maternité; on l'abandonne, on la réduit au défefpoir; on la détermine fouvent, faute de confiance & de confolation, à donner la mort à un innocent, que le crime de fa mere ne doit pas rendre indigne de nos foins. Il femble que dans les petits endroits, ces bonnes gens fe croient des élus du Ciel, pour ne rien laiffer à la vengeance divine, s'imaginant que c'est participer au crime, que de foulager les criminels; mais le zele, la charité & la prudence, qui animent les femmes qui fe destinent à l'Art des Accouchemens, doivent leur faire méprifer des préjugés fi contraires à la religion & à l'humanité, & les porter à donner à ces infortunées tous les secours que leur fituation exige. Il devroit être inutile de recommander, aux femmes de ne jamais fe prendre de vin; mais les Accoucheufes font obligées d'y faire plus d'attention que d'autres, fe trouvant dans le cas d'être appellées à toute heure, & d'avoir la tête faine, afin de ne pas expofer la mere ni l'enfant à quelque danger. Mais files bonnes mœurs font néceffaires à la femme qui fe deftine à l'Art des Accouchemens, pour fe concilier l'eftime de celles qui auront befoin de fon miniftere, il lui eft effentiel auffi, pour mériter leur confiance, & pour n'avoir rien à fe reprocher fur les mauvais fuccès qui pourroient lui arriver dans le cours de fa pratique, de s'inftruire des chofes effentielles à fa profefsion, c'est-à-dire, de connoître les parties du corps humain, ou du moins celles qui ont rapport à l'Accouchement, & d'avoir une connoiffance fuffifante, tant de la théorie que de la pratique de fon Art. Ce qu'elle pourra acquérir, 1o. par la lecture réfléchie des bons livres, qui en renferment les préceptes; 2°. en voyant travailler des perfonnes habiles; 3°. en s'exerçant foi-même ; & enfin en affiftant, autant qu'il lui fera poffible, aux diffections anatomiques. Je n'avois connu que des malheurs caufés par l'ignorance des Sages - femmes de Campagne, & j'avois tâché, comme on le voit, de les engager à s'inftruire, & à fe conduire avec plus de charité; mais ma miffion m'apprend tous les jours combien il périt d'enfans après être fortis du fein * de leur mere, par le manque de foin; premiérement, de la part de la Sage-femme, & enfuite de celle des Nourrices, ce qui m'engage à entrer dans un plus grand détail. Lorfque l'enfant vient au monde trop foible & fans aucun mouvement, ces femmes se hâtent de l'envelopper dans un chiffon, l'expofent par terre dans un des coins de la chambre le plus reculé, pour éviter à la mere ce trifte fpectacle: l'on ne peut douter qu'il s'en enterre de tout vivans, & toujours malheureusement encore fans Baptême, témoins les quatre qui euffent été facrifiés, & à qui j'eus le bonheur de rendre la vie, & de les faire baptifer à l'Eglife. Je trouvai un de ces enfans à qui un chien avoit déjà mangé un doigt des pieds, fans que personne s'en fût apperçu : on sent combien cette négligence eft douloureufe à l'humanité; on trouvera au Chapitre 14 la maniere dont il faut fecourir l'enfant, & on verra qu'il ne faut jamais l'abandonner, qu'on ne foit bien convaincu de fa mort. Après tous ces foins, s'il revient à la vie, ou qu'il n'ait rien craint pour la perdre, la Sage-femme, fur-tout dans les Paroiffes de Campagne, fera avertir M. le Curé, afin de s'affurer de l'heure du Baptême; faute de cette précaution, il arrivera fouvent qu'un Curé, occupé à la vifite de fes malades ou à fes propres affaires, fe trouvera abfent dans le temps que l'on aura porté l'enfant à l'Eglife; cet inconvénient l'expofe aux rigueurs de la faifon, quelquefois pendant plufieurs heures, & nuit à fa fanté: à quel danger l'enfant ne feroit-il pas expofé, fi ceux qui accompagnent le Baptême, s'arrêtoient à boire, & engageoient la Sage-femme à en faire autant ? Il y a ordinairement du danger à porter les enfans au Baptême pendant la nuit, furtout dans les Paroiffes de la Campagne ; les mauvais chemins, les foffés, les planches, les fautoirs, les glaces, les mauvais temps, les rencontres des chiens, &c., tous ces inconvéniens, dont on peut fe parer le jour, ne permettent pas qu'on y expofe la nuit un dépôt fi précieux; un faux pas de celui ou celle qui porte l'enfant, peut lui faire perdre la vie fans Baptême; on peut le lui donner dans la maison fous condition; auffi voiton des Pasteurs fages, qui défendent d'amener à l'Eglise l'enfant lorsqu'il est nuit. Il est encore du devoir d'une Sage-femme d'avoir foin, pendant l'hiver, de recommander aux Clercs de la Paroiffe de chauffer tant foit peu l'eau des Fonts, de forte qu'elle foit un peu tiede; faute de cette précaution, l'enfant pourroit s'enrhumer; il pourroit même s'enfuivre des infirmités qui le conduiroient à la mort. Quand une Sage-femme propose l'enfant pour le Baptême, elle doit détacher l'épingle du bonnet de deffous le menton, & ne point arrêter le maillot deffous le col, afin de faciliter les onctions qui fe font fur la poitrine & entre les deux épaules. Quand elle présente l'enfant au Baptême, il faut qu'elle l'étende le long du bras gauche, en foutenant de la main la tête tant foit peu penchée fur la poitrine, enforte que la tête foit un peu plus haute que les pieds. Il fe trouve des femmes fi embarraffées, qu'elles préfentent l'enfant des deux mains, & par les épaules: cette attitude eft fi violente pour lui, qu'il devient fur le champ tout violet, parce qu'il n'a pas la force de foutenir la tête. Je dois tout ce détail à des Curés qui, pénétrés de fentimens d'humanité, m'ont prié d'en inftruire mes Eleves. * C'est par cette confidération, que M. les Curés confentent volontiers que les Parrains & les Marraines fe contentent de toucher l'enfant quand on le préfente au Baptême, & regardent comme propre aux Sages-femmes d'avoir toutes les attentions. Ces Mrs. favent auffi tous de quelle conféquence il eft de ne pas verfer l'eau de trop haut, comme auffi de trop appuyer fur la future du crâne de l'enfant dans l'onction du Saint Chrême. Les Sages-femmes doivent encore s'intéreffer à ce que les Accouchées ne faffent leur premiere sortie pour venir à l'Eglife, avant qu'elles foient bien remises. On ne fauroit comprendre combien ces pauvres femmes contractent d'infirmités à leur premiere fortie, dans des temps de pluie ou de froid, ou par la laffitude à caufe de la lon gueur du chemin, ou à caufe du fcrupule qu'elles fe font de prendre quelques nourritures avant que d'avoir entendu la Messe. Les Nourrices, celles même qui ne font pas meres, s'attachent naturellement à leurs nourriffons; celles qui les laiffent fouffrir quand elles peuvent les foulager, font des monftres de nature: que les Nourrices n'oublient donc jamais que le plus précieux tréfor que l'on puiffe confier, eft entre leurs mains, & que la religion, l'humanité & l'honneur exigent tous leurs foins pour la confervation de ce dépôt. L'Eglife défend aux Nourrices de mettre leurs enfans avec elles dans le lit, avant qu'ils aient un an complet. Noffeigneurs les Évêques en font communément un cas réfervé, fur-tout quand les Nourrices s'endorment pendant ce temps-là. J'ai ouï dire bien des fois à de fages Pasteurs, que que le nombre des enfans étouffés à caufe de cette indiscrétion, est plus grand qu'on ne pense; on en reconnoît facilement le danger. En effet, fi la Nourrice met l'enfant à côté d'elle, elle fe met de côté pour l'alaiter; le chatouillement du nourriffon la fait bientôt fommeiller, elle penche doucement vers lui, elle s'endort, l'enfant n'a pas la force de fe défendre ni de la réveiller, il étouffe. Une Nourrice plus courageufe s'affied fur fon lit avec l'enfant entre fes bras, mais il n'y a pas plus de sûreté; la Nourrice fommeillera également bientôt, en fommeillant elle craint que l'enfant ne lui échappe, dans cette crainte elle le ferre un peu plus, l'enfant plus ferré fe débat, la Nourrice toujours dans la même prévention, le ferre encore davantage, enfin elle s'endort, l'enfant eft trop ferré à la mamelle, il ne peut ni crier, ni le débattre, la Nourrice à fon réveil trouve l'enfant étouffé entre fes bras. Si la Nourrice fe penche fur le berceau, qui eft ordinairement à côté de fon lit, pour donner à tetter à l'enfant, il y aura encore plus de danger; cette attitude eft bien plus propre à endormir la Nourrice, auffi a-t-on obfervé que c'eft de cette maniere que les enfans font étouffés le plus ordinairement. On a vu des Nourrices étouffer leurs enfans en fe tenant debout penchées fur le berceau pour les alaiter. C'étoit même des meres tendres qui n'héfitoient pas à fe lever, malgré le froid & les douleurs qu'il occafionne: comment faut-il donc faire? La précaution la plus fage qu'une Nourrice puiffe prendre, soit pour la sûreté de l'enfant, foit pour éviter beaucoup d'incommodité pour elle-même, eft de donner à tetter à l'enfant réguliérement tous les foirs, dans le temps qu'elle va fe coucher, & s'il eft poffible, toujours à la même heure. Mais fi l'enfant dort, on ne doit point se faire de peine de l'éveiller; les Médecins ne défapprouvent point cette conduité, il n'en eft même aucun qui ne la confeille pour plus de sûreté : on a vu des enfans déjà accoutumés à être levés pendant la nuit, se sévrer de cette dangereuse habitude en fuivant cette pratique ; d'ailleurs les Nourrices, par ce moyen, pourront dormir plus tranquillement, leur lait ne fera point vicié par les infomnies, elles ne feront plus expofées au froid de la nuit, ni par conféquent aux doaleurs & aux maladies qui en font la fuite. J'ai vu un usage bien louable dans le Dio cefe du Bugey; M". les Curés choififfent un jour de Fête dans la belle faifon pour inviter les Nourrices à apporter leurs enfans à l'Eglise; quand elles y font affemblées, le Curé leur représente pathétiquement le prix du tréfor qu'elles ont entre les bras, le foin qu'elles doivent en avoir, les précautions qu'elles ont à prendre pour le conferver, le mérite qu'il y a dans tout, cela, la récompenfe qu'elles en ont à espérer dans cette vie & dans l'autre ; enfuite, il donne la bénédiction à ces enfans dans la forme prefcrite au Manuel de ce Diocefe. Combien d'enfans morts ou eftropiés! par la négligence de leurs Nourrices? Il eft bien fâcheux que l'Etat perde tant de fujets: mais il lui en refte encore un nombre qui, par la fuite, ne peut que lui être à charge; ce font les imbécilles, les punais, les fourds. Comme l'enfant qui vient de naître n'est encore qu'une cire molle, fufceptible, à ce que l'on croit, de pouvoir être pétrie à fon gré, l'on veut que ce soit à une Sage-femme à réparer les défauts de la nature, en réformant la tête de l'enfant, * pour la lui rendre plus ronde, de lui faire un nez plus petit & plus agréable. Ce malheureux préjugé eft de tous les Pays, & les Sages-femmes n'ont garde d'y manquer; les prieres même de la mere, & les reproches qu'elle feroit par la fuite, fi la tête de fon enfant étoit trop longue, large ou trop groffe, les rendent très-exactes à cet ufage: il eft aifé de penfer avec quelle violence cette manoeuvre fe pratique. J'en ai vu ne furvivre que quelques jours après, & d'autres refter infirmes pour toujours, d'autres aussi ne pouvoir respirer pour avoir les os du nez trop refferrés. Mais, pour corriger cet abus, il faudroit que les meres commençaffent les premieres à devenir raifonnables fur cet article-là, qu'elles fuffent bien convaincues qu'elles participent par amour de mere à la perte & aux infirmités d'un bien qui leur eft fi cher. Peint par P. Chapparre. F F Η D Pl.I. Cette premiere figure réprésente le Bassin penché en avant pour faire apercevoir la distance qui se trouve entre les Os Pubis A, et le Coccyx BC, l'Os Sacrum DD, les Os des Iles EE, les Os Ischion FF, les deux trous Ovalaires GG, les cavités Cotiloides HH, les échancrures des Os des Iles aidant à former les troux Ciatiques. Gravé en Couleurs par JRobert. CHAPITRE II. De la Matrice. LA Matrice, que l'on fait être l'organe principal de la génération, est un viscere creux, fitué au bas du ventre, dans cette cavité que l'on nomme le Baffin, entre la veffie, qui eft placée en devant, & l'inteftin rectum, vulgairement appellé le gros boyau, qui eft par derriere; l'un & l'autre lui. fervent comme de couffin, & la garan tiffent des impreffions auxquelles elle fe trouve expofée de la part des os voifins. Ces os lui fervent de rempart dans les cidens auxquels la femme eft expofée; tels que font les chûtes, les coups, &c. ac Le baffin eft fait par deux grands os, dits innominés, qui s'uniffent pardevant, & fe joignent par derriere à l'os facrum, qui acheve de former cette cavité. Chaque os innominé eft compofé de trois pieces, qui font féparées dans les enfans. Ces différentes pieces font connues fous les noms d'os ilium, ou d'os des iles, d'os ifchion & de pubis. Les os des iles forment les hanches; les deux os pubis, vulgairement appellés os barrés, fe joignent pardevant, & c'est à ces deux os que la partie de la femme répond. L'os facrum eft fitué au bas des reins, & forme la partie poftérieure du baffin: il eft joint à un autre os, qui fe termine en pointe; on le nomme coccyx, & vulgairement le croupion. La foupleffe des ligamens qui l'attachent à l'os facrum, lui permet de fe porter en arriere, ce qui facilite la fortie du foetus; & la femme reffent quelquefois en cet endroit une vive douleur, par l'extenfion confidérable de ces ligamens. A l'égard des os ifchion, qui forment la partie inférieure du baffin, en infinuant le doigt indice dans le conduit appellé vagin, on les fent de chaque côté. L'efpace que ces deux os laiffent entre eux, eft ordinairement affez large, pour donner à l'enfant la liberté de paffer. Mais lorfque ces os fe trouvent trop rapprochés, c'est un vice de confor mation P.17 E D Peint par P. Chapparre. la ves tes ses Cette seconde figure fait voir le Basin et la Matrice avec toudépendances dans la situation naturelle ainsi que sie et l'Intestin Rectum, A le corps de la Matrice, B son Orifice à l'extremité de son Col, CC ses trompes, DD les Ovaires, EE les morceaux franges, FF les deux Ligaments larges, GG les deux Ligaments ronds avec la pate d'Oye à leurs extremités, H la partie supérieure de l'Intestin Rectum, I sa partie inférieure où Anus, K la Vessie, L son Col avec le méat urinaire à son extremité. Gravé en Couleurs par J.Robert. mation d'autant plus dangereux pour l'enfant, qu'il n'eft pas poffible de le réparer. On peut, en touchant la femme, s'affurer s'il n'y a point d'obftacle à l'accouchement, par la difpofition de ces os, fur-tout au premier enfant; car lorsqu'elle en a déjà eu, & qu'elle en a porté à terme, on ne doit pas craindre que ces os fe foient rapprochés: cependant fi l'enfant étoit monstrueux par fon volume, pour lors le peu d'étendue du petit baffin rendroit l'accouchement trèsdifficile, pour ne pas dire impoffible, & ce feroit vainement que l'on attendroit que ces os fe féparaffent pour laiffer un paffage libre à l'enfant, préjugé dont on ne peut guere faire revenir les Accoucheufes non inftruites. Elles attendent avec fécurité péndant plufieurs jours auprès d'une femme, que ces os fe féparént, pour faciliter la fortie de l'enfant. Cette erreur ne caufe que trop fouvent dans les Campagnes la mort à un nombre infini de femmes & d'enfans. La figure particuliere de la matrice, qui approche de celle d'une poire un peu appla tie, tant à fa partie antérieure qu'à la postéB rieure, y a fait diftinguer un corps & un çol: elle fe trouve attachée en devant par fon col, ou fa portion étroite, à la vessie, & par derriere à l'inteftin rectum; elle est outre cela attachée aux parties voisines par quatre ligamens, deux à droite & deux à gauche; ils font diftingués en larges & en ronds. Les ligamens larges ne font que des replis membraneux, qui, après avoir couvert la matrice, s'attachent aux régions iliaques & lombaires, où ils fe terminent dans le voifinage des reins. Les ligamens ronds naiffent des parties latérales & fupérieures de la matrice, defcendent vers les ouvertures des muscles du bas-ventre, appellées anneaux, par où ils paffent & vont fe terminer, en fe divifant en forme de patte d'oie, à la partie antérieure & supérieure des cuiffes. Les ligamens larges & les ronds fervent à affujettir la matrice dans fa fituation naturelle, fans s'opposer néanmoins à l'extenfion confidérable qu'elle acquiert pendant la groffeffe; les douleurs que les fem mes reffentent vers la fin dans les aines & aux cuiffes, ont pour caufe les tirail lemens que les ligamens ronds reçoivent alors, à mesure que le volume de la matrice augmente. B Quoique la matrice foit retenue de tous côtés, au moyen de fes ligamens, elle fe déplace néanmoins quelquefois, fes ligamens pouvant prêter, & ainfi occafionner les obliquités, fa chûte & fon renversement. Les mouvemens convulfifs dont elle est susceptible, en font une preuve, puis, qu'elle monte & defcend alors d'une maniere affez fenfible. La matrice eft compofée d'une fubftance membraneuse & mufculeufe, qui lui per met de fe dilater & de fe refferrer plus ou moins, fuivant le volume de ce qui est renfermé dans fa cavité. Le fond ou le corps de la matrice va toujours en diminuant vers fon col, qui fe termine en formant une efpece de mufeau de tanche ou de petit chien, au milieu duquel on remarque une ouverture un peu ovale, laquelle a plus ou moins d'étendue, fuivant la difpofition ou l'état du fujet, fe trouvant plus petite aux filles, & plus grande aux femmes, fur-tout à celles qui ont eu des enfans. CHAPITRE III. Du Vagin. L'EXTRÉMITÉ du col de la matrice eft embraffée par un conduit en partie charnu, & en partie membraneux, qui a environ cinq à fix pouces de longueur : il eft fitué obliquement de bas en haut. Ce conduit, appellé vagin, eft capable de fe dilater & de fe refferrer. L'orifice de la matrice qui répond dans ce conduit, laiffe couler en certains temps les menftrues ou regles, & reçoit auffi dans les approches la femence du mâle pour la génération. Cette ouverture eft capable d'une grande dilatation, puifqu'elle permet la fortie du foetus & du placenta, &c. On la nomme assez communément l'orifice interne de la matrice. L'entrée du vagin, ou fon ouverture extérieure, a beaucoup plus d'étendue dans I les femmes qui ont eu beaucoup d'enfans, que dans celles qui n'en ont point eu, ou qui en ont eu feulement un ou deux. Cette ouverture eft affez étroite dans les filles; elle y eft fermée en partie par un cercle charnu & membraneux. C'est ce cercle que l'on nomme hymen. Au lieu de ce cercle, on rencontre dans les femmes qui ont été meres, & même dans celles qui ne l'ont pas été, mais qui ont fouffert les approches dự mâle, trois ou quatre boutons charnus, connus fous le nom de caroncules myrthiformes, qui font formés par le déchirement que le cercle ou l'hymen a fouffert dans les approches ou dans l'introduction un peu forcée de quelques corps dans ce conduit: d'où l'on doit conclure que fi l'intégrité de ce cercle dans une fille n'eft pas une preuve absolue de sa sagesse, elle doit du moins faire présumer avantageufement pour la fille en qui elle fe trouve. Le vagin eft joint à deux autres conduits, Fun placé en devant, & l'autre fitué en arriere. L'ouverture de celui-ci, appellé anus, répond à l'inteftin rectum. Le conduit anté rieur, nommé uretre, eft la continuation du col de la veffie, fituée immédiatement derrière les os pubis. L'orifice de ce con→ duit, connu fous le nom de méat urinaire, donne iffue à l'urine que la veffie fournit. L'on fait que pour découvrir l'entrée du vagin & l'ouverture de l'uretre, il faut écarter deux replis formés par la peau qu'on nomme les grandes levres, pour les diftinguer de deux autres qui ont moins d'étendue, & qu'on appelle les petites levres ou les nymphes. Celles-ci se portent obliquement de bas en haut pour aller s'unir l'une à l'autre; immédiatement au-deffous de leur union fe voit une éminence charnue, qui a quelque rapport à un grain de grofeille. On la nomme le gland du clitoris, qui eft un corps caché fous la peau, attaché aux os pubis, & dont la ftructure eft presque la même que celle de la partie de l'homme. Au-deffous du gland du clitoris fe découvre le méat urinaire. Les grandes levres fe joignent par leur partie inférieure, & leur union fe nomme la fourchette: l'efpace qui eft au-deffous, & qui fe termine à l'anus, eft connu fous le nom de périnée, dont l'étendue diminue par les fréquens accouchemens, & fe détruit quelquefois par ceux qui font laborieux. Mais outre l'orifice de la matrice, qui fe trouve dans le vagin, elle a encore deux autres ouvertures très-petites, fituées à fes parties latérales & fupérieures. Elles répondent chacune à un conduit particulier, dont la cavité va toujours en augmentant à mefure qu'il s'éloigne de la matrice. Ce conduit, dont la longueur eft d'environ sept à huit travers de doigt, eft connu fous le nom de trompe de Fallope. Ces conduits forment chacun dans leur extrémité un pavillon frangé dans fa circonférence, qui fe joint par une petite portion à l'ovaire. La figure des ovaires approche de celle d'une amande; leur fituation eft aux parties latérales de la matrice, à laquelle ils font attachés par un ligament arrondi, qui a peu de longueur. La membrane qui couvre l'ovaire étant divifée, on découvre un tiffu fpongieux, dans lequel fe rencontrent de petites véhicules remplies d'une humeur claire. On regarde affez communément ces véhicules, comme autant de petits œufs destinés à la génération. De la Genération de l'Homme. ENTRE les divers fentimens qui partagent les Auteurs fur cette importante opération de la nature, le plus vraisemblable eft celui où l'on veut que l'homme & tous les animaux, tant ovipares que vivipares *, tìrent leur origine d'un oeuf, & que de même que dans l'oeuf fécond d'une poule toutes les parties qui doivent compofer le poulet s'y trouvent en abrégé ; de même auffi dans les petits œufs de l'ovaire de la femme, tou-tes les parties qui doivent compofer le fœtus y font en raccourci. On prétend donc dans cette opinion, que l'œuf qui a été * On nomme ovipares ceux qui mettent dehors leurs germes, que le temps & la chaleur font éclorre. Le germe avec la nourriture qui y eft attachée, & fes enveloppes forment l'oeuf. Le vivipares, au contraire, confervent leurs germes un affez long-temps dans la matrice pour en développer toutes les parties, de forte qu'ils donnent naiffance à des animaux vivans, ce qui les a fait nommer vivipares. } fécondé dans l'ovaire par la femence du mâle, s'en détache; qu'il eft reçu enfuite par le pavillon de la trompe; & que continuant fa route par ce conduit, il va fe rendre dans la matrice, où il fe développe, & produit ainfi le fœtus, le placenta & ses membranes, comme je le dirai ci-après. Quoique la matrice foit le lieu où l'œuf qui a été fécondé fe développe ordinairement, on a vu néanmoins cet œuf éclorre dans l'ovaire même; d'autres fois dans la trompe, & enfin dans la capacité du ventre où il étoit tombé. Ces générations extraordinaires font ordinairement mortelles, le foetus qui en eft le produit, ne pouvant fortir par la voie naturelle. CHAPITRE V. Du Foetus, du Placenta, du Cordon umbilical, &c. L'EUR fécondé qui eft paffé dans la matrice, produit par fon développement, non-feulement le foetus, le placenta & le cordon, mais encore les membranes & les eaux qu'elles contiennent. Le placenta ou l'arriere-faix eft une maffe charnue & fpongieufe, formée de l'entrelacement d'une infinité de vaiffeaux, tant arteres que veines. Le placenta est arrondi dans fa circonférence : il a deux faces, l'une plane, & l'autre un peu convexe. C'est par cette derniere face que le placenta est attaché à la matrice. La face plane eft couverte de deux membranes unies l'une à l'autre; elles forment une espece de fac qui renferme non-feulement le foetus, mais auffi fon cordon, & les eaux dans lesquelles il flotte pendant son féjour dans la matrice. La plus extérieure de ces membranes se nomme chorion, & la feconde amnios. La premiere eft un peu épaiffe, & parfemée de beaucoup de vaiffeaux. La feconde est très-mince & diaphane. Les eaux contenues dans le fac qu'elles forment empêchent que le foetus, par fes mouvemens, ne bleffe la matrice, & elles facilitent fa fortie par leur épanchement dans le paffage. Du milieu ou environ de la furface plane du placenta, se détache le cordon umbilical formé de l'union des vaiffeaux qui compofent le placenta, & qui rampent fur cette face. Ces vaiffeaux font au nombre de trois, favoir, une veine appellée umbilicale, & deux arteres qui ont le même nom. La longueur du cordon, qui eft environ de demiaune, donne à l'enfant la liberté de fe mouvoir, fans que le placenta foit exposé à aucun tiraillement. Ce cordon va fe perdre dans le ventre à l'endroit du nombril. Le fang qui a paffé de la matrice dans le placenta, eft porté par la veine umbilicale dans le corps de l'enfant pour fa nourriture, & le réfidu eft rapporté au placenta par les arteres du même nom; ce qui entretient une circulation continuelle entre la mere & l'enfant. Cette explication, quoique fimple, paroît fuffifante pour mettre les jeunes Sages-femmes en état de fentir le danger où feroient la mere & l'enfant, fi cette circulation dont dépend la vie, fe trouvoit interrompue, foit par la compreffion du cordon, foit par le détachement du placenta. Il faut obferver que les vaiffeaux qui composent le cordon, ont des usages tout différens de ceux du refte du corps, puifque c'eft la veine umbilicale qui porte le fang du placenta au foetus, & que ce font les arteres qui le rapportent du foetus au placenta ; au lieu que dans toutes les autres parties du corps, ce font les arteres qui diftribuent le fang que le cœur leur fournit, & que ce font les veines qui en rapportent le résidu au cœur; c'eft ce dont ne permet pas de douter le gonflement qui furvient aux veines pla cées au-deffous de la ligature faite au bras pour la faignée, puifque le gonflement de ces vaiffeaux n'eft produit que par le fang qui revient de la main, & dont le cours fe trouve arrêté par la ligature. Les arteres ont deux mouvemens particuliers, appellés diastole & fiftole, c'està-dire, de dilatation & de refferrement; ces mouvemens forment le pouls, qui fe découvre aifément par le doigt appliqué au dedans du poignet, un peu au-deffus du pouce. Perfonne ne doute que la circulation du fang qui fe fait dans toutes les parties du le corps, par moyen des arteres & des veines, ne foit abfolument néceffaire pour l'entretien de la vie, puifque nous ceffons de vivre dès que cette circulation eft in- terrompue dans les principaux organes du corps, tels que le cœur, les poumons, le cerveau, &c. On conçoit bien que la cir- culation du fang fe fait auffi dans le corps du fœtus; mais ce qu'il y a de fingulier, c'eft qu'il eft privé, pendant fon féjour dans la matrice, d'une fonction qui n'est pas moins néceffaire que la circulation, je veux dire de la refpiration, laquelle dé- pend de l'entrée de l'air dans les poumons, & de fa fortie. Je dis que le foetus eft privé de la refpiration pendant fon féjour dans la matrice; en effet, comment l'air pourroit- il pénétrer jufqu'au foetus, puifqu'il eft renfermé dans un fac ou veffie, & qu'il flotte dans l'eau contenue dans ce fac, le- quel est formé par l'union de deux mem- branes, appellées chorion & amnios? L'on fe convaincra aifément que l'air n'a pas pénétré jufqu'au fœtus, en jettant dans l'eau un morceau du poumon d'un enfant mort dans le fein de fa mere; car on le voit auffi-tôt tomber au fond de l'eau, tandis que le contraire arriveroit, fi l'enfant n'étoit mort que quelque temps après fa naiffance, en un mot, après qu'il auroit refpiré. On verroit alors le morceau du poumon refter au-deffus de l'eau, ce qui n'arrive que par une portion de l'air qui étoit entré dans le poumon pendant l'inspiration, & qui n'en a point été chaffé par l'expiration, deux mouvemens qui partagent la respiration. On auroit recours à cette expérience, fi l'on étoit requis de porter fon jugement au fujet d'une mere accufée d'avoir donné la mort à son enfant, immédiatement après fa naiffance. On conçoit aifément par ce que je viens de dire, que fi l'on voyoit un morceau du poumon de cet enfant jetté dans l'eau, au lieu de tomber au fond, comme il arrive au poumon de celui qui n'a point refpiré; que fi, dis-je, on le voyoit au contraire aller au-deffus de l'eau, cette circonstance condamneroit la mere, $ quelque affurance qu'elle donnât que fon enfant fût venu mort, étant une preuve que l'air a pénétré dans fon poumon, par conféquent qu'il a vécu. Au refte, il eft bon d'observer que les arteres & les veines ne font pas les feuls vaiffeaux qui fe rencontrent dans le corps humain: il y en a d'autres appellés nerfs, dont la cavité n'est point apparente, mais qui n'en font pas moins deftinés à la diftri bution d'un liquide fpiritueux, connu fous le nom d'efprit animal, fourni par le cerveau, le cervelet & la moëlle de l'épine, & dont la préfence eft abfolument néceffaire, tant pour le fentiment, que pour l'exercice de tous nos mouvemens. CHAPITRE VI De la vraie & de la fauffe Groffeffe. L'ON ne fauroit trop se défier des confe noiffances que l'on croit avoir dans l'Art des Accouchemens, lorfqu'il faut décider fi la femme eft enceinte ou non. La fup preffion des regles produisant à-peu-près les mêmes fymptomes que la vraie groffeffe; mais l'on n'aura rien à nous reprocher, fi nous différons un peu de donner nos avis, ou de confeiller des remedes, à moins que la femme ne fût en danger; car alors il est de notre devoir de faire notre rapport de l'état de la femme au Médecin ou au Chirurgien qui fera appellé. Tout amourpropre doit céder lorfqu'il s'agit de la confervation d'un enfant. Comment peut-on fe confoler de fa mort prématurée, qu'on a lieu de fe reprocher, lorfqu'elle a pour cause la trop grande confiance qu'on a eue en foi-même, & que dans cette idée l'on a négligé de s'inftruire à fond des chofes dont la connoiffance empêcheroit de commettre de pareilles fautes? Pour ne point fe tromper, en prenant pour vraie groffeffe ce qui n'eft fouvent que l'effet du retardement du flux menftruel, il faut s'informer fi la femme a été quelquefois fujette à des fuppreffions, & fi, depuis qu'elle ne voit plus, fon ventre s'eft applati dans les premiers temps. Quoi que que plufieurs Auteurs ne veuillent pas que la matrice se refferre pour contenir plus étroitement l'embrion, ce que je ne m'aviferai pas de combattre; il eft pourtant très-fûr que toutes les femmes fe fentent plus à l'aise dans leur ceinture au commencement de la vraie groffeffe; mais que fur la fin du deuxieme mois, le ventre s'ac croît par degrés, le nombril faillit plus en dehors, & l'on fent tout autour une tenfion égale, ce qui eft bien différent dans la fauffe groffeffe; car le ventre augmente dès l'instant de la fuppreffion; il s'étend par tout, & le nombril se trouve concentré. Les naufées, les vomiffemens,les dégoûts, les envies déréglées des alimens ne font pas toujours des fignes certains de la vraie groffeffe, puifque la fimple fuppreffion produit les mêmes accidens. Le fein groffi & douloureux n'en eft pas non plus un figne affuré, à moins que le mamelon ne foit plus dur, & qu'il ne s'éleve de petits boutons fur l'aréole ou le cercle qui fe noircit plus qu'à l'ordinaire. C CHAPITRE De l'Attouchement, improprement appellé Toucher. APRÈS avoir examiné les différens fymptomes dont je viens de faire mention, l'on pourra encore mieux s'affurer de l'état de la femme en la touchant. Pour cet effet, on la fera coucher fur le bord du lit, la 1 tête un peu baffe, on infinuera le doigt indice dans le vagin, pour toucher l'orifice de la matrice, auquel on donnera un petit mouvement pendant que l'on appuiera la main`gauche sur le nombril, & l'on sentira les mouvemens de l'enfant; car il arrive souvent que la femme ne le fent pas remuer au cinquieme, au fixieme mois, & même quelquefois plus tard; mais fi c'étoit dans les premiers temps de la groffeffe, & qu'on ne pût efpérer de fentir les mouvemens de l'enfant, à caufe de fa petitesse, on feroit tenir la femme debout, & en la touchant, on trouveroit l'orifice de la VII. matrice exactement fermé, plus uni, un peu plus recourbé en arriere du côté de l'os facrum, & on fentiroit auffi un poids dans la matrice, qui étant plus légere dans la vraie groffeffe, ne pese pas fur l'orifice comme dans le cas du faux germe, de la môle & du squirre. L'on examinera fcrupuleufement tous ces fignes, pour fe mettre en état d'en faire un rapport jufte, & ne point se tromper dans le jugement que l'on portera. Les jeunes Sages-femmes ne fauroient trop s'appliquer à découvrir par le toucher les divers changemens qui arrivent à l'orifice de la matrice, puifque c'eft de ces changemens que l'on peut juger, 1o. fi la ce 4 femme eft enceinte; 26. des différens temps de fa groffeffe; 3°. fi l'accouchement eft prochain ou éloigné; 4°. fi les douleurs la femme reffent font fauffes, ou que f font celles du travail; §. fi l'enfant eft bien ou mal fitué; 6°. ce qu'il faudra faire pour le foulagement de la mere & de l'enfant. Il n'arrive que trop fouvent que l'ignorance de la Sage-femme eft funefte à l'un & à l'autre. En effet, une Sagefemme qui n'eft point au fait de l'attouchement, ne prévoit pas le danger, & donne dans des écueils, lorfqu'elle penfe être en sûreté; d'où il arrive que lorfqu'elle eft dans l'embarras, elle ne peut en fortir, s'il ne lui reste affez de préfence d'efprit pour appeller du fecours. Les Sages-femmes ne peuvent donc fe mettre trop au fait de l'attouchement, comme le recommande M. Deventer, dans fes Obfervations fur les Accouchemens. = CHAPITRE VIII. De la néceffité de la faignée dans la groffeffe. Si l'on pouvoit faire revenir du préjugé où font bien des perfonnes, de ne point faire faigner la femme enceinte qu'au terme de quatre mois & demi, l'on éviteroit beaucoup de fauffes couches, qui arrivent plus communément aux 2, 3 & 4 mois, qu'aux autres termes. La raison en eft toute = năturelle, puisque le fœtus ne peut, dans ces premiers temps, confommer la quantité du fang dont la matrice regorge,. & qui, par fon abondance, détache l'arrièrefaix qui lui eft adhérent, & prive l'enfant de la vie, qu'il ne tient que de la communication des vaiffeaux de la matrice avec ceux du placenta; mais il arrive fouvent que la Nature, plus fage que la regle que l'on s'eft prefcrite, fe décharge d'ellemême de ce qu'elle a de trop dans ces commencemens, & laiffe les femmes dans le doute fur leur état, parce qu'elles ont eu leurs menftrues une ou deux fois avec moins d'abondance; car il eft des femmes d'un tempérament fi fanguin, que cette légère évacuation n'eft pas fuffifante pour les préferver du danger d'une fauffe-couche, fi l'on n'y remédie par de fréquentes faignées; on peut les faire en tout temps, lorfqu'elles font indiquées par quelquesuns de ces fymptomes, favoir, la difficulté de refpirer, le crachement de fang le faignement du nez, des étourdiffemens l'engorgement des veines, des cuiffes & des jambes, les engourdiffemens dans les membres, les affoupiffemens involontai res, une pefanteur dans le bas-ventre, des maux de reins, des coliques fréquentes, de trop grands vomiffemens, ou de trop violens efforts pour vomir, & des hémorroides engorgées. On doit alors, de toute néceffité, diminuer la quantité de fang pour fauver la mere & l'enfant, & ne point s'embarraffer du terme où la femme fe trouve, pour prévenir la perte de fang qui fouvent fuit de près quelques-uns de ces fymptomes. Il eft des femmes d'un tempérament différent, qui abondent plus en humeurs qu'en fang: deux faignées tout au plus leur fuffifent pour tout le temps de leur groffeffe, elles peuvent même s'en pafser; mais on doit les purger plus fouvent, pour prévenir une maladie qui, quelquefois, fe déclare pendant les couches, & qui devient mortelle, On jugera fi la femme a befoin de la purgation par les fignes fuivans: fi fon teint eft livide, fi elle vomit de la bile, si la bouche eft pâteuse, ou fi elle a un goût désagréable, fi elle est sujette au dévoiement & aux vomiffemens. Les légeres purgations lui feront alors néceffaires; je dis de légeres purgations, car il faut bien fe donner de garde d'en faire prendre de trop fortes: elles ne doivent au contraire être compofées que de ce qu'il y a de plus doux, comme la manne, la rhubarbe, la caffe & les tamarins, ou bien le fyrop de chicorée, compofé de rhubarbe. S'il étoit néceffaire de la purger deux fois de fuite, on laifferoit un jour ou deux d'intervalle, crainte de la trop fatiguer. Ön doit lui confeiller auffi d'éviter les ragoûts, fauces, viandes graffes, & tous les alimens de fantaifie, qui font toujours d'une difficile digeftion, & ne forment qu'un mauvais chyle, qui, fe mêlant avec le fang, ne peut qu'en altérer la bonne conftitution. Il est encore des femmes qui font d'un tempérament fi refferré, pendant leur groffeffe, qu'elles ne peuvent aller à la felle qu'avec beaucoup d'efforts: on doit leur faire fentir le danger qu'elles courent alors, fur-tout l'avortement, un relâchement de matrice, celui du vagin, & les hernies, foit de l'aine ou du nombril on les réfoudra, pour prévenir ces accidens, à faire ufage de lavemens fimples, foit d'une décoction de fon, avec un peu d'huile ou de beurre, ou d'herbes émollientes, telles que la mauve, la guimauve, la pariétaire, &c., foit d'eau fimplement: celle de riviere eft à préférer. On leur recommandera auffi de fe tenir à l'aise dans leurs habits, pour ne point empêcher l'enfant de faire la culbute, dont je parlerai dans la fuite. CHAPITRE IX, Du Faux-germe & de la Môle. LE fauxE faux-germe n'eft autre chofe, felon plufieurs Auteurs, que le vrai germe, qui, dans les premiers jours de la conception, a souffert quelque altération, & ne forme plus qu'une espèce de chaos, qui ne laisse aucune marque d'enfant ; ce n'eft plus alors qu'une petite masse charnue, qui reffemble au géfier d'une volaille. On trouve en l'ouvrant une cavité remplie d'une eau glaireufe. 鬼 Le faux-germe fe détache communément dans le cours des trois premiers mois; mais, lorfqu'il féjourne plus long-temps dans la matrice, il s'y accroît, change de nom, & devient ce que nous appellons môle. La fortie du faux-germe est toujours accompagnée d'une perte de fang plus ou moins confidérable. On ne doit point, pour l'expulfer, agir avec violence, comme bien des perfonnes le font; car fouvent, avec un peu de patience, la nature s'en décharge d'elle-même. On doit toucher la femme doucement, pour s'affurer fi la perte eft occafionnée par un corps étranger; ce que l'on reconnoît par le poids que l'on fent fur l'orifice de la matrice, & une préparation à fa fortie par la foupleffe & la dilatation de cet orifice. On fera faigner la femme fur le champ, on lui donnera un lavement fimple, & on lui fera garder le lit. Cette précaution pourra empêcher l'abondance de la perte; mais fi le fang vient avec plus de force, & s'écoule pendant quelque temps, il faudra de toute néceffité délivrer la femme du faux-germe, fans quoi elle pourroit bien perdre la vie. L'opération n'eft pas bien difficile, car fouvent ce corps étranger n'eft retenu que par l'orifice, qui, à la vérité, ne fe dilate pas auffi facilement aux femmes qui n'ont pas eu d'enfans, qu'à celles qui en ont déjà eu. On infinuera le doigt indice oint d'huile ou de beurre non falé, dans l'orifice, pour le dilater peu-à-peu; on le tournera tout autour, en le pliant à demi, pour former une espece de crochet, & par ce moyen, on retirera aifément le faux-germe, ayant attention de ne rien forcer, parce que la partie mollaffe du faux-germe, qui fe présente la premiere, fe fépareroit bientôt de l'autre. Pour rendre l'opération plus facile, on recommandera à la femme de pouffer en bas, tandis qu'on tâchera de retirer le faux-germe. Il arrive quelquefois qu'il fe trouve très-adhérent; on fe conduira alors, comme je le dirai au Chapitre de l'Arriere-faix, la méthode étant à-peu-près la même, pour faciliter l'expulfion de l'un & de l'autre. L'on doit bien fe donner de garde de faire prendre à la femme des remedes violens; loin de procurer la fortie du fauxils exciteroient la perte, & pourgerme, roient même caufer la fievre. On doit agir avec beaucoup de prudence, pour ne pas avancer la mort d'un enfant, que la matrice contiendroit avec le faux-germe, ce qui arrive quelquefois; car la femme peut con cevoir deux ou plufieurs enfans à la fois, & à quelque distance l'un de l'autre, felon le fentiment de ceux qui admettent la fuperfétation *; mais l'un de ces enfans ayant péri dans les premiers jours, comme je l'ai dit ci-deffus, la matrice s'en débarraffe, & retient le foetus jufqu'au terme ordinaire. En pareil cas, l'on doit agir avec beaucoup de ménagement, n'employant *** * La fuperfétation eft une conception réitérée, qui fe fait lorsque la femme qui eft déjà groffe, vient à concevoir une feconde fois. Tous les Auteurs ne conviennent pas de la fuperfétation, & ceux qui l'admettent, affurent qu'elle est très-rare. t aucune violence, pour débarraffer fur le champ la femme du faux-germe, à moins qu'elle ne fût en danger à raison de la grande perte de fang. On examinera les linges, pour juger fi la perte eft confidérable. Il eft effentiel de ne pas s'y méprendre, car il faut peu de fang pour gâter beaucoup de linge. On examinera avec foin les caillots, pour découvrir fi le fauxgerme n'y feroit pas renfermé: on recommandera, dans cette vue, de conferver tous ces caillots, comme je le dirai dans le Chapitre fuivant. CHAPITRE X. De la Fauffe-couche ou de l'Avortement* L'AVORTEMENT fe fait lorsque l'enfant vient avant le terme de fept mois; car fa fortie à sept mois, doit être regardée * Quelques-uns diftinguent la fauffe-couche de l'avortement, donnant le nom de fauffe-couche à la fortie du faux - germe, de la môle & autre corps étranger; & celui d'avortement aux accouchemens prématurés, c'est-à-dire, à la fortie d'un enfant avant le terme de fept mois. comme un accouchement, puifque les enfans venus à ce terme peuvent être élevés; mais avant ce temps-là on ne peut y compter, & fouvent ils n'ont pas le bonheur de recevoir le Baptême. Ces couches prématurées viennent quelquefois de ce que la femme n'a pas été affez faignée, ou des efforts qu'elle a faits pour aller à la felle; ou elles font caufées par quelque maladie aiguë, ou par une toux violente, la colere, la danfe, les chûtes, les coups, les fardeaux trop pefans, les fecouffes des voitures, & par plusieurs exercices, qui, quoiqu'en apparence de peu de conféquence, deviennent nuifibles à des tempéramens délicats. En effet, il eft des femmes d'une complexion fi foible, qu'elles font obligées de garder le lit pendant tout le temps de leur groffeffe, pour éviter cet accident. Lorsque la femme reffent des douleurs, & qu'elle nous appelle, il faut d'abord s'informer de ce qui a pu y donner lieu; & s'il y avoit du temps qu'elle n'eût été faignée, on la feroit faigner fur le champ, & garder le lit. Il eft certain que, par ces : précautions, on pourroit prévenir le danger qu'elle court; mais fi fes douleurs dépendoient de quelque accident particulier, quoique ces précautions foient toujours néceffaires pour empêcher la trop grande perte de fang, elles ne la garantiront point de l'avortement. On connoîtra que ce malheur eft inévitable, lorsque la femme perdra des caillots de fang, & que les eaux du foetus s'écouleront. Si ces eaux font d'une couleur noirâtre, & qu'elles aient une odeur cadavéreuse, on' peut afsurer que l'enfant eft mort, & même depuis long-temps; & fi, en touchant la femme, on ne trouve pas l'orifice affez dilaté, on l'oindra avec du beurre fans fel, ou de l'huile, & on abandonnera l'opération à la nature; mais fi la perte devient plus confidérable, il faudra de toute néceffité accoucher la femme promptement. On infinuera doucement un doigt dans l'orifice de la matrice, & on y fera entrer les autres fucceffivement, les ayant auparavant bien graiffés: fi les membranes n'étoient point percées, on les perceroit avec un gros grain de fel, un cure-dent, ou bien en les grattant avec l'ongle, quoiqu'on doive avoir les ongles toujours coupés près; mais ces membranes font fi tendres, que le moindre mouvement qu'on leur donne eft fuffifant pour le rompre. On tirera l'enfant en le retournant, s'il est néceffaire, par la méthode que j'indiquerai ci-après. Il est bon d'observer que l'enfant, avant fix mois, a rarement befoin d'être retourné. Lorfqu'on retourne l'enfant, on doit le faire avec beaucoup de ménagement, pour ne pas rompre le cordon qui doit fervir de guide pour détacher l'arrierefaix, quoiqu'il fe trouve rarement adhérent dans les pertes; mais, fuppofé qu'il foit attaché par quelque côté, & que l'enfant foit petit, on peut, ayant la main dans la matrice, amener le tout ensemble. On confeille néanmoins de conferver le cordon, pour détacher la portion du placenta qui eft adhérente; ce que l'on fera de la maniere que j'indiquerai ci-après. Si le foetus étoit forti, & que l'arrierefaix fût refté dans la matrice, on tenteroit alors d'en procurer la fortie par l'opération de la main, qui eft toujours la plus sûre. Plus le foetus eft petit, plus il y a de précautions à prendre pour délivrer la femme, la matrice ne s'ouvrant qu'à proportion du volume de l'enfant, qui, dans ces premiers temps, eft d'une fi grande molleffe, que la dilatation de l'orifice n'eft pas fuffifante pour retirer aisément l'arrière-faix refté dans la matrice. Si après avoir fait, avec beaucoup de précaution, les tentatives néceffaires pour retirer l'arriere-faix, on n'a pu réussir, & fi on a lieu d'appréhender, qu'en les continuant, on ne caufe une inflammation à la matrice, ce qui expoferoit la femme à de grands dangers, il faudra fe réfoudre à laiffer l'arriere-faix, & l'on tâchera d'en faciliter la fortie par les remedes fuivans, qui la procureront, finon en entier, du moins en fuppuration. On fera dans la matrice des injections, qui feront compofées d'une décoction de mauve, de guimauve, pariétaire & graine de lin, à laquelle on joindra un morceau de beurre beurre frais on pourra donner un lavement un peu fort, fans néanmoins faire prendre aucun remede purgatif, crainte d'exciter une perte, & même la fievre. On fera prendre à la malade une potion faite avec trois onces d'eau d'armoise, une demi-once d'eau de cannelle, une once de firop d'armoife, & une once d'huile d'amandes douces, le tout mêlé ensemble. On lui en donnera la moitié fur le champ, & le reste deux heures après, ayant attention de faire un peu tiédir cette potion. L'on exprimera le jus d'une orange dans fon bouillon, ou bien on le mêlera dans fa tifanne, qui fera faite avec du chiendent, un peu de firop de limon ou de grenade. Ces firops font bons pour l'eftomac, & fortifient le cœur contre les vapeurs qui furviennent dans ces cas. J'ai dit au précédent Chapitre qu'il falloit faire garder les caillots de fang: cette précaution eft très-néceffaire; car fouvent les femmes qui font autour de la malade, en jettant les caillots, jettent auffi un petit fœtus ou embrion, fans s'en appercevoir, D & affurent qu'elles n'ont rien vu. L'on ignore ainfi le danger dans lequel la femme va se trouver, & faute de s'y prendre affez à temps, elle périt. Il eft encore un moyen de procurer la fortie de l'arriere-faix refté depuis quelques jours dans la matrice; c'est de faire mettre les jambes de l'Accouchée dans un vafe, le plus profond que l'on pourra trouver, de le remplir d'eau affez chaude, & de frotter les cuiffes toujours vers le bas. Si les premieres frictions ne fuffifent pas, on laiffera repofer la femme, & on les recommencera. Ces frictions font une reffource immanquable, & l'arrierefaix fort peu de temps après. Je demande, en grace, que l'on ne me taxe point de m'ériger en Docteur ; je ne parle ici que par un pur zele pour des malheureuses dénuées de tout fecours, foit que l'éloignement des Villages ne permette pas d'y faire venir à temps un Médecin ou un habile Chirurgien, soit la mifere de ces femmes empêche d'en que faire les frais convenables. C'est dans ces cas preffans, que je Peint par P. Chapparre. Cette figure représente le bain à nud dans lequel est située la Matrice dans sa position naturelle avec toutes les parties qui en dépen. dent A le Vagin ouvert, B l'Orifice de la Matrice, C le corps de la même Matrice qui étant ouverte laisse voir l'enfant qu'elle contient avec les membranes, D qui l'envelopent, EE les Trompes, FF les Ovaires GG les morceaux frangez, HH les deux Ligaments larges, II les deux Ligaments ronds avec la patte d'Oye à leur extrémité, K la Vessie, a L VIntestin Rectum. On a représenté ce bain évasé afin de mieux faire connoitre la Matrice et toutes ses parties dans leur situation naturelle. Pl. III. Grave en Couleurs par J. Robert. fouhaite que les Accoucheufes de Campagne foient capables de donner les fecours néceffaires aux femmes qui fe trouveront en danger. Je ne faurois trop les exhorter à ne point fe confier à leurs prétendues connoiffances, & à être dociles aux fages avis des perfonnes expérimentées. De la fituation naturelle de l'Enfant dans la Matrice. LORSQUE l'enfant eft renfermé dans la matrice, le milieu de ce viscere eft la place la plus ordinaire qu'il y occupe, la tête en haut, & fes pieds pofant fur l'orifice, & il fe trouve courbé fur la poitrine, le fommet de sa tête répondant au nombril de la mere : fes mains font placées fur fes genoux, qui font pliés, fes pieds étant approchés des feffes; de maniere qu'il fe trouve tout accroupi: il refte dans cette attitude jufqu'au feptieme mois, auquel temps il fait la culbute, parce que la tête devenant plus lourde, fa pefanteur l'entraîne en bas & en devant. Pour lors le fommet de la tête vient pefer fur l'orifice, le nez tourné vers le fondement de la mere, & les pieds font en haut & touchent au fond de la matrice: c'eft cette attitude que l'on nomme fituation naturelle. Lorsque l'enfant préfente quelqu'autre partie que la tête, on regarde cette fituation comme contre nature, & ce n'eft que par le moyen de l'Art que l'enfant peut fortir de fa prifon. Cette culbute occafionne quelquefois des douleurs très-vives, & qui durent affez de temps, pour faire croire à la femme qu'elle accouchera bientôt. En effet, nous pouvons nous y tromper nous-mêmes. La tête de l'enfant pefant fur l'orifice, il eft dilaté par fa chûte préci pitée, ce qui annonce la préparation au travail. C'est dans ces momens que l'expérience & la prudence de la Sage-femme font néceffaires pour la mere & l'enfant; car fi l'on excitoit les premieres douleurs de la mere, on les mettroit tous les deux en danger de perdre la vie. Cette préparation eft quelquefois fi confidérable, que voyant les douleurs fe ralentir, on feroit tenté de les réveiller par quelques remedes; mais en évitant de tourmenter la femme, comme bien des gens font, elle acheve fon temps, & accouche heureusement. La premiere femme que je vis en cet état me furprit. Au huitieme mois elle fentit de vives douleurs, qui s'étoient augmentées par degrés, à ce qu'elle me dit je trouvai l'orifice dilaté de la largeur d'un petit écu, & toutà-fait éminci; & les eaux qui fe portoient au-devant de la tête à chaque douleur, me perfuaderent que la femme accoucheroit bientôt mais tout-à-coup ces douleurs cefferent, & après avoir attendu quelque temps, efpérant qu'elles reviendroient, je m'avifai de toucher la femme, je ne fentis plus les eaux fe former comme auparavant, & elle n'eut de vives douleurs qu'à la fin du neuvieme mois, auquel temps elle accoucha heureusement. La liberté que j'avois de la toucher, me fit connoître que l'orifice refta long-temps dilaté, mais les eaux ne fe formoient plus, & ce ne fut qu'à la fin de fon terme qu'elles reparurent. Je pourrois citer d'autres exemples; mais celui-ci fuffit pour prouver qu'il ne faut rien précipiter. Il arrive quelquefois à certaines femmes, que les eaux commencent à s'écouler toutà coup, & continuent pendant l'efpace de huit jours avec de petites douleurs; il ne faut pas croire pour cela qu'elles accoucheront bientôt, car ces eaux ne font point celles dans lesquelles flotte l'enfant, & qui doivent précéder & accompagner même l'accouchement; elles étoient contenues dans la matrice, entre fa membrane interne & les enveloppes du foetus. On leur donne le nom de fauffes-eaux, pour les diftinguer de celles qui font renfermées dans les enveloppes même, & que l'on nomme vraies. XI I. CHAPITRE De la préparation à l'Accouchement naturel. L'ACCOUCHEMENT eft dit naturel, lors- que l'enfant vient au terme de neuf mois, P. 55. PL.V. ? Cette figure réprésente comme la précédente la Matrice dans le bassin, avec le second dégré de dilatation de son Orifice et la saillie de la membrane qui contient le bain, Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleur par J. Robert. P. 55. Cette figure réprésente le corps seul de la Matrice dans le bassin, avec le premier dégré de dilatation a son Orifice. Peint par P. Chapparre.. que dent prem s'éca tie. F natur regle femm on d natur dens fouve l'enfa ces d dans Ç dan voi néa per rab che 1 vai cen DES ACCOUCHEMENS. 55 que fa fortie n'eft précédée d'aucun accident fâcheux, que la tête fe présente la premiere & toute feule, & que les eaux s'écoulent quelques momens avant sa fortie. En un mot, on appelle Accouchemens naturels, ceux qui fe paffent felon les regles prefcrites par la nature à toutes les femmes, & qui finiffent heureusement; & on donne le nom d'Accouchemens contre nature à ceux qui font accompagnés d'accidens extraordinaires, & qui fe terminent fouvent malheureusement pour la mere & l'enfant il n'y en a que trop de l'efpece de ces derniers, dont je parlerai en particulier dans la fuite. : Quoiqu'il ne faille pas grande fcience dans l'Accouchement naturel, pour recevoir l'enfant qui fe préfente bien, il y a néanmoins bien des précautions à prendre pendant le travail, pour que ces favorables difpofitions n'aient pas de fuites facheufes. On connoîtra que la femme eft en travail d'enfant, & que fes douleurs annorcent un prochain accouchement, fi elles proviennent des reins, & qu'elles répondent au bas du ventre, s'il s'écoule de la partie des humidités glaireufes, quelquefois fanguinolentes, & fi l'orifice de la matrice se trouve dilaté & éminci. Quand l'enfant fe préfente bien, la tête fe fait connoître par fa dureté, & on la distingue aisément de toute autre partie par fa rondeur égale : on fent dans les douleurs que les eaux renfermées dans les membranes fe portent audevant de la tête, qu'elles s'accroissent à mefure que le travail avance, & que la poche que ces membranes forment, au lieu de s'alonger dans le vagin, présente une rondeur mollaffe, où fe trouvent contenues, non-feulement les eaux, mais encore la tête du foetus. Il faut prendre garde à ne pas fe tromper; car fouvent l'orifice forme un bourlet du côté du conduit de l'uretre. Cette groffeur eft affez considérable pour en impofer, la prenant pour les eaux ou pour quelque corps étranger, qui précede la fortie de l'enfant. J'ai vu auffi qu'elle a été prise pour la fortie du cordon umbilical. Troisième dégré de dilatation de l'orifice de la Matrice et son bourlet a sa partie supérieure avec l'acciput de l'Enfant qui commence à paroitre. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleur par J. Robert. 57 DES ACCOUCHEMENS. L'on doit juger des fuites fâcheufes pour la mere, fi l'on tiroit à foi ce bourlet, le prenant pour les membranes qui contiennent les eaux, c'eft à quoi on doit faire beaucoup d'attention en touchant la femme avec délicateffe. Cette groffeur est souvent facile à voir, lorsque l'enfant s'avance au paffage, en gliffant doucement le doigt indice en bas fous le cercle de l'orifice, & la partie que l'enfant présente : lorsqu'il se présente mal, fi l'on est appellée affez tôt pour qu'il ne fe trouve point engagé dans le paffage, on donnera à la femme un lavement, pour vuider l'inteftin rectum : le paffage fe trouvant plus dégagé, l'enfant fortira plus aifément. S'il y a du temps que la femme ait été faignée, & qu'elle ne foit pas trop foible, on lui fera tirer deux palettes de fang. Cette précaution eft trèsutile pour lui rendre la respiration plus aifée, la matrice plus fouple & plus difpofée à fe dilater, & on prévient par ce moyen la perte qui pourroit fuivre l'accou chement. Ce que je viens de dire fur la préparation au travail, doit engager à attendre patiemment avant de faire pouffer les premieres douleurs, & de mettre la femme en fituation pour accoucher. Lorsqu'au contraire on aura lieu de croire que les douleurs font véritables, & qu'elles annoncent un accouchement prochain, on fera mettre la femme au lit, méthode infiniment meilleure que celle qu'on a dans les Campagnes, qui eft de la faire tenir suspendue en l'air, préfumant qu'elle accouchera plutôt. On ignore le danger auquel on l'expose en la mettant dans cette fituation, qui menace d'une perte inévitable, outre qu'en la délivrant dans cette attitude, on rifqueroit d'entraîner le fond de la matrice avec l'arriere-faix. Les vents que la femme reçoit alors font auffi très-préjudiciables; ce qui doit engager à représenter, tant à la femme qui eft prête d'accoucher, qu'à celles qui font autour d'elle, qu'elle doit être mise au lit, principalement dans ces derniers momens. Le lit doit être fuffifamment garni, fur-tout du côté des pieds, parce que l'accouchement étant fait, on n'aura qu'à tirer la femme en haut, & elle fe trouvera à fec. L'on doit fe donner de garde de faire ufer à la femme, pendant fon travail, ďaucune boiffon capable de l'échauffer, comme de vin pur, ou autre liqueur spiritueuse, car on pourroit exciter une perte, & même la fievre. On doit lui faire prendre fimplement un peu de vin bien trempé, ou de la nourriture légere, pour ne point trop charger l'eftomac. On aura attention que l'air de chambre ne foit point trop froid; en un mot, on tâchera de tenir la femme le plus chaudement qu'il fera poffible, de crainte que le froid ne ralentiffe fes dou leurs. L'on doit éviter de toucher trop fouvent la femme, comme bien des gens le font, croyant par-là l'aider, au lieu qu'on ne fait au contraire que la fatiguer, & souvent irriter fes parties, qui fe tuméfient aifément. On doit craindre auffi qu'à force d'avoir le doigt dans l'orifice, on ne perce trop tôt les membranes, ce qui rendroit l'accouchement laborieux. L'on fe conten tera d'oindre le doigt de beurre non falé, ou d'huile, & on le promenera tout autour de l'orifice pour faciliter fa dilatation. Si en touchant la femme auffi-tôt qu'on eft appellée, on a lieu de préfumer que le travail fera long, on l'en avertira avec ménagement, & en lui faisant espérer que fon état peut bientôt changer. Cette attention à l'avertir d'abord de fa fituation eft très-utile, car en lui promettant de moment en moment qu'elle fera bientôt délivrée, on la jette dans des impatiences qui ne font qu'augmenter fon mal. On doit aussi lui demander fi elle ne fe trouve point gênée par quelque perfonne préfente à l'accouchement; car fi cela étoit, il faudroit engager à fortir la perfonne qui la gêne : la peine caufée par la vue de quelqu'un, peut lui faire retenir fes douleurs, & l'expofer à quelque danger. Une circonftance qui n'est point à négliger, c'eft de faire garnir la tête de la femme avant qu'elle accouche; elle peut fe peigner, & fi elle mettoit de la poudre, elle obferveroit qu'elle n'eût point d'odeur; elle doit avoir de bons bonnets, & de groffes cornettes, & s'accommoder la tête de maniere qu'elle n'y fente point de froid, & qu'elle puiffe être douze ou quinze jours fans y toucher. 表 ===========}• CHAPITRE XIII. De l'Accouchement naturel. APRÈS avoir obfervé les ménagemens dont je viens de parler, on aidera la femme de la maniere fuivante. Si les douleurs augmentent, que le vifage foit animé, le ventre baiffé, le pouls élevé, l'orifice dilaté au moins de la largeur d'un écu de fix livres, fes bords très-émincis, les eaux bien tombées, fur-tout dans les douleurs, la tête de l'enfant les fuivant de près par les efforts que la femme ne peut s'empêcher de faire pour pouffer en bas, toutes ces circonftances annoncent un accouchement prochain, fur-tout aux femmes qui ont eu des enfans; car le paffage ayant déjà été frayé, l'enfant trouve plus de facilité pour fa fortie. On ne doit plus quitter alors la femme; c'est auffi le moment où elle a plus befoin de fecours. On la fera coucher la tête & la poitrine un peu élevées, pour faciliter la refpiration; on lui hauffera un peu le fondement, en mettant un petit oreiller fous les feffes, crainte que la partie fe trouvant trop en deffous, la fortie de l'enfant ne devint plus difficile. On lui écartera les genoux, & on les fera tenir par quelqu'un, qui empêchera qu'elle ne les rapproche pendant la fortie de l'enfant; les jambes feront pliées, & les talons approchés des feffes. On dispensera tout ce qui convient, tant pour la mere que pour l'enfant; on tiendra prêts deux liens faits de fils en trois ou quatre brins: ces liens feront néceffaires pour lier le cordon, comme je le dirai ci-après. Il ne faudra fe fervir pour le couper que de cifeaux mouffes ou camus, les cifeaux pointus pouvant bleffer. & On doit avoir un linge ou chauffoir près de foi, pour le mettre fur la partie, afin d'empêcher l'air d'entrer dans la matrice : tandis qu'on noue le cordon. En attendant le moment de délivrer la femme, on doit la confoler le plus affectueufement qu'il eft poffible fon état douloureux y engage; mais il faut le faire d'un air de gaieté, & qui ne lui inspire aucune crainte de danger. Il faut éviter toutes les chuchoteries à l'oreille, qui ne pourroient que l'inquiéter, & lui faire craindre des fuites fâcheufes. On doit lui parler de Dieu, & l'engager à le remercier de l'avoir mife hors de péril. Il faut éviter de lui faire faire des actes qui ne pourroient que la contrifter. Si elle a recours à des reliques, il faut lui repréfenter qu'elles feront tout auffi efficaces, étant mises fur le lit voifin, que fi on les pofoit fur elle-même, ce qui pourroit la gêner. 950 On évitera de comprimer le ventre de la femme, espérant par ce moyen d'accélérer la fortie de l'enfant. Cette pratique eft très-mauvaise: on fe donnera bien de garde auffi de mettre dans la partie de la femme un doigt de chaque main en forme de crochet, comme bien des femmes le font. Ce tiraillement n'eft d'aucune utilité pour faire avancer la tête de l'enfant. On fe contentera de dilater l'orifice de la matrice, encore doit-on le faire bien doucement. On ne doit point espérer, qu'avec un doigt on puiffe faire avancer la tête, on risqueroit, à force de la tirer, de la bleffer, & d'y faire des égratignures, ce qui n'arrive que trop souvent. En touchant la femme, on doit toujours avoir égard au col de la veffie, crainte qu'il ne foit trop fatigué; car, faute de ménagement, on pourroit y occafionner une inflammation, qui feroit dangereuse. On ne doit point infinuer le doigt dans le fondement, pour faire avancer la tête de l'enfant, cette pratique ne peut être que préjudiciable; l'irritation de cette partie eft capable d'y faire naître quelque ulcération, qui feroit de difficile guérifon, & pourroit caufer la destruction de la cloifon qui fépare les deux ouvertures, ce qui rendroit la femme fort dégoûtante. On fe contentera d'oindre avec du beurre ces parties, fi elles n'étoient point affez humectées, foit par les glaires, foit " foit par l'écoulement des eaux; & fi elles fe trouvoient à sec depuis long-temps, l'on auroit foin de les hume&ter fouvent, pour les rendre plus difpofées à prêter. Les eaux étant retenues dans les membranes, & la poche qu'elles forment s'avançant toujours au point de fortir de la partie, la tête de l'enfant fuivra de près, Îa matrice se trouvant affez dilatée pour ne plus la retenir, comme elle faifoit dans le commencement, l'orifice ceignant alors la tête comme une espece de couronne; c'eft pour lors qu'on dit que l'enfant eft au couronnement. Après avoir laiffé paffer quelques douleurs, on fe déterminera à percer les membranes, ce qui doit fe faire dans le moment de l'effort ou de la douleur, & l'enfant fort fouvent en même temps, rien ne s'opposant à sa sortie. On fe fervira pour les percer du bout du doigt, d'un gros grain de fel, ou de la pointe d'un cure-dent, évitant d'employer la pointe des ciseaux, ou autre inftrument trop aigu, capable de bleffer l'enfant. On ne doit point mettre la femme à E découvert, comme plusieurs le font : fi l'on ne rougit point de l'indécence qu'il y a de la laiffer ainfi nue, expofée à la vue des fpectateurs, on doit au moins la cacher avec foin pour garantir ses parties de l’impreffion du froid, qui pourroit lui être préjudiciable: d'ailleurs, la vue en ces caslà nous eft inutile, puifque ce font nos mains qui doivent fentir, & nous faire diftinguer ce qui fe paffe. On devroit, dès le commencement que l'on pratique l'Art des Accouchemens, fe faire un exercice d'apprendre, les yeux fermés, & de reconnoître tout par le tact. Lorfque l'enfant paroitra difpofé à fortir, on tiendra une main de chaque côté de la partie, pour que les pouces en les applatiffant l'écartent à mesure que l'enfant s'avancera, & l'on repouffera les grandes levres, pendant la fortie. La tête étant fortie, il faut le retenir tout de fuite, en gliffant les doigts fous la mâchoire, fans prendre la tête par les oreilles, crainte de les arracher, ce qui est arrivé plus d'une fois. En tenant ainfi la tête, on ne doit point tirer l'enfant avec trop de violence, par le danger auquel on l'expoferoit, fi le cordon fe trouvoit autour du col, ou de quelque autre partie, comme je le ferai observer. Il arrive quelquefois, comme le dit M. Dionis, que l'enfant parvenu au couronnement, y reste pendant quelque temps par la réfistance que cette couronne, c'eftà-dire, l'orifice fait à s'ouvrir fuffifamment pour fa fortie, & que la tête de l'enfant, dont les futures ne font pas encore formées, s'alonge en pointe dans le vuide de la couronne; mais qu'enfin par les efforts réitérés de l'enfant, qui font alors plus violens, parce qu'il a la liberté de s'étendre davantage, efforts d'ailleurs fecondés de l'action de la matrice, de celle des muscles du bas-ventre, & du diaphragme, il force cette barriere, & entre dans le vagin; c'eft alors que l'on dit que l'enfant eft au paffage. Sur quoi il eft à remarquer que la fortie de l'enfant dépend bien moins de ces efforts particuliers que de l'action de ces trois organes. Quoique le plus fort foit fait, l'enfant n'eft pas hors d'affaire, il trouve fouvent de la réfiftance à l'entrée de ce conduit, les nymphes & les grandes levres ne prêtant point affez pour permettre fa fortie. La tête de l'enfant fe préfente, on la voit, & elle ne peut fe débarraffer fans le fecours d'une habile Sage-femme, ou d'un Accoucheur, qui, avec fes deux mains qu'il gliffe entre la tête & les grandes levres, les oblige de s'écarter pour la laiffer avancer; alors coulant fes doigts jufques fous les mâchoires de l'enfant, il le tire dehors: mais il ne fuffit pas que la tête foit fortie, il eft néceffaire que les épaules suivent. Il ne faut pas tirer la tête avec trop de violence, ni la lui élever comme on voit dans cette figure * on doit la tirer un peu à droite pour dégager une épaule, & enfuite à gauche pour faire venir l'autre, & fi l'on ne peut réuffir par ce moyen, il faut couler deux doigts le long du col jufqu'à une des aiffelles, pour débarraffer l'autre ; de cette maniere les épaules étant paflées, le refte du corps fuit fans peine. Cette figure représente l'Enfant qui vient naturelement avec la position convenable des mains aux deux côtés de la tête pour le tirer en bas. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J. Robert. Cette figure représente l'enfant qui vient naturelement mais par une mauvaise manœuvre lui ayant trop élevé la tête en le tirant. Ce qui s'aperçoit par sa face qui paroit en racourci. On lui a engagé les épaules dans les deux trous ovallaires. Ce qui forme un obstacle a sa sortie, et peut causer le décollement. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J. Robert. En parlant de la matrice, j'ai dit que la veffie, dont la figure approche de celle d'une bouteille renverfée, étoit fituée à fa partie antérieure, immédiatement derriere les os pubis. L'on ne doit donc point s'étonner fi l'on voit quelquefois des femmes enceintes ne pouvoir retenir leur urine, & d'autres qui ont une indifpofition contraire, ne rendant leur urine que difficilement; il arrive même quelquefois que l'on eft obligé de fonder ces dernieres, c'eft-à-dire, d'introduire dans le méat urinaire, ou l'orifice du conduit de l'urine, une fonde creufe, nommée Algalie, qui, pénétrant jufques dans la veffie, facilite la fortie des urines. L'on fent bien que la premiere de ces indifpofitions, nommée incontinence d'urine, dépend de la compreffion que le fond de la veffie reçoit de la part de la matrice, dont le volume fe trouve alors confidérablement augmenté; & que la feconde, appellée rétention d'urine, a pourcaufe la compreffion de fon col, produite auffi par l'augmentation du volume de la matrice.. L'on doit attribuer de même à la com- E is w.aa preffion que reçoivent les veines iliaques de la part de la matrice, les gonflemens œdémateux, & les varices qui surviennent le plus fouvent vers la fin de la grossesse, tant aux cuiffes qu'aux parties extérieures de la génération, & les hémorrhoïdes qui incommodent la pluplart des femmes enceintes. CHAPITRE X I V. De la ligature du cordon. J'AI AI dit au Chapitre précédent qu'il ne falloit point tirer l'enfant avec trop de violence; cette précaution eft fi néceffaire, que s'il arrivoit que le cordon formât un ou deux tours au col, ou à quelque autre partie, l'on pourroit, en tirant ainfi l'enfant, détacher tout-à-coup l'arriere-faix, & ex- citer une perte de fang confidérable. On pourroit encore caufer un renversement de la matrice, en entraînant son fond vers l'orifice, fi l'arriere-faix y étoit très-adhé- rent; on rifqueroit enfin de rompre le cordon près du placenta, ce qui rendroit l'opération plus difficile, étant obligée alors de porter la main dans la matrice pour en faire la séparation; souvent même gros cordons fe caffent plus aifément que ceux qui font déliés. les L'enfant étant forti, on l'approchera de la partie de la mere, prenant garde que le nez ne foit en deffous, crainte qu'il ne foit fuffoqué, ou qu'il n'avale ce que la femme perd dans ces momens : on le retirera enfuite, & on le mettra fur le dos, ou encore mieux fur le côté. Lorfque par fes cris il aura donné des marques de vie, on lui nouera le cordon, en tournant deux ou trois fois le fil, qu'on ferrera affez pour prévenir l'hémorragie qui pourroit arriver, fi l'on n'avoit cette précaution, & qui feroit capable de caufer la mort de l'enfant; on évitera auffi de le lier trop ferré, crainte de le couper ou d'occafionner des douleurs très-vives, qui font quelquefois fuivies de convulfions; ce que Viardel dit avoir vu. La ligature du cordon étant faite, pour s'affurer fi on l'a affez ferré, il n'y a, après l'avoir coupé, qu'en effuyer le bout avec un linge, & examiner s'il n'en fort rien; s'il fuinte quelque chofe, c'eft une marque qu'il n'eft point affez ferré, & il faut néceffairement le ferrer davantage; & l'on doit regarder comme une preuve que le cordon eft fuffifamment ferré, lorfque rien ne fort. La distance de la ligature au nombril doit être de deux travers de doigt au plus, on fera une feconde ligature à trois travers de doigt de la premiere, on coupera le cordon entre les deux. Quelques-uns confeillent, avant que de couper le cordon, de faire une troisieme ligature, immédiatement au-dessus de la premiere, pour prévenir l'hémorragie, qui ne manqueroit pas d'arriver, fi cette premiere ligature venoit à fe lâcher, J'ai dit qu'il falloit couper le cordon entre les deux ligatures, pour faire sentir la néceffité de lier la portion du cordon qui répond au placenta encore attaché à la matrice; car la fortie du fang qui s'écoule par la veine umbilicale, mettroit la mere en grand danger, fi elle ne lui causoit la mort. On lit dans un Ouvrage de M. Méry, premier Chirurgien de l'Hôtel-Dieu de Paris, une Lettre qui lui fut communiquée par M. Aubert, Chirurgien de la mêmeẹ Ville, qui prouve la néceffité de cette ligature. Ce Chirurgien fut appellé au fecours d'une perfonne qui avoit caché fa groffeffe à sa famille. Le terme venu qu'elle devoit accoucher, elle fut furprise la nuit, & entra en travail fans autre fecours que celui de fon frere, qui accourut aux cris que les douleurs lui faifoient pouffer. Étonné de voir un enfant qui parut dans le moment, il prit, tout embarraffé qu'il étoit, un fil dont il lia le cordon proche l'umbilic, le coupa au-deffus de la ligature, & fe retira, ignorant qu'il y eût autre chose à faire. Enfuite cette infortunée fille fe fentant beaucoup affoiblir, s'écria qu'elle fe mouroit, ce qui obligea le frere d'appeller M. Aubert, qui trouva l'accouchée baignée dans son sang. En l'examinant, il fentit le placenta attaché au fond de la matrice, le cordon pendant hors de la vulve sans ligature, par lequel il s'étoit déjà écoulé deux à trois pintes de fang. Ce Chirurgien ayant noué le cordon, la perte ceffa dans le moment; & l'accouchée étant délivrée, se trouva hors de danger. Ces ligatures étant faites, on remettra l'enfant entre les mains d'une personne entendue, qui l'enveloppera d'un linge chaud, & l'emmaillottera. Si avant de faire la premiere ligature, l'enfant donnoit des marques de foiblesse, on s'attacheroit à le fortifier, en mettant autour du cordon, & même fur la tête, la poitrine & le ventre, des linges trempés dans du vin chaud ou de l'eau-de-vie; on lui souffleroit même quelques gouttes de ces liqueurs dans la bouche & dans le nez. On confeille auffi de faire écraser de l'oignon près des narines de l'enfant pour lui en faire recevoir l'odeur. Lorsque par ces différens moyens fes forces commenceront à revenir, ce dont on s'appercevra par les battemens des arteres umbilicales, qui fe feront fentir tout le long du cordon, ou par de petits foupirs entre-mêlés de fanglots, & enfin par fes cris, on fe difpofera à faire la premiere ligature, & ensuite la feconde, pour couper le cordon entre les deux, comme je l'ai dit. Si l'on avoit fait la ligature du cordon, fans avoir fait attention à la foibleffe de l'enfant, joint à ce que je viens de dire que l'on lui feroit, on lui délieroit encore la ligature, & cette faignée par l'umbilic, d'environ douze gouttes de fang, le rappelleroit à la vie; c'eft avec cette reffource que j'ai eu le bonheur de la rendre plufieurs fois à des enfans tout-à-fait abandonnés. M. de la Motte, dans fon Traité des Accouchemens , rapporte trois observations, pour montrer ce qu'il y a à craindre de la ligature trop ferrée du cordon, comment on doit y remédier, & ce qu'il faut faire à celui qui a été arraché. Il dit que l'enfant d'un de fes amis ayant eu le cordon lié trop près du ventre, avec un fil très-délié & trop ferré, ce qui joint à la délicateffe du cordon, qui étoit trèsmenu, lui donna lieu de fe rompre tout près du ventre dès le lendemain de la ligature. Le fang qui s'écoula par la plaie, quoiqu'en petite quantité, mit l'alarme dans la maifon. Les Chirurgiens qui furent appellés, craignant les fuites de cette hémorragie, jugerent qu'il falloit pincer, avec un inftrument en forme de bec de corbin, un peu de la peau voisine, & tâcher de faifir l'extrémité des vaiffeaux rompus, persuadés qu'en ferrant tout ce qui auroit été pincé avec un fil ciré, ils viendroient à bout d'arrêter l'hémorragie. Ces Chirurgiens ne furent point trompés dans leur attente, l'hémorragie ceffa; mais les effets de cette ligature trop ferrée furent funeftes à l'enfant, qui mourut par les grandes douleurs qu'elle lui caufa, & par l'inflammation des parties voifines, qui s'étendit même jusques dans le ventre, qui lui fuccéda. M. de la Motte blâme ces Chirurgiens d'avoir employé d'abord un moyen fi violent; eu égard à la délicateffe de l'enfant, & au peu de fang qui couloit par là plaie; car c'étoit plutôt un fuintement qu'une hémorragie d'aucune conféquence, & ce fuintement eût été arrêté par l'application de quelque remede fimple, fans en venir à l'extrême qu'ils ont employé, comme il eft prouvé par l'Obfervation fuivante. M. de la Motte fut appellé au fecours d'une femme en travail à deux heures après minuit; quelque diligence qu'il pût faire, il n'arriva qu'après la fortie de l'enfant, qui étoit tombé fur le plancher, la femme ayant été surprise de la derniere douleur étant debout, dont l'arriere-faix étoit refté dans la matrice, & le cordon de l'umbilic rompu ou plutôt arraché jufques dans le ventre de l'enfant, de maniere qu'il n'étoit pas refté la moindre extrêmité d'aucun des vaiffeaux qui le compofoient, pas même aucun veftige, & d'où il ne fortoit aucune goutte de fang, le lien étant comme une excoriation un peu profonde qui fe feroit faite, ce qui détermina M. de la Motte à donner d'abord fes foins à la mere, qu'il fit coucher, après quoi il détacha l'arrierefaix qui étoit fort adhérent à la matrice, & le tira au dehors, le cordon qui étoit " très-foible & très-petit ne lui ayant été d'aucun fecours. Il appliqua enfuite fur la plaie du nombril un petit tampon de charpie feche, qui rempliffoit le lieu d'où le cordon avoit été arraché, & le foutint par une emplâtre de poix noire, une petite compreffe, un bandage contentif fait d'un linge plié en trois ou quatre doubles. L'emplâtre fe détacha quelques jours après d'elle-même, & la plaie du cordon fe trouva cicatrifée. La crainte que l'hémorragie ne furvînt, après que l'enfant feroit revenu de fa fyncope, obligea M. de la Motte de foutenir le petit appareil par un bandage. La troifieme Obfervation concerne une petite fille de trois jours, à laquelle le cordon de l'umbilic venoit de se détacher, & dont il avoit fuinté affez de fang pour imbiber une petite compreffe pliée en quatre, ce qui caufa, dit M. de la Motte, une alarme d'autant plus grande, que l'âge de la mere ne laiffoit guere espérer d'autres enfans; mais il rétablit bientôt le calme, en promettant une prompte guérison, qui fut fuivie de son effet. Il appliqua fur la plaie un plumaceau de charpie feche, qu'il couvrit d'une emplâtre de diapalme, & foutint le tout par un petit bandage, jufqu'à ce que l'endroit d'où le cordon s'étoit détaché trop tôt, fût cicatrifé, ce qui arriva fept à huit jours après. CHAPITRE XV. De la maniere de délivrer la Femme. LORSQU'AYANT fait mettre l'enfant dans un linge chaud, & que l'on s'eft afsuré en paffant la main fur le ventre de la mere, qu'il n'y en a pas un fecond ou un troifieme, on fe déterminera à délivrer la femme. On prendra le cordon, après l'avoir enveloppé d'un linge fec, pour qu'il ne gliffe pas, fi l'on n'aime mieux en faire plufieurs tours à sa main gauche, tandis que de la droite on le fuivra en alongeant le doigt indice deffus, jufqu'à l'entrée de la partie de la femme; on le balancera à droite & à gauche, en le tirant tout doucement à foi pour qu'il fe détache peu-à-peu. On recommandera à la femme de pouffer doucement en bas; on la fera fouffler dans fa main, & on lui frottera légérement le ventre à la région de la matrice; fi l'arriere-faix n'est pas trop adhérent, il fe détachera comme de luimême, par ces différens moyens. Si le placenta ne fe détachoit point alors, l'on s'y prendroit de la maniere que je le dirai dans le Chapitre 34, où je ferai mention de l'arriere - faix adhérent à la matrice. L'on obfervera de ne point mettre la femme debout, ni de la faire promener, comme il eft d'usage dans les Campagnes. On ne lui donnera pas non plus à boire de l'eau froide en quantité, espérant par ce moyen de faciliter le détachement du placenta, ce qui eft une pratique trèsdangereuse pour la femme. Après avoir examiné fi l'arriere-faix eft entier, on alongera les jambes de la femme, & on les rapprochera. On la garantira du froid, en la couvrant plus ou moins, fuivant la faifon; on la mettra dans cette attitude pour pour la laiffer repofer quelque temps, & l'on donnera tous fes foins à l'enfant. CHAPITRE XVI. De la maniere d'emmaillotter l'Enfant. ON doit, de toute néceffité, laver la tête de l'enfant avec du vin chaud, & un peu de beurre frais, pour ôter l'ordure qui s'y rencontre affez fouvent, & ne point le préfenter pour recevoir le Baptême dans un état dégoûtant. Si la maison étoit dénuée de tout, on le laveroit feulement avec de l'eau chaude. Pour le coeffer, on lui mettra une petite compreffe de linge ou d'étoffe attachée à fon béguin, afin de couvrir la fontaine. Cette précaution empêche que l'enfant ne s'enrhume. L'on nettoiera auffi le refte du corps de la craffe qui le couvre, avec du vin chaud & du beurre, au moyen d'une petite éponge fine ou d'un linge. On enveloppera le cordon avec un morceau de linge blanc & ufé, fur lequel on aura mis un peu de beurre fans F fel ou de l'huile ou du fuif; enfuite on prendra un autre morceau de linge double, de quatre travers de doigt de largeur, pour lui faire une bande, qui, étant paffée fous les reins, reviendra affujettir pardevant la petite compreffe qui renferme le cordon; un point d'aiguille en fait la façon, & eft préférable aux épingles. Cette bande est indifpenfable; on doit la ferrer légérement; elle fert à contenir le nombril, qui pourroit fortir par les cris de l'enfant, & lui caufer une hernie, incommodité que je vois tous les jours arriver, pour n'avoir pas eu cette attention. La maniere de mettre l'enfant dans fes langes, eft meilleure dans ce pays qu'ailleurs; la bande, qu'on ne doit pas trop serrer, finit aux genoux les jambes & les pieds font toujours à l'aife dans les bouts des langes, qui ne font arrêtés qu'avec une épingle. Cette méthode eft fi bonne, qu'il eft rare de voir ici des enfans qui foient bancroches. On ne doit faire tetter l'enfant qu'au bout de vingt-quatre heures : cet intervalle lui fert à dégorger fes phlegmes, & pendant ce temps-là on lui donnera un peu de vin chaud avec du fucre, ou du firop de chicorée compofé de rhubarbe. On peut encore donner aux enfans l'eau de miel, qui leur est très-bonne, elle est préférable au vin on en trouve aifément dans les Campagnes. On prendra une cuillerée de miel, que l'on fera bouillir dans deux verrées d'eau, parce qu'il faut que cette liqueur foit très-claire; on l'écumera, & on la paffera à travers un linge. Cette eau les purge très-doucement & fans colique. Si le firop & l'eau de miel n'avoient point opéré, l'on examineroit fi l'anus eft libre ; & s'il étoit fermé par une membrane ou autrement, on appelleroit un Chirurgien pour y remédier. On recommandera enfin, que l'enfant foit toujours couché fur le côté, pour qu'il puiffe rendre plus, aifément les phlegmes qu'il doit rejetter; car fouvent il en eft fuffoqué, pour n'avoir pas eu cette pré caution. De la maniere d'accommoder l'Accouchée, & du régime qu'elle doit obferver. LE E temps qu'on a employé pour accommoder l'enfant, eft fuffifant pour que la mere fe foit repofée. L'ayant placée fur le pied du lit, comme je l'ai dit, on peut, en la tirant en haut, la coucher fans lui faire faire de mouvement, & fans la fatiguer. On évitera, par ce moyen, de la mettre debout. On prendra une serviette pliée en trois, ou quelque linge qui puiffe faire l'effet d'une bande; on la paffera fous les reins, & on l'arrêtera en devant avec des épingles. Cette bande ou ferviette ne doit pas être mife indifféremment; comme on doit commencer à la ferrer au-deffus des os pubis, avant de mettre la premiere épingle, que l'on ferrera plus que les autres, il faut, avec la main, remonter tout doucement la matrice, pour qu'elle ne foit pas comprimée. On ne doit pas ferrer cette bande ou cette ferviette, les premiers jours; ce qu'on obferve quelquefois fi peu, qu'on croit faire du bien à l'accouchée en la ferrant extraordinairement, ce qu'il eft important d'éviter; car en la ferrant ainsi, on pourroit exciter non-feulement de vives douleurs, mais même une inflammation au bas-ventre. Les premiers jours étant paffés, on aura foin de refferrer un peu la bande chaque jour. On couvrira le fein de l'accouchée avec une serviette fine & un peu ufée, que l'on aura fait chauffer auparavant; l'on aura foin que la tête foit plus couverte qu'à l'ordinaire. Je n'entre point dans le détail de tous les linges néceffaires dans les couches. Comme on ne les trouve que chez les perfonnes aifées, & que les Gardes en favent l'ufage, je me difpenferai d'en parler. A l'égard du régime que doit obferver la nouvelle accouchée, il eft prefque impoffible d'en prescrire un à ces pauvres malheureuses. Peu s'en fallut que je ne caufaffe la mort à une que j'avois accouchée, croyant que, pour rétablir fes forces, le bon bouillon feroit ce que je pourrois lui faire prendre de meilleur; mais je la jettai dans un très-mauvais état par ce changement de nourriture; il lui furvint un dévoiement qui l'auroit réduite à la mort, fi je ne lui avois donné un remede, qui fut cependant moins efficace que fa nourriture ordinaire, à laquelle je fus obligée de la remettre. D'ailleurs, prefque toutes les femmes de Campagne nourriffent leurs enfans; cette évacuation de leur lait les garantit des fuites fâcheufes des couches, pourvu qu'elles aient été ménagées dans leur accouchement. On doit prendre garde fi elles perdent affez, fi elles urinent fouvent & fans douleur, fi le ventre n'est point tendu, fi elles vont aifément à la felle; & fi elles étoient quelques jours fans y aller, on leur donneroit un lavement fait d'une décoction d'herbes émollientes, ou feulement avec de l'eau, où l'on joindroit un peu de beurre, ou de la graisse du pot. 87 Quoique ce Livre ne foit deftiné que pour les Accoucheufes de Campagne, cependant comme elles peuvent être appellées auprès de quelques Dames d'une complexion délicate, & qui ne font point accoutumées à nourrir leurs enfans, j'entrerai dans un détail plus circonftancié fur les foins que l'on doit fe donner auprès d'une accouchée, Les femmes délicates fe conduisent d'une maniere différente que les femmes de la Campagne. Lorsqu'elles font dans leur lit, on doit leur donner un bouillon; & fuppofé que la Garde ne foit pas bien entendue, on lui recommandera d'en donner un de trois en trois heures; ce ne fera cependant qu'après avoir fu de l'accouchée fi elle est d'un grand appétit : en ce cas, les fimples bouillons ne fuffiroient pas, on y joindroit quelques petites soupes de pain blanc, coupées très-mince, & en petite quantité, qu'on laifferoit tremper dans le bouillon, fans les faire mitonner, ce qui les rendroit de difficile digeftion. L'on aura foin que dans le bouillon il n'entre point de veau, étant contraire à certains tempéramens, & pouvant d'ailleurs exciter le dévoiement. On donnera pour boiffon ordinaire la tifanne de chiendent, que l'on fortifiera avec un peu de bon vin, fuppofé que la femme foit accoutumée à en boire; mais fi elle n'en buvoit pas, au lieu de vin on y ajouteroit un peu de firop de capillaire, obfervant toujours que la boiffon foit donnée tiede. On ne doit pas exciter la fueur par un air trop chaud dans la chambre, ou par trop de couvertures. La précaution qu'on aura de faire obferver à l'accouchée beaucoup de ménagement dans fes alimens, eft trèsfalutaire; la fievre de lait n'en fera pas fi violente & durera moins. Quand la fievre est ceffée, on peut laiffer à la femme la liberté de manger, mais avec modération, pendant quelques jours, c'est-à-dire, que le cinquieme ou le fixieme jour elle peut manger un peu de volaille le matin, & elle doit s'en abftenir le foir, jufqu'à ce qu'elle commence fe lever & à faire un peu d'exercice.. 1 Il eft effentiel de s'inftruire fi les lochies ou vuidanges coulent fuffifamment; on doit demander à la Garde à voir les chauf foirs, ce que l'on ne peut chez la plupart des femmes de la Campagne, qui n'en font point ufage. On observera fi la perte eft considérable, afin de ne rien laiffer à appréhender pour les fuites, foit qu'elle fût trop grande, ou que la femme ne perdît point affez. Le premier jour, le fang doit être d'un beau rouge, & couler affez abondamment; le fecond, il doit fluer avec moins d'abondance, & le troisieme il perd de fa couleur, fe trouvant plus pâle. Il arrive même quelquefois que l'accouchée ne perd presque pas, parce que le lait montant au sein, suspend la perte ; ce dont il ne faut pas s'inquiéter, pourvuque cette fuppreffion ne foit accompagnée d'aucun accident fâcheux, comme de la difficulté de refpirer, de la fievre & de la tenfion du ventre; car alors il faudroit demander du confeil, y ayant à craindre pour la malade. Cependant en y remédiant de bonne heure, on préviendra les accidens que le lait peut occafionner; & pour cela on fera user les premiers jours d'une infufion d'armoife, fi les vuidanges ou lochies ne couloient pas suffisamment: & pour empêcher que le lait ne se porte au sein avec trop de violence, & n'y féjourne trop long-temps, on lui donnera un bouillon de cerfeuil, dans lequel on fera diffoudre un gros d'arcanum duplicatum, ou de fel de Glauber. Ces fels font très-bons pour empêcher que le lait ne fe grumele dans le fein que l'on aura foin de tenir couvert & chaudement, ou ne s'épanche fur quelque partie du corps. On mettra fur le fein de l'onguent populeum, ou de l'huile d'olive avec de l'étoupe de lin; le miel eft encore fort bon. On préférera ces remedes à tous les autres, parce qu'ils font très-doux. CHAPITRE XVIII. Des tranchées qui arrivent aux Accouchées, des hémorroïdes, & de la néceffité de baffiner la partie. ON emploie divers remedes pour foulager la femme dans les violentes douleurs de colique qu'elle reffent les premiers jours de fa couche. Je puis dire avoir mis en ufage tous ceux qu'on m'a affuré être bons, fans en avoir trouvé aucun d'efficace. Le seul que je conseillerois, c'est l'usage des lavemens faits avec la décoction des herbes émollientes, & d'appliquer ces herbes fur le ventre: on aura foin d'en entretenir la chaleur au moyen des linges qu'on fera chauffer de temps en temps. Voilà ce que j'ai trouvé de meilleur pour calmer ces douleurs. On a coutume de faire avaler de l'huile d'amandes douces, & même en quantité: fi néanmoins elle provoquoit le vomiffement, on en donneroit peu; car les vomiffemens feroient plus dangereux que les tranchées, dont on n'a point à craindre les fuites, lorfqu'elles ne font que momentanées, & que la femme fent qu'elle perd à chaque douleur. Il eft des femmes qui, après être accouchées, fouffrent des douleurs d'hémorroïdes : on leur fera prendre une tifanne faite avec la graine de lin; on appliquera fur la partie un linge couvert d'onguent popu leum. Il y a quantité de remedes dont je ne parlerai point, chaque perfonne ayant le fien pour ces fortes de maladies. Je fais qu'il eft difficile d'engager les femmes de la Campagne, & même quelques-unes des Villes, à fe baffiner dans leurs couches; il faut pourtant les y déterminer en leur remontrant la néceffité de le faire. On peut leur en parler fans bleffer la modeftie: elles fouffrent souvent fans ofer se plaindre, fur-tout aux premiers accouchemens, où la partie eft prefque toujours un peu déchirée, ce qui forme une petite plaie, qui peut s'augmenter par l'âcreté du fang & des lochies. On leur fera faire d'abord des lotions avec du lait & du cerfeuil, ou de l'eau de guimauve. S'il furvient des démangeaifons, on fera ces lotions avec un mêlange d'eau & de vinaigre, & enfuite avec du vin fuffifamment chaud. CHAPITRE XIX. Du dévoiement qui furvient à la Femme les premiers jours des couches. LE dévoiement, dans les premiers jours des couches, devient quelquefois dangereux, fi on le néglige, ou qu'on l'arrête tout-à-coup; c'est à quoi il faut bien prendre garde. L'on ne doit point employer indifféremment tous les remedes enfeignés par des bonnes femmes ou par des gardes t mal inftruites. Le dévoiement eft fouvent occafionné pour avoir fait prendre trop d'aliment à la femme durant fon travail, ou pour lui avoir donné des remedes trop violens, dans la vue d'exciter fes douleurs, ou enfin parce que l'on ne s'eft point informé, avant que la femme accouchât, s'il y avoit du temps qu'elle eût été à la felle. Les excrémens retenus trop long-temps occafionnent très-fouvent le dévoiement. On fera prendre à la femme des lavemens compofés de lait, auxquels on joindra le jaune d'un œuf frais & un peu de fucre. Ces remedes font très-adouciffans. Après avoir ufé quelques jours de ces lavemens, l'on pourra en faire avec la décoction de la plante appellée queue de cheval ou prêle, ou avec celle de l'écorce de grenade, en délayant dans chaque lavement un jaune d'œuf. On en donnera deux petits par jour, & l'on aura foin de faire prendre de bon bouillon à l'accouchée, pour qu'elle ne foit point trop affoiblie; mais fi la fievre furvient, & que les évacuations commencent à se supprimer, l'on ne fauroit trop tôt appeller un Médecin ou un habile Chirurgien. A B Peint par P. Chapparre. Autre vice de conformation produit par le reßèrement des bran ches des os Pubis AA, ce qui rend l'arcade que forme ordinairement les os, si étroite qu'elle ne permet pas a la tête de l'enfant de sortir, laquelle est en outre preẞée de chaque côté par les épines des os Ischion BB, etc'est ce qu'on nomme communément une femme barrée. Gravé en Couleurs par J.Robert. CHAPITRE X X. De l'accouchement laborieux à cause du passage paffage trop étroit, & des vices de conformation. LORSQUE l'enfant a la tête trop grosse à proportion de la largeur du petit bassin, l'accouchement devient laborieux pour la mere & pour l'enfant; foit que cette lar- geur foit diminuée par l'approche des os ifchion, foit par celle de l'os facrum, vers les os pubis, laquelle s'eft trouvée quel- quefois fi confidérable, qu'au lieu de laiffer entre eux un espace d'environ quatre pouces & quelques lignes, qui eft le plus ordi- naire, la distance de l'un à l'autre n'a été qu'environ de deux pouces & quelques lignes. Un 'pareil cas arriva à Paris il y a quelques années, à la nommée Duverger: il en eft fait mention dans un Livre d'Ana- tomie, compofé par un Chirurgien de cette Ville. On y dit que cette femme devenue enceinte, fit venir fur la fin de fon terme M. Soumain, célebre Accoucheur, qui ayant reconnu, en la touchant, la conformation extraordinaire du baffin, appella plufieurs de fes Confreres des plus renommés, qui, ayant auffi reconnu cette difpofition contre nature, jugerent qu'il n'étoit pas poffible d'accoucher la femme par la voie ordinaire, & convinrent de la néceffité de l'opération céfarienne, c'est-à-dire, de faire une incifion tant aux parties contenantes du ventre, qu'à la matrice, & d'ouvrir la poche ou fac formé par les membranes chorion & amnios, pour en retirer le fœtus. L'enfant qui vint au monde par cette opération, avoit le volume d'un enfant à terme : il vécut plufieurs jours & la mere jouit aujourd'hui d'une parfaite fanté. Mais fi l'accouchement n'étoit laborieux que par la difpofition particuliere du coccyx qui fe porteroit trop en devant, & que ce fût dans une femme d'un certain âge, qui accouchât pour la premiere fois; les cartilages & les ligamens qui permettent à ces os de se porter en arriere, lorfqu'il 1 lorfqu'il eft comprimé par la tête de l'enfant, ne prêtant alors que difficilement ; auffi remarque-t-on que ces femmes souffrent plus long-temps que les jeunes: pour faciliter leur accouchement, on infinuera la main toute entiere dans la partie, on la paffera fous la tête de l'enfant, en appuyant un peu sur le coccyx, pour le forcer à fe porter en arriere, à mesure que l'enfant s'avancera, ce qui facilitera beaucoup fa fortie. Lorsque l'enfant refte trop long-temps au paffage, on doit lui affurer la vie fpirituelle par le Baptême, ce qui fe fait toujours fous condition, en lui versant de l'eau fur la tête, ou en la lui faifant parvenir par une canule de feringue, & prononçant ces paroles: Enfant, fi tu es vivant, je te baptife au nom du Pere, du Fils & du Saint-Esprit & lorfqu'il fera porté à l'Églife, on avertira le Prêtre que l'enfant a été ondoyé. Dans tous les accouchemens contre nature, auffi-tôt que l'on peut faire avancer un pied dans le paffage, on doit donner G à l'enfant le Baptême, avant que d'aller chercher l'autre pied; le temps que l'on mettroit pour le faire venir, pourroit priver l'enfant du bonheur éternel. C'est un des grands reproches que l'on puiffe fe faire, fi l'on y manquoit. La même chofe doit être obfervée, lorfqu'au lieu d'un pied ou de la tête, l'enfant préfente quelqu'autre partie. CHAPITRE De l'Accouchement où l'Enfant eft arrêté au paffage par des épaules trop larges. IL arrive quelquefois que les épaules de l'enfant font trop larges, à proportion du volume de la tête. On ne s'attend point à trouver d'obstacle à fa fortie, lorfque la tête eft hors de la partie; le fecours d'une main habile eft néanmoins très-néceffaire pour conferver la vie à l'enfant; car fouvent il meurt par la faute de celle qui pratique cet Art, ce que j'ai vu arriver plus d'une fois. On se donnera bien de garde de tirer de X X I. toutes les forces, l'enfant étant foible, la tête pourroit se séparer. Lorsque la tête fera fortie, fi le tronc ne fuit pas, on cédera dans l'inftant, & on paffera la main gauche fous le menton, pour foutenir la tête, afin d'empêcher que le nez foit porté vers le fondement de la mere, & que par cette attitude l'enfant ne foit fuffoqué. En lui tenant la tête en droite ligne, on infinuera le doigt indice de la main droite fur la poitrine, pour le gliffer fous l'aiffelle; on recourbera ce doigt en forme de crochet, on dégagera l'épaule, que l'on fera fortir de la partie, & par l'effort que la femme fera obligée de faire, on aura l'enfant en vie, fans lui avoir fait aucun mal; mais fuppofé qu'il ne cédât pas à cette façon de s'y prendre, à raifon de la largeur extraordinaire des épaules, on fera foutenir la tête par quelqu'une des affiftantes, ou par la garde, précaution absolument néceffaire, & on dégagera les deux épaules, l'une après l'autre, ou toutes les deux en même temps, en infinuant un doigt de chaque main fous les aiffelles; & lorsqu'elles seront un peu avancées, on aura l'enfant dans l'inftant. On introduira les doigts du côté du fondement de la mere, parce que le vagin étant une partie charnue & membraneuse, prête facilement; ce qui n'arriveroit pas fi l'on paffoit les doigts au-deffus, les os ischion ne prêtant point, il feroit impoffible d'en venir à bout. Par cette méthode, on conservera la vie à plufieurs enfans, qui périffent par l'ignorance de certains Chirurgiens de Village, ou de femmes fans expérience, qui n'ont d'autre reffource que celle de féparer la tête, ou de fe fervir de crochets, ou d'une cuiller à pot, pour faire fortir par morceaux le refte du corps. 1 CHAPITRE XXI I. De la difficulté d'accoucher, lorfque l'orifice de la matrice fe refferre tout-à-coup, après avoir laiffe paffer la tête. IL eft encore un obstacle à la sortie de l'enfant, quoique la tête foit à moitié hors Quatrième dégré de Dilatation de la Matrice, lequel a permis à la tête de sortir, mais qui s'étant contractée sur le champ serre le col de l'Enfant. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleur par J. Robert. de la partie; favoir, lorsque l'orifice de la matrice se refferrant tout-à-coup, les épaules ne peuvent suivre à cause de cet étranglement, qui feroit capable de caufer la mort à l'enfant, fi l'on n'y apportoit du secours sur le champ. Il faut alors se donner bien de garde de tirer l'enfant à foi; car l'on entraîneroit en même temps la matrice, ce qui feroit perdre la vie à la mere. Après avoir tenté, comme je l'ai dit, de tirer l'enfant avec ménagement, fi l'on. fent de la résistance, on infinuera un doigt pour en découvrir la caufe; on reconnoîtra par ce moyen que la difficulté vient de l'orifice, en le fentant tout autour du col de l'enfant, à qui il forme une efpece de collier on le dilatera facilement, en infinuant un doigt de chaque main, que l'on paffera entre l'enfant & l'orifice; on tournera ce doigt tout autour pour en procurer la dilatation, & il faudra aller chercher les épaules: on empêchera la femme de pouffer en bas, crainte que la matrice ne fe refferre de plus en plus. Si la matrice étoit restée à fec par l'écoulement des eaux, on se graifferoit les mains avec du beurre fans fel ou de l'huile, ce qui rendroit l'orifice plus fouple, en obfervant toujours de faire foutenir la tête de l'enfant, crainte qu'il ne foit fuffoqué. CHAPITRE XXIII. De l'Accouchement où la matrice précede la fortie de l'Enfant. IL arrive quelquefois que la matrice defcend confidérablement dans le vagin & au point que l'orifice fe trouve au bord de la partie, fans pour cela que l'enfant foiten core defcendu. Cet accident eft plus commun dans les Campagnes que par-tout ailleurs, les femmes y étant plus fujettes au relâchement de matrice, par la faute de celles qui les accouchent, foit en les faisant tenir debout, foit en leur recommandant de pouffer en bas dès l'inftant de leurs premieres douleurs, fouvent même fans qu'il y ait apparence d'accouchement. Lorsqu'on s'appercevra que la matrice s'avance au-devant de la tête de l'enfant, on fe gardera bien de faire poufser la femme: on la fera coucher de façon qu'elle ait la tête plus baffe que dans l'accouchement ordinaire. On infinuera la main toute entiere dans la partie; car un feul, & même deux doigts, ne suffiroient pas. On repouffera tout doucement la matrice, en écartant les doigts, on la foutiendra, & l'on attendra que la tête se faffe sentir sans retirer la main, attitude qu'il faut néceffairement garder, jufqu'à ce que l'enfant foit prêt à venir: on repouffera alors avec le bout des doigts l'orifice, à mefure que la tête s'avancera, & que la femme fera valoir ses douleurs. Après avoir délivré la femme avec beaucoup de précaution, c'est-à-dire, en ne la faifant point pousser, & ne tirant point trop fort le cordon, crainte que le fond de la matrice ne foit entraîné par l'arriere-faix; l'on remettra, après la fortie de l'enfant, la main dans la matrice, en la repouffant dans fon fond; l'on attendra qu'elle commence à fe refferrer, & alors on retirera tout doucement la main. On fera observer à la femme d'être couchée la tête plus baffe qu'à l'ordinaire. De l'Accouchement accompagné du relâchement du Vagin. IL eft encore une difficulté encoré une difficulté pour l'accouchement, elle a pour cause le relâchement du vagin; on diftingue ce relâchement de celui de la matrice, en touchant la femme; car celui du vagin ne laiffe point de vuide du côté du fondement : il est auffi plus lisse que la matrice, parce que s'étant dilaté, toutes les rugofités qu'on y sent dans l'état ordinaire, fe trouvent alors effacées. Il est de toute néceffité d'y remédier, avant que la femme accouche; car l'enfant ne pourroit fortir qu'avec beaucoup de peine, & fa fortie, jointe aux efforts de la mere, cauferoit un relâchement plus confidérable. Pour y remédier, on s'y prendra de la maniere fuivante. On 1 1 repouffera un peu l'enfant, en mettant d'abord le bout des doigts d'une main du côté du fondement, évitant de le toucher du bout des ongles, crainte de le bleffer, & continuant à pouffer doucement dans la partie, on y fera rentrer le vagin; on continuera d'avancer la main jufqu'à ce qu'elle fe trouve fous l'orifice : on laiffera la main dans cette position pour retenir le vagin, l'on attendra que l'enfant avance, & à mesure qu'il approchera, on reculera la main. Après avoir délivré la femme, on peut aifément faire rentrer le vagin, en mettant la main dans la partie, comme je viens de le dire. On recommandera à la femme de ne point faire des efforts pour aller à la felle, ce que l'on obtiendra par le moyen des lavemens, ainsi qu'on en ufe dans la chûte de la matrice. Îl eft néceffaire de confulter un Médecin ou un habile Chirurgien pour ces maladies, & on leur fera un rapport exact de tout ce que l'on aura obfervé. Je fus un jour appellée pour un pareil accident, il n'étoit plus temps de prendre cette fage précaution, le relâchement étoit confidérable, ressemblant à du boudin replié fur lui-même. Je ne pris d'autre parti que de le foutenir avec mes deux mains, en joignant les deux pouces près l'un de l'autre du côté du méat urinaire, en écartant les mains, les deux indices fe rejoignirent par en bas; je le foutins tout entier par cette maniere, fans y mettre les ongles; je fis dégager la tête de l'enfant, & je foutins de toutes mes forces le vagin, pour m'opposer aux mouvemens convulfifs, pendant que je la faifois délivrer; la femme ne fe reffentit point après de cet accident; c'étoit pour la feconde fois qu'il lui étoit arrivé, & dans le premier elle avoit refté trois heures évanouie. 1 CHAPITRE XX V. Des différentes obliquités de la Matrice. J'AI traité dans les Chapitres précédens des obftacles qui peuvent rendre les ac-. couchemens funeftes à la mere & à l'enfant, quoiqu'il le préfente bien, c'est-àdire, par le fommet de la tête, que la matrice foit bien placée, que fon orifice se trouve vis-à-vis de l'entrée du vagin, & de la partie de la femme, & qu'en la touchant on fe fente directement au milieu. Il est encore des difficultés qui ont pour caufe les différentes obliquités de la matrice, & qui rendroient la fortie de l'enfant impoffible, fi l'on n'y apportoit du fecours. Les relâchemens de la matrice prouvent affez que les ligamens qui l'affujettiffent, ont de la facilité à s'étendre. J'ai fouvent trouvé que les ligamens d'un côté, ayant plus prêté que les autres, avoient donné lieu à la matrice de fe porter vers le côté oppofé, ce que j'ai reconnu par le toucher; car au lieu de rencontrer l'orifice de la matrice au milieu, je le trouvois de côté, & paffant la main fur le ventre, je fentois aisément que la matrice étoit penchée. Je remarquois en même temps que lorfque le corps de la matrice étoit incliné du côté droit, fon orifice étoit tourné vers le côté gauche du baffin: or, la tête de l'enfant appuyant alors fur l'os innonimé, elle y trouve une forte résistance, & il faut de néceffité que l'enfant & la mere périffent, malgré toutes fes douleurs & les efforts qu'elle pourroit faire, fi l'on n'y apporte du fecours. Il en fera de même, fi l'enfant fe porte du côté gauche; car alors l'orifice fera tourné du côté droit. Quelque fâcheufes que foient ces différentes fituations, & quelques difficultés qu'elles préfentent, on les furmontera aifément, en s'y prenant comme je vais le dire. Si l'orifice de la matrice eft tourné du côté gauche, il faudra faire coucher la femme du même côté; car le poids de l'enfant qui fe trouve du côté droit, le Cette figure représente l'obliquité de la Matrice en devant son orifice paroisant un peu audefus des os Pubis. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J.Robert. P.109. Pl.XIV. M Dans cette figure la situation oblique de la Matrice est directe ment oposée à la précédente, son fond étant couché sur la face interne de l'os des Isles droit, et son orifice appuyé sur la partic gauche du bassin. Peint par P. Chapparre, Gravé en Couleurs par J.Robert. Cette figure réprésente le bassin vuen face et un peu penché en avant avec l'obliquité latéralle de la Matrice, dont l'orifice est appuyé sur la partie droite du bassin, Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J.Robert. fera avancer dans le milieu; & tandis que la femme reftera dans cette attitude, l'on infinuera deux ou trois doigts de la main droite dans le vagin, on les paffera entre l'orifice de la matrice & l'enfant, & avec la main gauche on pouffera tout doucement le ventre pour le faire encore pencher. On ne doit point faire ces fortes de réductions avec violence, il faut au contraire s'y prendre à plufieurs fois. On recommandera à la femme de ne pas pouffer, jufqu'à ce que l'orifice foit remis en fa place; car les efforts qu'elle feroit alors augmenteroient la difficulté, en preffant davantage la tête fur l'os innominé. Il eft encore deux fortes d'obliquités de la matrice; la premiere eft lorsque l'orifice vient s'appuyer fur l'os pubis. Il eft impoffible, dans une pareille fituation, que l'enfant forte fans le fecours de l'Art. Il faudra donc faire mettre la femme à genoux fur le lit, & qu'elle s'appuie fur les coudes le plus qu'elle pourra. Cette attitude fera tomber l'enfant en devant, & donnera plus de facilité d'amener l'orifice en fon lieu naturel: on fe fervira des doigts pour le reculer doucement du côté de l'os facrum, & l'on empêchera la femme de faire des efforts pour pouffer; c'est à quoi on doit bien prendre garde dans ces fortes d'accouchemens. La feconde & derniere obliquité de la matrice, c'eft lorsque fon fond fe porte en devant, tandis que fon orifice eft jetté en arriere du côté de l'os facrum. Cette situation de la matrice approche plus de la naturelle que les autres, parce que le ventre faillit fur le devant lorsque la femme eft debout, & l'on eft fouvent obligé de foulever un peu la tête de l'enfant pour paffer le doigt, afin de connoître fi elle eft en travail : il arrive quelquefois qu'en pareil cas, on ne touche que le bord de l'orifice, fans pouvoir fentir les différens degrés de fa dilatation : lorsqu'on trouve cette difficulté, il faut faire mettre la femme fur le lit, & qu'elle foit un peu renversée pour lors le fond de la matrice tombe fur le dos, & donne la facilité de fentir l'orifice. Si l'orifice ne pofoit pas fur : P.m. PL.XVI. Cette figure étant l'opposée de la précédente, elle fait voir la partie postérieure du baẞin avec l'obliquité de la Matrice postérieurement son orifice paroiẞant un peu audessus de l'os Sacrum. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J. Robert. 1 l'os facrum confidérablement, comme il se trouve dans les femmes à qui le ventre ne tombe pas tout-à-fait fur les cuiffes, en la laiffant couchée & un peu renversée, fes douleurs réduiront aifément la matrice; c'est ce que je vois arriver tous les jours: il n'eft pas néceffaire, en ce cas, de fatiguer la femme; car elle accouchera naturellement, fur-tout en lui faifant observer d'être couchée comme je viens de le dire. A l'égard des femmes dont le ventre eft trop pendant, il eft impoffible que l'accouchement fe faffe de lui-même, il faudra que la femme & l'enfant périffent faute de fecours; l'orifice venant à peser fur l'os facrum, l'enfant y fera pouffé fortement les efforts de la mere, & ne par pourra jamais fortir. Si, en touchant la femme, le doigt ne peut atteindre l'orifice, on la fera coucher, & on infinuera dans le vagin toute la main, après l'avoir graissée; on foulevera un peu la tête de l'enfant qu'on fent dans la matrice, on fera encore pencher la femme en arriere le plus qu'on pourra, & on pouffera tout doucement le ventre en haut avec la main gauche, & des deux doigts de la main droite qu'on aura introduits dans l'orifice, on la tirera doucement en devant, obfervant toujours que la femme ne doit pouffer que quand l'orifice fera réduit, & que la tête de l'enfant s'avancera. Ces réductions doivent fe faire avec bien du ménagement, & il faut y employer tout le temps néceffaire pour ne point violenter la matrice. Dans les accouchemens où l'enfant fe présente mal, si la matrice eft oblique, il faudra de toute néceffité la remettre dans fon lieu naturel, avant que de vouloir retourner l'enfant ; car autrement il ne feroit pas possible d'en venir à bout. L'on pourroit empêcher les femmes d'être expofées à ces fortes d'inclinaisons de la matrice, en leur confeillant, lorfqu'elles fe plaignent de porter leurs enfans plus d'un côté que de l'autre, en leur confeillant, dis-je, de fe coucher du côté oppofé. A l'égard de celles dont le ventre tombe fur les cuiffes en forme de beface, il faudra leur faire mettre de bonne heure, autour Cette Planche fait voir une main qui tire la jambe droite de l'enfant tandis que l'autre fléchit et se trouve accrochée sur les os des Isles gauches, on doit sentir qu'une semblable manoeuvre ne peut manquer de luxer la cuisse si on fait trop d'effort et qu'il eut bien été plus prudent d'aller cher cher l'autre pied avant d'avoir la témérité de tirer sur celui qui se pré sente seul. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J.Robert. autour du corps, une serviette en forme de bande, qui ne foit point trop ferrée; par cette précaution l'on empêchera que l'enfant ne croiffe dans cette mauvaise fituation. CHAPITRE XXV I. De l'Accouchement où l'Enfant préfente pied, ou tous les deux enfemble. L'ACCOUCHEMENT où l'enfant présente un pied, ou tous les deux enfemble, eft le plus aifé de tous ceux où l'enfant vient mal, puifque quelque partie qu'il préfente à l'orifice, fi l'on en excepte le fommet de la tête, l'on eft dans la néceffité de le faire venir par les pieds, étant la feule reffource que l'Art fourniffe pour faciliter fa fortie. On peut diftinguer facilement les pieds, même avant que les membranes foient rompues. Dans cette pofition, la partie alongée qu'il préfente, fait prendre aux membranes la même forme, & lorsque la H. douleur eft paffée, on fent un pied, ou tous les deux, que l'on reconnoît aux talons, aux chevilles & aux orteils. On ne fauroit prendre les mains pour les pieds, leur forme fe trouvant très-différente. Il ne faut pas attendre que l'enfant s'engage trop avant dans le paffage, ce qui rendroit l'accouchement dangereux pour deux rai fons. La premiere eft que fi la face étoit tournée du côté du nombril de la mere, ce qui arriveroit fi l'enfant avoit le ventre en-deffus, la mâchoire s'accrocheroit aux os pubis, & tous les efforts que l'on feroit pour le tirer, ne ferviroient qu'à lui féparér la tête d'avec le tronc. La feconde difficulté qui furviendroit, c'est que si l'enfant ne préfentoit qu'un pied, comme cela arrive fouvent, en tirant ce pied fortement, l'autre étant plié derriere fon dos, & le genou venant à s'appuyer fur l'eftomac, ce pied pourroit poser fur l'os pubis, & l'effort que l'on feroit pour le tirer ne ferviroir qu'à le preffer plus fortement fur cet os, ce qui rendroit P.15. Cette figure represente l'enfant sorti mais dont la tête est encore engagée sous l'arcade des os Pubis et pour la débaraßer on réprésente les doigts d'une main gauche appuyés sur l'os Occipital et en deẞous une main droite dont le doigt indice va chercher la bouche de l'enfant dans laquelle il s'intro duit et tirant avec ce doigt la machoire inférieure en bas et l'autre main ap puyant en même temps sur l'occiput, la tête se fléchit néceẞairement et par ce mouvement elle sort avec facilité. Peint par P. Chapparre. P.15. Peint par P. Chapparre. rer Cette Planche réprésente encore une ne fauße manoeuvre en préférant de til'enfant la face en devant plutôt que de lui avoir tourné par par derri ère, ce qui donne lieu au menton de l'enfant de s'accrocher sur les os Pubis et en continuant de le tirer dans cette position la tête se renversant. en arrière la machoire peut se luxer, d'ailleurs l'occiput par ce renversement appuyant sur l'os Sacrum, il est impossible de faire passer la tête dans le détroit du petit basin, il faut donc en repoussant l'enfant un peu en haut lui retourner la face en arrière. Gravé en Couleurs par J.Robert. la fortie de l'enfant très-difficile, & peutêtre même impoffible. Lorfqu'on aura reconnu qu'un des pieds fe préfente, que la dilatation de l'orifice eft fuffifante, & qu'il fe trouve éminci, on rompra les membranes, fi elles ne l'étoient pas; l'on attendra pour cela une forte douleur, la tenfion qui leur arrive alors les disposant à être percées plus aisément. Les membranes étant percées, on prendra un pied ou tous les deux, que l'on tirera également, on les amenera hors de la partie: on prendra un linge fec & doux, dont on les enveloppera, pour qu'ils ne gliffent pas des mains. Lorsqu'on aura passé les genoux, fi l'enfant vient la face endeffus, on le retournera à mesure qu'on le tirera, pour que le nez fe trouve en-deffous du côté du fondement de la mere. Cette précaution est absolument néceffaire pour empêcher que la mâchoire ne s'accroche aux os pubis. On abaiffera les bras l'un après l'autre, & fi la tête ne fort pas dans l'inftant, loin de la tirer avec violence, ce dont il faut bien se garder, car on pourroit la féparer du tronc, on s'arrêtera, & on fera foutenir l'enfant par quelqu'un, pour empêcher qu'il ne foit fuffoqué, & saififfant la mâchoire inférieure, on glissera le doigt indice de la main gauche dans la bouche, pendant qu'on infinuera la main droite fur le derriere de la tête, pour la faire baiffer du côté du fondement de la mere; on la tirera à foi, tandis qu'une autre perfonne tirera l'enfant par les épaules. Plufieurs Auteurs veulent qu'ayant abaiffé un bras on laiffe l'autre, pour que la tête foit conduite plus directement; mais je pense que lorsque la tête est un peu groffe, on risqueroit alors de rendre la fortie de l'enfant plus difficile; la longueur du temps que l'on mettroit à l'avoir, deviendroit préjudiciable pour le bras, qui, en fe gonflant, formeroit une autre difficulté. Si l'enfant ne préfentoit qu'un pied, lorfqu'on l'auroit un peu avancé dans la partie, on l'affujettiroit par un ruban, auquel on feroit un noeud coulant, fans venir l'autre. trop le ferrer, & en fuivant le genou, on conduiroit la main fur la cuiffe pour la paffer fur la partie de l'enfant, ou fur le derriere, fuivant fa pofition, & l'on fuivroit l'autre cuiffe & la jambe : pour lors on prendroit ce pied que l'on ameneroit au paffage. Quelquefois on eft obligé de repouffer le premier, fur-tout s'il étoit trop avancé, & en le faifant rentrer un peu, on se faciliteroit le moyen de faire Il eft effentiel de s'affurer que le pied l'on tâche d'avoir, eft celui qui apparque tient au même enfant; car il arrive quelquefois que la matrice contient deux enfans & même trois. On conçoit bien qu'en tirant indifféremment le premier pied que l'on trouveroit, on pourroit en tirer un d'un autre enfant, & les corps s'embarraffant l'un & l'autre, il en arriveroit la mort, tant des enfans que de la mere, étant de toute impoffibilité qu'ils vinffent enfemble. Cet inconvénient de tirer le pied d'un second ou d'un troisieme enfant, ne peut 1 néanmoins avoir lieu que lorfque les membranes qui renferment chaque fœtus en particulier, ont été déchirées, ou qu'enfin deux foetus font unis l'un à l'autre par la poitrine, ou autre partie du corps; car on fait qu'alors ils font renfermés dans une même enveloppe : mais ce dernier cas eft fort rare. CHAPITRE XXVII. De l'Accouchement où l'Enfant présente les genoux, ou le fondement. IL est aisé de diftinguer si l'enfant pré- fente les deux genoux, ou un feul, fur-tout lorfque les membranes font rompues; car l'on fent l'os qui eft en devant, nommé la rotule : fa rondeur & fa fermeté n'empê- chent pas qu'il ne differe beaucoup de la tête, puisqu'en touchant on fent un vuide de chaque côté, & qu'en y paffant le doigt on trouve le pli que fait le genou, lorsque la jambe est fléchie. On ne le laiffera pas engager trop avant, & en fuivant la jambe l'on ira prendre un pied; lorsqu'on l'aura, on dégagera l'autre, comme je l'ai dit. Si l'enfant préfente le fondement, on peut le connoître à travers les membranes, lorfque la douleur eft paffée; car alors on fent un vuide au milieu, & une groffeur de chaque côté, mais fouple. S'il ne fe préfentoit que de côté, cette partie se diftinguera encore au toucher; car en paffant le doigt tout autour, on fent le pli que fait la cuiffe, & de l'autre côté le fondement on ne peut fe tromper fur la différence qu'il y a entre cette partie & la tête. Si la mauvaife fituation de l'enfant donne lieu à la compreffion du ventre, il ne manque pas alors de rendre le maconium renfermé dans le gros boyau : c'est une matiere noire qui reffemble à de la poix, & dont on trouve alors fon doigt couvert, fi l'on touche la femme dans ces momens. Lorsqu'on fera affuré que l'enfant préfente le fondement, on ne doit point le laiffer engager trop avant; car il feroit très-difficile d'aller chercher les pieds, il vaudroit mieux, fi l'on n'étoit point arrivé affez à temps, & qu'il fût trop engagé dans le paffage, le laiffer venir dans cette fituation; on rifqueroit moins pour lui & pour la mere: mais s'il ne préfentoit qu'un côté du derriere, cette pofition de travers deviendroit très - laborieufe, parce que l'autre côté de la hanche s'appuyant fortement fur l'os du baffin de la femme, il ne feroit pas poffible que l'enfant pût fortir. Lorsqu'il ne présentera qu'un côté du derriere, on le repouffera tout doucement pour le faire rentrer, & l'on paffera un doigt de l'autre main pour aller chercher le pli de l'aine: on avancera l'autre côté, afin que le fondement se trouve directement à l'orifice. Si on le laiffe venir dans cet état, on lui dégagera les jambes aussitôt que le derriere fera paffé. à Si l'on arrive auprès de la femme assez temps, & & que l'on ait reconnu que l'enfant préfente le fondement, on terminrea l'accouchement fans attendre qu'il s'engage. On infinuera la main bien graiffée, Pant par P Chapparre. Pl. XX. On réprésente par cette Planche l'enfant couché en travers dans le bas sin, la tête appuyée sur l'os des Isles droites et le derrière sur le gauche avec la position d'une main qui va chercher les pieds de l'enfant pour faire sortir. le Gravé en Couleurs par J. Robert. DES ACCOUCHEMENS. 121 & en fuivant la feffe, la cuiffe, le genou & la jambe, l'on ira prendre un pied que l'on amenera au paffage, & on ira chercher l'autre. De l'Accouchement où l'Enfant préfente le ventre, la poitrine ou le dos. en touchant la femme on reconnoît # SI que l'enfant fe préfente mal, on fe con- duira différemment, fuivant la partie qu'il offrira. Si c'est le ventre ou la poitrine, les membranes seront plus applaties, parce que l'enfant étant de travers, les retient des deux côtés, & ne leur laiffe pas la liberté de s'alonger: il arrive fouvent que dans cette pofition le cordon umbilical se présente le premier, & lorsque les mem- branes ne font point tendues, on fent les battemens de fes arteres à travers les membranes. La dilatation de l'orifice étant devenue fuffifante, on rompra les mem- branes, & on reconnoîtra la partie qui fe préfente. Si c'eft la poitrine, en gliffant la main deffus, on trouvera le ventre & l'umbilic : l'on fuivra avec la main jusqu'à la partie de l'enfant ; en trouvant une cuiffe on ira au genou, & l'on amenera les pieds au paffage. Lorfque l'enfant présente le dos, on ne peut s'y tromper, l'épine fe fait sentir, parce que le dos étant courbé, les vertebres fe diftinguent aifément les unes des autres, & en les fuivant jufqu'au fondement, l'on ira droit aux pieds, la méthode étant la même pour tous les accouchemens où l'enfant se présente mal. 七七北 ======= CHAPITRE XXIX. De l'Accouchement où l'Enfant préfente le bras ou le coude. LORSQUE l'enfant présente le bras, cette fituation lui eft fouvent funefte, parce que ceux qui ne font pas au fait des accouchemens ne connoiffent que le feul moyen de faire rentrer le bras, avant que d'aller P.123. Pl. XXI. un Cette figure fait voir comme dans la précédente enfant couché en travers dans le bain mais elles sont différentes en ce que la première indique une bonne manœuvre et que celle cy en démontre une mauvaise en tirant sur le bras droit de l'enfant qui se présente. Peint par P. Chapparre. Grave en Couleurs par J.Robert. 123 DES ACCOUCHEMENS. chercher les pieds, & à force de fatiguer ce bras, on le meurtrit fi confidérablement, que la matrice irritée le ferre au point de ne plus laiffer de ressource, que celle de le couper pour terminer l'accouchement : malheur qui n'est que trop commun dans les Campagnes. L'on distinguera aisément fi le bras se préfente; car, en ce cas, les membranes font alongées, & à travers l'on fent la main qui differe beaucoup de la forme du pied par fes doigts alongés & déliés. Si la dilatation de l'orifice eft fuffifante, & que les membranes ne foient point rompues, on les percera, on infinuera la main jufqu'au deffus de l'épaule de l'enfant, fans toucher à sa main ni au bras, & on le repouffera en haut tout doucement pour le faire rentrer; mais fouvent cela ne réuffit pas dès la premiere fois, parce que l'enfant, alors trop gêné dans fa fituation, ne peut se prêter aux mouvemens qu'on veut lui faire faire; dans ce cas, on changera de manœuvre. Ces tentatives étant douloureufes pour la mere, on les lui épargnera, en conduisant tout de fuite la main fur le côté de l'enfant, fur la hanche, la cuiffe, le genou & la jambe, & lorsqu'on aura un pied, le premier mouvement que l'on fera pour le tirer à foi, éloignera de toute néceffité le bras du paffage ayant été alors chercher l'autre pied, on amenera l'enfant. Par cette méthode, on fauvera la vie à l'enfant & à la mere; car dans les accouchemens traînés en longueur par la faute de celles qui operent, il est toujours à craindre que la matrice, irritée depuis long-temps, ne s'enflamme, & ne cause la mort à la femme. Si l'enfant préfentoit le coude, on le reconnoîtroit aisément, parce qu'étant plus pointu que le genou, on ne peut prendre Î'un pour l'autre. On fe donnera bien de garde de le laiffer trop avancer, crainte que le bras ne vienne à fortir jusqu'à l'épaule, ce qui arriveroit fi l'on n'alloit chercher les pieds promptement. En repouffant doucement le coude, l'accouchement devient plus facile, parce que le bras 匦 P.125. Pl. XXII ที่ดี Cette figure fait voir l'Enfant couché en travers dans le bafin. Les pieds du côté des os des Isles gauches. Les fees vers l'os Sacrum; le dos du côté de l'os des Isles droit, et la tête sur les os Pubis; avec une main ignorante qui l'ayant saisie, paroit la tourner obliquement pour la faire sor tir, ce qui ne peut réuir. Cette mauvaise manoeuvre au contraire luxce la tête de l'enfant d'avec le col et lui cause par là une mort prompte; accident qui n'arrive malheureusement que trop souvent dans les Campagnes. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J. Robert. peut s'étendre aifément le long du corps. Il est au contraire plus mal-aisé, lorsque l'avant-bras eft forti tout-à-fait. CHAPITRE XXX. De l'Accouchement où l'Enfant présente l'épaule, l'oreille ou le menton. L'ENFAN 'ENFANT préfentant l'épaule, l'on ne doit point espérer de réduire la tête aifément, pour qu'elle vienne fe préfenter directement à l'orifice : on peut le tenter, mais ne pas s'y amufer trop long-temps, crainte que les douleurs ne finiffent, & qu'à force de tentatives on ne fatigue trop la mere & l'enfant. On reconnoîtra que c'est en effet l'épaule qui se présente, lorsqu'en conduifant le doigt tout autour, l'on fentira le deffous de l'aiffelle d'un côté, & de l'autre le col de l'enfant, ce qui ne peut laiffer aucun doute; mais comme il pourroit arriver que dans cette fituation il eût la face en-deffus, & que l'épaule étant repouffée il vînt dans cette attitude, l'accouchement deviendroit laborieux, alors il faudroit se déterminer à faire fortir l'enfant par les pieds, en fuivant les parties du corps, comme je l'ai dit. La femme, à la vérité, en fouffrira davantage; mais ce moyen eft préférable à la réduction de la tête dans sa situation naturelle, qui demanderoit beaucoup de temps. A l'égard de l'oreille, on ne peut s'y tromper; & le fens dont elle fera tourpar née, on pourra juger fi la face eft en-dessus ou en-deffous, le bord de l'oreille la diftinguant aifément, puifqu'il ne fe trouve jamais du côté de la joue. Ayant fait l'examen néceffaire pour s'affurer que l'enfant a la face tournée en-deffous, on aura lieu d'efpérer qu'en reculant l'épaule, la tête fe préfentera à l'orifice; mais fi le col étoit trop penché sur l'autre épaule, après avoir fait mutilement de légeres tentatives, on fe déterminera à faire fortir l'enfant par les epids. L'accouchement où l'enfant préfente le menton ou le vifage tout entier, peut fe terminer aisément, en le faisant venir par la tête. Si le menton se présente le premier, on le connoîtra par le vuide que l'on fentira au-deffous de la mâchoire, & par la levre inférieure que le doigt rencontrera aisément : alors portant la main applatie, & la conduisant doucement jusqu'à la poitrine de l'enfant, pour la foulever un peu, on fera reculer la tête, fon poids la fera tomber d'elle-même, & l'obligera de fe placer directement à l'orifice, ce qui le fera venir naturellement. Il en fera de même fi l'enfant présente la face toute entiere. On doit obferver que les recherches que l'on fait au moyen du toucher, pour diftinguer ces différentes parties, doivent fe faire avec beaucoup de délicateffe pour n'en bleffer aucune. J'ai vu, en pareille occafion, des yeux crevés, & la face rendue difforme par les meurtriffures qu'on y avoit faites. On s'y prendra comme je viens de le dire, pour tâcher que la tête ne préfente que le fommet; & fi, après avoir tenté plufieurs fois avec bien du ménagement sa réduction dans ces deux diverfes pofitions, on ne peut en venir à bout, le parti le plus für & le plus avantageux est d'aller chercher les pieds, & de terminer au plutôt l'accouchement. CHAPITRE XXX I. De l'Accouchement où fe rencontrent plufieurs Enfans. LORSQU'ON a lieu de croire, par l'étendue confidérable du ventre de la femme, qu'elle eft enceinte de deux ou de trois enfans, il eft d'une conféquence infinie de s'affurer fi le second pied que l'on va chercher dans la matrice, eft celui du même enfant dont on en a déjà un, parce que s'il arrivoit, comme je l'ai dit, que lon tirât en même temps le pied d'un autre. enfant, les corps auxquels ces pieds répondroient, s'embarrafferoient l'un & l'autre, & fi on s'obstinoit à les tirer, l'on exposeroit la mere & les enfans à de très-grands dangers, On réprésente dans cette Planche deux enfants dans le bain dont l'un présente une jambe droite et l'autre la gauche, l'Opérateur ou l'Accoucheuse ne s'étant point aẞuré s'il y a deux enfants dans la Matrice voyant un pied droit et un pied gauche tire sur ces jambes et il résulte de cette mauvaise manoeuvre que les deux autres cuisses appuyées sur quelques parties du contour du bassin ne manquent pas de se luxer et de former un obsta cle invincible a la sortie des enfants. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J. Robert. Pl. L'un Feusi 2 au rties sta bert. dangers, étant impoffible que fes enfans fortent ensemble. Dans ces accouchemens, la façon de délivrer la femme eft la feule chofe que je croie néceffaire d'expliquer ici, puisqu'il n'y a point d'autres méthodes que celles dont j'ai fait mention, pour favoriser la fortie des enfans dans les différentes pofitions où ils peuvent fe rencontrer. L'on peut préfumer que la femme eft enceinte de deux enfans, fi fon ventre eft gros & large, fi elle a été plus incommodée de cette groffeffe que des autres, fuppofé que ce ne foit pas fa premiere, & fi elle a les jambes enflées, de même que la partie. Le volume de l'enfant que l'on reçoit peut auffi en annoncer un fecond; le ventre reftant gros, & l'enfant étant très-petit, peut faire juger qu'il y en a un fecond. L'on doit observer, en général, comme je l'ai déjà dit, de ne point tenter dans aucun accouchement de délivrer la femme, fans avoir auparavant paffé la main sur le ventre, pour s'affurer s'il ne fe trouve I point encore quelque chofe dans la matrice. Par cette précaution on évite le danger auquel on expoferoit la mere & le fecond enfant, fi l'on tiroit tout-à-coup l'arriere-faix. Il peut même arriver que le premier enfant qu'on a reçu, foit bien plus fort que celui qui refte, ce dernier même pouvant être mort depuis plufieurs jours. Lorsqu'on aura reconnu qu'il refte un fecond enfant, on fera au cordon umbilical les deux ligatures dont j'ai parlé, avant de le couper: elles feront à quatre travers de doigt de diftance l'une de l'autre, & on le coupera entre deux. Le premier enfant étant forti, on ne fera aucune tentative pour tirer l'arriere-faix: on profitera de la premiere douleur pour rompre les membranes du fecond. Il arrive quelquefois que chaque enfant a fon placenta particulier; mais plus ordinairement les différens arriere-faix font unis, & par leur union n'en font qu'un feul, auquel répondent les cordons de chaque enfant. En admettant le fentiment de la fuperfétation, qui fuppofe, comme je l'ai dit, une seconde génération à quelque distance de la premiere, l'on doit craindre de faire venir le second enfant trop tôt, puisque n'étant formé que plufieurs jours, ou peutêtre plufieurs mois après la conception du premier, on empêcheroit fa perfection; mais ne pouvant être affuré s'ils ont été formés l'un après l'autre, & fi chaque enfant a fon placenta particulier, on rifqueroit auffi de faire périr la mere & l'enfant qui refte encore dens la matrice, en voulant la délivrer le premier cordon & l'arriere-faix fe trouvant communs aux deux enfans, on détacheroit l'autre partie encore adhérente à la matrice; la perte de fang venant alors avec abondance, fuffoqueroit l'enfant, & mettroit la mere en danger de perdre la vie. : J'avoue une crainte que l'idée de la superfétation m'a toujours donnée; car n'ofant pas délivrer la femme fur le champ, par la raifon que je viens d'expofer, & ne pouvant deviner fi l'arriere-faix eft commun aux deux enfans, j'appréhendois qu'en laiffant ce corps étranger dans la matrice, il ne vînt à s'y corrompre fi elle fe refferroit, & qu'elle ne pût l'expulfer, ce qui mettroit en grand danger & la mere & l'enfant ainfi, il vaut mieux attendre que : de tenter de tirer le premier cordon ; & fi l'arriere-faix fe détache de lui-même, & que les douleurs ceffent, il ne faudra point tâcher de délivrer la femme du fecond enfant, ni de lui faire ufer d'aucun remede pour faire renaître les douleurs; mais on attendra patiemment que le terme de l'enfant qui refte foit expiré. CHAPITRE XXXII. De l'Accouchement où le cordon fe préfente le premier avec quelque partie de l'Enfant. L'ACCOUCHEMENT où le cordon fe préfente le premier avec quelque partie du corps, eft le plus funefte. Lorfque c'est la tête qui vient avec le cordon, il faut, pour fauver la vie à l'enfant, fe déterminer à le faire venir par les pieds, parce que la tête rempliffant le petit baffin, comprimeroit le cordon au point d'arrêter la circulation du fang dans les vaiffeaux qui le compofent, ce qui feroit périr l'enfant ; mais fi ayant rompu les membranes, on reconnoît, par le toucher, que la tête n'eft point trop engagée, on tentera de repouffer en arriere le cordon pour le faire rentrer, à mesure que la tête avancera. Si la réduction du cordon n'étoit pas poffible, il faudroit abfolument fe déterminer à retourner l'enfant, pour le faire fortir par les pieds. 1 10. A l'égard de l'accouchement où l'enfant fe préfente mal, & où quelqu'une de fes parties eft fortie avec le cordon, il n'est pas fi dangereux, pourvu que l'on faffe rentrer le cordon avant que d'aller chercher les pieds, ce qui fe fait facilement, & ne doit point être omis, afin que le cordon ne se trouve point comprimé ni refroidi. CHAPITRE XXXIII. De l'Accouchement de l'Enfant mort, & de la tête reftée dans la matrice. 1 IL y a plufieurs fignes qui donnent à connoître que l'enfant eft mort dans la matrice. S'il l'eft depuis long-temps, & qu'il présente le fommet de la tête, quoique la matrice ne foit point trop dilatée, & que les eaux s'écoulent, la peau chevelue fe fépare & s'attache au bout des doigts, & à mesure qu'on les remet dans l'orifice, quelque nouvelle portion s'y attache encore; mais fi la dilatation de l'orifice eft fuffifante, & qu'il n'y ait pas affez de temps que l'enfant foit mort, pour que l'épiderme qui couvre la peau s'en détache, s'en détache, l'on peut être affuré qu'il a perdu la vie, lorsqu'en tournant le doigt dans l'orifice on fent la tête très-molle, & quelques-uns des os du crâne paffés les uns fur les autres; enfin, fi le cordon fe préfentant le premier, les vaiffeaux qui le compofent font fans battement, & s'il fe trouve flétri, toutes ces circonstances ne permettent pas de douter de la mort de l'enfant. L'on peut encore juger de fon état par l'examen de quelque autre partie qu'il préfente; car fi c'eft un bras, on jugera par le pouls s'il eft vivant ou mort. On ne doit point prendre pour un figne de mort, ainfi que le penfent quelques-uns, la fortie du maconium, puifque Févacuation de cet excrément n'a d'autre caufe que la preffion des boyaux qui le contiennent, foit que l'enfant foit mort, foit qu'il vive encore. Il arrive quelquefois que la mere croit que son enfant est mort, parce que depuis quelques jours elle n'en a point fenti les mouvemens. Il faut bien fe garder de donner trop aifément dans cette idée, & on ne doit rien tenter qui foit capable de nuire à l'enfant, fi fa mort n'eft conftatée par les fignes rapportés ci-deffus, & dont il eft bon que les affiftantes foient inftruites, pour éviter le blâme auquel on fe trouveroit expofé, fi l'on n'avoit cette . attention. Dans les accouchemens trop longs par le ralentiffement des douleurs, fans pour cela que la mort foit certaine, on peut faire prendre à la femme une infufion de deux gros de féné, pour difpofer la matrice à se dilater. Si Fenfant préfentoit le fommet de la tête, & qu'il fe trouvât au paffage, il fau droit lui mettre le doigt dans la bouche, en forme de crochet, & par ce moyen on pourroit le tirer aifément; mais fi la tête n'étoit point affez avancée, on pafferoit de chaque côté une main étendue : comme elle eft alors affez fouple, on peut, en l'applatiffant, la faire entrer un peu plus dans le paffage. L'on tâchera, avec une main, de dégager une épaule, en infinuant un doigt en forme de crochet fous l'aiffelle. ? Quant à la tête, reftée dans la matrice, j'avois cru que rien n'étoit fi commode pour en procurer la fortie, qu'une bourse. Je n'en avois pas l'expérience par moimême, & je ne l'avois donnée pour On réprésente par cette Planche un enfant décollé dont la tête est res tée dans le bain parcequ'ayant pris une situation oblique on a voulu la tirer de force ce qui n'a pu réussir, les deux épines des os Ischion ayant formé un obstacle a sa sortie. Peint par P Chapparre. Grave en Couleurs par J. Robert. DES ACCOUCHEMENS. 137 reffource que fur ce que des perfonnes m'avoient affuré s'en être fervi avec fuccès. Mais ces malheureux accidens, qui ne font que trop communs dans les Campagnes. m'en ont appris l'inutilité. Si la tête, féparée du tronc, se trouve dans un baffin bien conformé, & que la tête ne foit pas difproportionnée par fa groffeur au détroit du petit baffin, que la face foit pofée fur l'os facrum, les efforts de la mere fuffiront pour en procurer la fortie. On peut encore lui donner des remedes; M. Peu dit n'en avoir pas trouvé de plus efficace que les lavemens un peu âcres, employés avec prudence. Il ajoute qu'en ayant fait donner un où il avoit mis deux gros de fel polychrefte, à peine la femme l'eut-elle gardé, qu'elle fut obligée de fe mettre fur le baffin, où elle rendit, dans un effort, la tête reftée. Si la tête eft trop groffe, elle contiendra alors, par fon volume, le détroit du grand baffin; au petit on fent l'inutilité de la bourse, des efforts de la mere & des re medes. Ce ne fera plus que par le fecours des inftrumens que l'on pourra en diminuer le volume. Le volume extraordinaire de la tête de fenfant, ni la mauvaise conformation du baffin de la mere, ne font pas auffi communs que l'ignorance de la Sage-femme de Campagne. Lorsque l'enfant se présente par les pieds, elle le tire toujours; elle ne s'attache point à mettre la tête en ligne directe de l'épine du corps de l'enfant, ce qui fait qu'elle refte oblique, & qu'elle fe place, comme je l'ai rendu dans cette Planche. Je me fuis déjà trouvé dans ces cas, & en présence de personnes qui ne vouloient fe fervir que d'inftrumens tranchans je ne me fuis fervi que de ma main, en remontant la tête dans le grand baffin, la retournant pour lui mettre la face du côté de l'os facrum, un doigt alors dans la bouche, & le pouce fortement appuyé fur l'occiput, pour la baiffer fur le coccyx, & par cette direction la débarraffer de l'arcade des os pubis, & j'en ai fait l'extraction fans aucune violence. P.139. Pl. XXV. com Cette Planche réprésente une Matrice ouverte pour laißer voir l'arrière faia collé a son fond, avec une main droite qui l'ayant reconnu a déjà mencé a paper son petit doigt sous les membranes pour y faire suc - ceivement paper tout les autres afin de le rouler et l'extraire tout entier, pendant cette manoeuvre le cordon est tenu par la main gauche ayant deux tours paẞés autour du doigt indice et du milieu de cette même main. Peint par P. Chapparre. Gravé en Couleurs par J. Robert, CHAPITRE XXXIV. The De l'Arriere-faix adhérent,& de la Matrice renversée. ON propofe deux méthodes pour déli- vrer la femme. Les uns veulent qu'avant de couper le cordon, on aille chercher l'arriere-faix dans l'inftant; les autres pré- ferent d'attendre qu'il fe détache de lui- même, fans porter la main dans la matrice, & de faciliter ce détachement par de lé geres frictions fur le ventre, ou en faifant fouffler la femme dans fa main. Ce font les circonftances qui doivent déterminer à préférer l'une de ces méthodes à l'autre. S'il y avoit perte de fang, la premiere fe- roit à préférer, le feul moyen pour la faire ceffer étant la prompte extraction du pla- centa; ou fi la matrice paroiffoit difpofée à fe refferrer, on devroit profiter du mo- ment favorable pour accélérer le détache- ment du placenta; mais fi l'on n'avoit rien à craindre de la perte, & qu'en tenant le bout des doigts dans la matrice, on ne fen- tît pas qu'elle fe refferrât, on ne devroit rien précipiter, il faudroit tâcher feule- ment de faciliter fon détachement, comme je l'ai dit, par de légeres frictions fur le ventre, & l'arriere-faix fortiroit naturelle- ment, en tirant un peu à foi le cordon, ce cé que l'on a recommandé au Chapitre de l'Accouchement naturel. Si l'on s'apper- cevoit que la matrice fût difpofée à se refferrer, il faudroit dans l'inftant porter la main dans fa cavité, en suivant le cordon *qui fert de guide; & paffant le bout des doigts entre la matrice & l'arriere-faix, on le détacheroit tout doucement, prenant garde que les doigts ne portent que fur le placenta, & on retireroit le tout ensemble, & nor par parties. Il faudroit agir de même pour le fauxgerme adhérent, en obfervant de le détacher tout autour, pour l'avoir en entier. Lorfque le cordon fe trouve rompu près du placenta, ou, comme l'on dit communément, près de fa maffe, le détachement de l'arriere-faix mérite une 9 attention particuliere; car il eft à craindre qu'en le féparant, l'on n'occafionne un renversement de la matrice, en entraînant fon fond vers l'orifice, ce que l'on a vu arriver plus d'une fois. Pour diftinguer le corps du placenta d'avec la matrice on fera attention que la furface de celle-ci eft unie & polie, au lieu que la surface du placenta fe trouve inégale par la quantité de rameaux que forment les arteres & la veine umbilicale. S'étant affuré que c'eft le placenta, on le détachera, comme je l'ai dit, en infinuant le bout des doigts entre les membranes & la matrice, tout autour des bords du placenta, pour découvrir l'endroit qui cede le plus aifément. L'on ne caufera jamais le renversement de la matrice, en féparant l'arriere-faix, lorfqu'on y fera les attentions néceffaires pour le prévenir, & qu'on ne perdra point de vue ce que j'ai recommandé. Mais fi l'on étoit appellé pour remédier à cet accident, on réuffiroit en prenant un linge fin, & en repouffant tout doucement la matrice jufques dans fon fond: on y laifferoit la main jufqu'à ce que la matrice vînt à fe refferrer, alors on la retireroit peu à peu. CHAPITRE XXXV. De la perte de fang qui précede ou accoml'Accouchement, & de celle qui le pagne fuit. LA perte de sang est souvent funeste à la mere, fi l'on n'y apporte un prompt fecours. On doit, avant que de rien entreprendre, tâcher de connoître la caufe de cet accident; car fi la perte eft occafionnée par le détachement du placenta, elle ne peut ceffer que par le refferrement de la matrice, qui n'aura lieu qu'après la fortie de l'enfant. Dans ces circonftances, il n'y a point de temps à perdre, il faut de toute néceffité accoucher la femme. Si la matrice n'étoit pas fuffisamment dilatée, on s'y prendroit comme je l'ai enfeigné au Chapitre du Faux-germe. Si en touchant la femme c'est le placenta qui fe préfente, on pourra le reconnoître par sa portion charnue, qui ne ressemble fa en rien aux parties de l'enfant : de plus, les caillots de fang qui viennent coup fur coup, & l'abondance de celui que la femme perd, ne laissent plus d'espérance pour elle, que dans la promptitude de sa délivrance. Si l'arriere-faix fe trouvoit détaché, qu'il fe préfentât au paffage, ou qu'il fortît par l'orifice, les membranes n'étant point rompues, il faudroit les déchirer pour aller chercher les pieds de l'enfant, fuppofé que la tête ne fût point trop avancée. On ne doit pas alors faire rentrer le placenta, qui n'eft plus néceffaire pour la confervation de l'enfant. Si l'on a eu le malheur d'être appellé trop tard, ou que l'on ait été trop long-temps à opérer, la mort de l'enfant eft certaine, & cette mort eft le plus fouvent fuivie de celle de la mere. S'il arrive que l'orifice de la matrice ne foit point affez dilaté, pour permettre au placenta de passer jufques dans le vagin, on le reconnoîtra aux fignes que j'ai donnés. L'on aura foin, dans ce cas, de repouffer l'arriere-faix de côté, afin qu'il ne forte qu'après que l'enfant fera paffé. Il furvient affez fouvent des pertes avant l'accouchement: lorfqu'elles ne font occafionnées que par l'abondance du fang, & pour n'avoir pas faigné suffisamment la femme pendant fa grofleffe, une ou deux faignées arrêtent alors ces pertes, & l'accouchement se fait tout naturellement. La perte de fang qui fuit l'accouchement, arrive souvent pour n'avoir pas fait faigner la femme au commencement de fes douleurs, ou pour avoir fait l'extrac tion du placenta avec trop de violence, ou enfin pour en avoir laiffé quelque portion dans la matrice. Lorfque la perte furvient, on ne doit rien négliger pour y apporter du remede: le plus certain eft d'introduire la main dans la matrice, pour reconnoître fi la perte eft occafionnée par quelque corps étranger, foit par un faux-germe, ou quelque portion du placenta; foit par quelque caillot de fang. On doit être affuré qu'auffi-tôt que la la matrice fera débarraffée de ces corps étrangers, la perte ceffera. Néanmoins, fi malgré cela elle continuoit, l'on tremperoit des linges dans l'oxycrat, que l'on fait n'être qu'un mêlange d'eau & de vinaigre, qu'on feroit tiédir fi la faifon étoit froide on envelopperoit avec ces linges les cuiffes de la femme, & on pafferoit fous les reins un autre linge mouillé de la même liqueur. On auroit soin de retirer de la partie les caillots de fang, à mesure qu'ils s'y formeroient. La cire d'Espagne en poudre eft un très-bon remede, & la Sage-femme devroit en avoir toujours fur foi. On en prendra de la groffeur d'une noifette, que l'on mettra en poudre, pour la faire avaler à la femme dans fix cuillerées d'eau; & fi la perte continue, on lui en donnera une feconde dofe. C'est un remede dont j'ai vu de grands effets. Si l'on est à portée de faire prendre à la femme une potion, on lui en donnera une qui fera compofée de deux onces d'eau de chicorée fauvage, d'une once d'eau de K fleurs d'orange, de demi-once de firop de diacode, & autant de firop de capillaire, qu'elle avalera tout à la fois. On lui fortifiera le cœur en lui faifant flairer des linges trempés dans l'eau de la Reine de Hongrie, ou dans du vin, qu'on aura fait un peu chauffer. On la couvrira moins qu'à l'ordinaire, & l'on aura foin que l'air de la chambre ne foit point trop chaud on ne lui bandera point le ventre, crainte d'exciter la perte. Sa nourriture ne fera que d'un peu de gelée donnée de temps en temps, & fa tifane fera faite avec la racine de grande-confoude & le riz. On pourra lui faire prendre une once de fuc de pourpier. : Si les forces de l'Accouchée étoient fuffifantes, on pourroit la faigner du bras, dans la vue de détourner le fang de la matrice cette faignée ne doit point fe faire tout de suite, il faut l'interrompre de temps en temps pour ménager fes forces, & occafionner plus de diverfion. On fermera donc la veine à plufieurs fois, laiffant des intervalles plus ou moins grands, fui vant l'état de l'Accouchée. Cette méthode eft fort approuvée. CHAPITRE XXXVI. Des convulfions & de la léthargie qui furviennent à la Femme dans le travail. LORSQU'IL arrive que la femme a des convulfions avant que d'être accouchée, il y a tout à appréhender d'un pareil accident, tant pour la mere que pour l'enfant; ainfi, on appellera un Médecin ou un Chirurgien habile, & l'on s'attachera à bien examiner l'état de la femme, pour leur en rendre un compte fidele. En attendant les fecours néceffaires, pour délibérer fur le parti qu'il y a à prendre, il faut faire faigner la femme, quand bien même elle l'auroit été, & ne lui faire ufer que de l'eau pure, prenant bien garde qu'il ne lui en tombe fur le vifage & fur la gorge. Cette fraîcheur la faififfant, redoubleroit les convulfions, & les liqueurs fpiritueufes les rendroient encore plus violentes. Si on fent que l'orifice de la matrice fe dilate, & que les douleurs viennent par intervalle entre les mouvemens convulfifs, on peut espérer pour lá femme. Si l'enfant fe préfente bien, & que la matrice foit fuffifamment dilatée, il faudra l'accoucher fur le champ; mais fi la tête ne vient pas la premiere, ne pouvant alors retourner l'enfant fans faire beaucoup de violence, ce qui ne manqueroit pas d'irriter le genre nerveux, qui fe trouve déjà affecté, on attendra patiemment le moment de l'accouchement. La faignée à la gorge eft très-avantageuse dans ces circonftances, pour dégager le cerveau de la quantité du fang qui s'y porte, ce qui arrive lorsque cet accident dure long temps. Il est encore un autre état qui devient mortel pour la femme, c'est lorfqu'elle tombe en léthargie cet affaiffement de tous les refforts de l'économie animale ne laiffe plus de reffource pour l'accouchement; ainfi, il faut fe déterminer à faire l'extraction de l'enfant le plus promptement qu'il fera poffible, parce que c'eft le feul moyen de fauver la mere. Je me fuis trouvé plufieurs fois dans ces deux cas, où ayant appellé d'habiles gens, je puis affurer qu'aucune femme n'en eft morte, & que même j'ai fouvent reçu les enfans vivans. CHAPITRE XXXVII De la defcente ou relaxation de la Matrice. LES Es quatre ligamens que j'ai dit defti nés à maintenir la matrice dans fa fituation naturelle, fe relâchent quelquefois; enforte que le col de la matrice, au lieu de fe trouver au fond du vagin, s'avance jufqu'au milieu de ce conduit. L'on a vu ce relâchement devenir fi confidérable, que cet organe fe portoit jufqu'aux grandes levres, & s'avançoit même au-delà. C'eft. ce dernier état que l'on nomme chûte de matrice, pour diftinguer du premier que l'on défigne par le terme de defcente, ou de relaxation de matrice.. Entre les caufes capables de produire ces accidens, les plus ordinaires font les travaux exceffifs, ainfi que les efforts que caufent de trop lourds fardeaux; auffi remarque-t-on que les femmes de Campagne y font les plus fujettes. Le moyen de foulager celles qui font affligées de ces relâchemens, c'eft de leur interdire toute occupation pénible, & de les obliger même à garder le lit pendant un temps convenable; à quoi on ajoutera l'ufage des injections fortifiantes dans le vagin, telles que celles qui feront compofées de gros vin, où l'on aura fait bouillir des rofes de Provins. Si ces moyens n'étoient pas fuffifans ou qu'il ne fut pas poffible de les employer, l'on auroit recours aux peffaires, que l'on peut compofer de différentes matieres; les plus ordinaires font faits d'un morceau de liege affez épais, de la largeur environ d'un écu de fix livres, auxquels on donne une figure ovale, & on le perce dans le milieu de façon à y pouvoir paffer le doigt; le peffaire doit être égal dans fa circonférence, & fa furface fera rendue très-unie Cette Planche réprésente une Matrice dans le baẞin avec un Vagin fen du dans le fond duquel on aperçoit poser un Peßaire de cire par trou duquel on voit l'orifice de la Matrice. le par la cire fondue dans laquelle on le plongera plufieurs fois, jufqu'à ce qu'il s'en trouve entiérement recouvert, & qu'il s'y foit formé plusieurs couches: on l'infinuera alors dans le vagin, l'ayant trempé dans de l'huile, & la femme étant couchée fur le dos, les genoux élevés & pliés, on le pouffera jufqu'au fond de ce conduit, & lorfqu'il y fera parvenu, on le placera de maniere que l'orifice de la matrice réponde à l'ouverture du peffaire. Par cette précaution les humeurs qui s'écouleront de cet organe auront la facilité de s'échapper, & le femme pourra concevoir. On aura l'attention, avant d'introduire le peffaire, d'y attacher un lien, afin de le retirer plus aifément, ce que l'on fera de temps en temps pour le nettoyer. Lorfque le peffaire fera placé, on fera mettre la femme en des fituations différentes, foit en la faifant affeoir, foit en la faifant mettre à genoux; on jugera par la facilité avec laquelle la femme le fupportera dans diverfes fitua tions, fi le peffaire eft bien conditionné c'est-à-dire, s'il n'eft point trop gros ni trop Kiv " petit, & l'on y remédieroit alors diffé remment, fuivant l'état où il se trouvera : ceux qui font trop gros incommodent; ceux qui font trop petits ne tiennent pas, & il faudra en augmenter le volume en les remettant de nouveau dans la cire. • L'ignorance de la plupart des Sagesfemmes de Campagne leur fait regarder la matrice, qu'elles appellent la mere comme la fource de toutes les maladies. Dans cette idée, elles y appliquent indiscrettement toutes fortes de remedes, qui ont fouvent des fuites très-fâcheufes, ce que je n'ai vu que trop fouvent arriver dans les différens voyages que j'ai été obligée de faire. CHAPITRE XXXVIII. Des qualités requifes à une bonne Nourrice. IL feroit à fouhaiter que la mere de F'enfant pût le nourrir elle-même, à raison de la conformité du tempérament, furtout fi elle jouiffoit d'une parfaite fanté, & qu'elle fût bien conftituée, la bonne conftitution du corps étant la premiere qualité d'une Nourrice; à quoi il faut ajouter qu'il feroit bon qu'elle ne fût pas née de parens attaqués de certaines maladies capables de fe tranfmettre, telles que la pierre, la goutte, les écrouelles, l'épilepfie, &c. D Les autres qualités de la Nourrice regardent la difpofition de fon fein. Les mamelles doivent être d'un volume fuffifant, ni trop groffes, ni trop petites, pour fournir la quantité de lait néceffaire à l'enfant; il faut qu'elles ne foient ni applaties, ni attachées aux côtés; elles doivent au contraire s'avancer en-dehors en forme de poire le mamelon ne doit être ni trop gros, ni trop enfoncé. Un mamelon trop gros rempliffant la bouche du nouriffon, l'empêcheroit de tetter; en un mot, la groffeur & la figure du mamelon doivent répondre à celle d'une noisette. Il doit être percé de plufieurs petits trous, pour qu'il laisse échapper facilement le lait, & que le nourriffon ait moins de peine à fucer; enforte que l'enfant quittant le tetton, on voie fortir le lait par plufieurs rayons, ainsi que l'eau fort d'un arrofoir. Le lait ne doit être ni trop épais, ni trop séreux. Pour en juger, il faut en faire rayer environ une demi-cuillerée dans la main : fi en la penchant un peu le lait coule auffi-tôt, c'eft un figne qu'il eft trop féreux; fi au contraire les gouttes restent attachées fans couler fur la pente que fait la main, c'est une preuve qu'il est trop épais. Pour être cenfé bon, il eft néceffaire qu'il s'épanche tout doucement, & que la place en foit un peu teinte. Le lait trop féreux ne nourrit point affez, & celui qui eft trop épais, outre qu'il a de la peine à fortir, eft difficile à diriger: entre les deux, néanmoins, quelques Accoucheurs de réputation préferent le lait le plus coulant, comme plus aifé à fe distribuer. Enfin, le lait doit être blanc, doux & un peu fucré. e "/ Il ne faut pas que la Nourrice foit trop jeune ni trop vieille: le premier âge est trop chaud, & le dernier abonde trop en humeurs. Le bon âge eft depuis vingt-cinq ans jufqu'à trente-cinq. * On préfere les Nourrices qui ont les cheveux noirs ou châtains, à celles qui les ont blonds ou roux, & qui ont des taches de rouffeur; ces dernieres ayant pour l'ordinaire une odeur défagréable. Si la peau n'eft pas d'un grand blanc, il faut du moins qu'elle ne foit point livide, ce qui annonceroit un tempérament bilieux : elles doivent avoir un peu de couleur mais point trop. On doit examiner le col, & le deffous du menton de la Nourrice, pour favoir fi elle n'a pas eu les écrouelles. En regardant les bras, on peut juger par la quantité des cicatrices des faignées, fi elle eft valétudinaire. On doit s'informer fi elle n'eft point réglée pendant qu'elle nourrit; car fi elle l'étoit, l'abondance du lait en feroit diminuée. Il feroit bon encore que la Nourrice ne fût point louche, ni qu'elle n'eût point les dents gâtées, ce qui pourroit lui donner une mauvaise haleine, capable d'incommoder l'enfant. On doit éviter de prendre une Nourrice ger nouvellement accouchée, & avant la fin des quarante jours néceffaires pour la purde fa couche, fon lait ne pouvant alors être bon que pour fon propre enfant, tandis qu'il feroit contraire à un autre nourriffon, par la différence de tempérament. Si l'enfant de la Nourrice eft mort, il faut s'informer fi ce n'eft point de quelque maladie contagieuse, comme font les fievres pourpreufes, quelques ulceres vénériens, la gale, &c. tout cela n'annonceroit pas une Nourrice bien faine; mais fi fon enfant vit, on peut juger d'elle par lui-même; fi fon teint eft vermeil, fi fa chair eft ferme, & fi, l'examinant tout nud, on le trouve écorché entre les cuiffes, cela fera connoître la mal-propreté de la Nourrice, qui ne manqueroit pas d'être encore plus négli gente pour un enfant qu'elle ne prend que par intérêt. Une attention qui eft encore néceffaire, concerne les mœurs de la Nourrice. Il n'eft pas douteux que le caractere de celle qui allaite, n'influe beaucoup fur l'enfant qui fuce les vices avec le lait, & qui, quelquefois, tient moins de ceux qui lui ont donné le jour, que de celle qui l'a nourri. On doit s'informer avec foin fi la Nourrice n'eft point fujette au vin, au vol, ou à quelque autre vice, fielle eft violente, ou fi fon humeur eft inégale. Il est effentiel auffi de favoir fi elle eft fujette au mal-caduc, & quand même ce ne feroit que le Mari qui y fût fujet, il y auroit toujours à craindre que les accès de cette maladie ne donnaffent lieu au lait de fe troubler, & de dévenir quifible à l'enfant. Il faut auffi s'informer file Mari & la Femme vivent bien ensemble, pour ne point avoir à craindre que lorfqu'ils fe querellent, ou qu'ils fe battent, les coups ne retombent fur l'enfant. On ne doit rien négliger pour s'inftruire de toutes ces circonftances, & il faut éviter de se laiffer gagner, foit par fes amis, foit par l'espérance de recevoir des préfens de celle à qui l'on donne la préférence. Quoiqu'on ne croie point commettre un crime en le faifant, c'en eft pourtant un très-grand, & l'enfant en eft fouvent la victime, foit qu'il périffe bientôt, ou qu'il vive long-temps infirme. L'on a d'autant plus à fe reprocher de n'avoir pas usé de toutes ces précautions, que c'eft dans les petits endroits où l'on peut plus aifément s'inftruire des moindres particularités. OBSERVATIONS SUR DES CAS SINGULIERS, AJOUTÉS A L'OUVRAGE DE L'AUTEUR. OBSERVATIONS SUR DES CAS SINGULIERS, AJOUTÉS A L'OUVRAGE DE L'AUTEUR. PREMIERE OBSERVATION. Sur la Matrice double. LA matrice de la femme, que l'on fait n'avoir pour l'ordinaire qu'une feule cavité, s'eft trouvée quelquefois en avoir deux. M. Riolan, Médecin de Paris, en fournit des exemples dans fon Antropographie, Livre II, cap. XXXV, page 157. Madame la Marche, dans fon Livre, ou Instruction familiere aux Sages-femmes, fait auffi mention d'une matrice de cette L " efpece, vue dans le corps d'une femme, dont l'ouverture fut faite à l'Hôtel-Dieu. M. Littre, Médecin de Paris, difféquant une petite fille, morte à l'âge de deux ans, obferva qu'elle avoit le vagin partagé en deux cavités égales, l'une à droite, l'autre à gauche, par une cloison perpendiculaire, de maniere cependant que cette cloifon n'étoit point entiere, & ne formoit ces deux cavités que depuis le milicu du vagin jufqu'à la matrice: chacune de ces cavités aboutiffoit à une matrice particuliere, qui avoit fon orifice, fon col & fon fond. Ces matrices qui étoient très-diftin&tes & féparées dans l'intérieur, ne montroient au-dehors qu'un corps fimple & continu, à l'exception néanmoins de leurs fonds qui étoient féparés l'un de l'autre, ou, pour mieux dire, qui n'étoient réunis que par un ligament en forme de membrane triangulaire. Chaque fond avoit une trompe, un ovaire, un ligament large, & un ligament rond *. 621 " * Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, année 1717 M. Gravel, Médecin, fournit auffi des exemples de double matrice, dans une thèse qu'il foutint à Strasbourg en 1738. M. Philippe-Adolphe Boehmer, célebre Profeffeur en Médecine, donne auffi un exemple d'une double matrice dans fon fecond Recueil d'Obfervations d'Anatomie, 1756. La cloifon qui féparoit le vagin, suivant sa longueur, en deux parties égales, s'étendoit depuis l'union des orifices de cette matrice, jufqu'à celui du vagin, qui, dans ce fujet, avoit deux oùvertures, l'une à droite, l'autre à gauche, féparées par l'extrémité de la cloifon verticale, qui partageoit le vagin en deux cavités. Il eft à préfumer, comme l'a dit M. Littre, au sujet de la petite fille à qui il trouva deux matrices, que les femmes, ainfi conformées, pourroient concevoir en différentes approches, tantôt par l'une de ces matrices, tantôt par l'autre, felon que la femence virile fe porteroit à l'une ou à l'autre. Sur les vices de conformation du baffin. PARMI les vices de conformation dont le baffin est susceptible, il y en a deux principaux, qui, portés à un certain degré, obligent d'avoir recours à l'opération céfarienne, ou du moins, rendent l'accouchement très-laborieux. Le premier, eft le rétreciffement de l'entrée du petit baffin, occafionné par l'approche de la partie fupérieure de l'os facrum, & du corps de la derniere vertebre des lombes vers l'os pubis, & dont il eft fait mention à la page 95 de ce Livre; le second, qui est contraire au premier, confifte dans le rétreciffement de la partie inférieure du baffin, formé par l'approche contre nature des branches & des tubérofités des os ifchion. On en a vu un exemple tout récemment à l'Hôtel-Dieu de Paris, fur une femme âgée d'environ trente ans, à qui l'on a été obligé de faire l'opération céfarienne. L'entrée du petit baffin étoit très-fpacieuse; la diftance de la partie fupérieure de l'os facrum à la symphyfe des os pubis, avoit cinq pouces & quelques lignes; celle d'un des os des iles à l'autre, à l'entrée du petit baffin, étoit de quatre pouces trois lignes; les tubérofités des os ifchion ne laiffoient entre elles qu'un intervalle de deux pouces moins un quart; les branches de ces os laiffoient entre elles un pouce & demi d'intervalle, & les épines de ces mêmes os n'en laiffoient que deux pouces entre elles; & fi l'on fait attention à la difpofition des ligamens qui attachent ces parties, on concevra aifément que cette ouverture inférieure du baffin fe trouvoit encore rétrecie par leur moyen. En traitant de la Génération, l'on a dit que, quoique la matrice foit le lieu où l'œuf qui a été fécondé fe développe le plus ordinairement, l'on avoit vu néanmoins cet œuf éclorre dans l'ovaire, d'autres fois dans la trompe, & enfin dans la capacité du ventre. L'on a ajouté que ces générations extraordinaires font très-fouvent mortelles; le fœtus qui en eft produit ne pouvant fortir par la voie naturelle. Entre les Obfervations que nous avons fur cette matiere, je vais en citer deux qui prouvent que les meres peuvent furvivre aux opérations néceffaires pour l'extraction des fœtus morts. La premiere de ces Observations est d'Abraham Cyprianus, Médecin & Profeffeur en Anatomie & en Chirurgie dans l'Académie de Franker, fur un fœtus de vingt-un mois qui fut retiré de la trompe droite de la matrice, matrice, fans que la mere en foit morte. La feconde eft de M. Littre, fur un fœtus tiré du ventre de fa mere par le fondement. III. OBSERVATION. Sur un Foetus de vingt-un mois, qui fur droite de la matrice trompe retiré de la fans que la Mere en foit morte. ABRAHAM Cyprianus * dit que le 17 Décembre 1694, il fut appellé à Louvarde pour la femme de Lewis, Soldat dans la Compagnie du Capitaine Peterson : elle étoit âgée de trente-deux ans, & enceinte la troifieme fois. Cette femme arriva pour jufqu'au neuvieme mois de fa groffeffe, fans appercevoir rien de différent de ce qu'elle avoit fenti dans les groffeffes précédentes, excepté que pendant tout ce temps-là elle n'eut point de lait aux mamelles. Il lui sembloit auffi que fon fardeau étoit plus pefant & plus incommode qu'à l'ordinaire, fur-tout lorsque le foetus qui étoit fitué un peu plus haut que dans les groffeffes précé *Lettre d'Abraham Cyprianus à M. Thomas Millington. Amfter dam, 1707. P101 dentes, fe remuoit avec vivacité. Arrivée au terme de l'accouchement, elle fentit de grandes douleurs, & fon enfant fe remua plus que de coutume, ce qui lui fit espérer qu'elle accoucheroit bientôt : fes espérances furent vaines; car outre que ces mouvemens fe faifoient fentir dans un lieu extraordinaire, il n'y avoit aucune préparation du côté de l'orifice de la matrice qui annonçât un accouchement prochain: dès-lors l'enfant ceffa de fe mouvoir, & la mere commença à se mieux porter. Après le dixieme mois, les menftrues qui avoient été fupprimées depuis le commencement de la groffeffe reparurent, & la mere ne fentit plus mouvoir l'enfant, mais feulement un poids très-lourd, & fur-tout vers le dix-huitieme mois, auquel temps elle fe trouva fi incommodée, qu'elle fut obligée de garder le lit. Peu de temps après elle commença à fe plaindre d'une grande douleur aux parties voifines du nombril, & cette douleur fut fuivie d'un ulcere fongueux dans cette région. Plufieurs confultations furent faites, tant de Médecins que de Chirurgiens, dont les avis fe trouverent partagés; les uns voulant que le fœtus fût dans la matrice, & les autres le niant. Il y avoit vingt-un mois que la groffeffe avoit commencé, lorfque Cyprianus fut appellé à Louvarde, où il fe rendit avec les premiers Médecin & Chirurgien du Prince de Naffau. Dès qu'il eut vu la malade, confidéré les circonftances de fon état, & fu tout ce qui avoit précédé, il affura qu'elle portoit un enfant mort. On découvrit, par le toucher, une dureté confidérable au bas de l'ulcere voifin du nombril, lequel ulcere étant fongueux, donna facilement entrée à une fonde, au moyen de laquelle la dureté fut reconnue être un os. Cyprianus ayant introduit dans l'ouverture le petit doigt, jugea que c'étoit un des pariétaux de l'enfant, ce qui l'ayant enhardi, il fe détermina à faire l'opération néceffaire, malgré la grande foibleffe de la malade. Ayant fait porter le lit au milieu de la chambre, il commença par introduire le doigt dans l'endroit où il avoit fenti un des pariétaux, & conduifant fur ce doigt une branche de ciseaux, il fit une incision auffi grande qu'il fut poffible: elle comprenoit non-feulement les tégumens, mais auffi les muscles, le péritoine, & enfin la poche dans laquelle le foetus fut trouvé avec fon cordon & fon placenta, qui étoit trèsmince, & dont une portion étoit même confumée. Cyprianus ayant reconnu que cette poche étoit continue à la partie latérale droite de la matrice, ne douta pas que ce ne fût la trompe de ce côté, d'autant plus qu'on a beaucoup d'exemples de fœtus trouvés dans ce conduit. Ayant retiré le foetus avec fon placenta, & enlevé en même temps, au moyen d'une éponge trempée dans de l'eau tiede, toute la mucofité & le fang qui s'y trouvoient épanchés, il ne s'occupa plus que de la réunion de la plaie, qui avoit environ un pied de longueur : il fit quatre points de future enchevillée, qui fe trouvoient également diftans les uns des autres, comprenoient le péritoine & toute l'épaiffeur des muscles & de la peau. Cyprianus crut devoir laiffer à la partie inférieure de la plaie, une ouverture pour l'écoulement des matieres qui viendroient de l'intérieur, & dans laquelle il mettoit une petite tente très-mollette, qui ne s'oppofoit point à l'écoulement de ces matieres. Enfin, au moyen d'un régime convenable, & des attentions néceffaires en pareil cas la femme fut parfaitement rétablie au bout de trois mois, & continua à fe bien porter; enforte que neuf mois après fon rétabliffement, elle devint enceinte, accoucha heureusement d'une fille, & l'année fuivante d'un garçon & d'une fille jumeaux. f IV. OBSERVATION. Sur un Foetus tiré du ventre de fa Mere par le fondement, AU mois de Mars de l'année 1702, M. Caffini * donna avis à l'Académie Royale 'des Sciences, qu'une femme, fans avoir *Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, année 1702. eu aucun figne apparent de groffeffe, avoit vuidé par le fiege plufieurs os, qui fembloient être ceux d'un foetus. M. Littre, chargé de vérifier un fait fi fingulier, se tranfporta chez la malade: il trouva au lit une femme âgée de 32 ans, autrefois fort graffe, alors horriblement décharnée, & très-foible. Il apprit qu'il y avoit douze ans qu'elle étoit mariée; que pendant les fix premieres années de fon mariage elle avoit eu trois enfans; que dans les trois fuivantes elle avoit fait quatre fauffes-couches; que vers le 15 du mois d'Août de l'année précédente, elle avoit fenti une douleur aiguë à la hanche droite; que cette douleur qui avoit diminué quelque temps après, avoit entiérement ceffé au bout de cinq femaines; qu'au commencement du mois de Novembre de la même année, la malade avoit encore fenti fous le foie une douleur accompagnée d'un grand étouffement, & qu'en appuyant fur cet endroit, on y avoit remarqué une tumeur ronde & groffe comme les deux poings; qu'environ deux mois après, cette tumeur étant tombée dans le côté droit du baffin de l'hypogaftre, la douleur & l'étouffement avoient ceffé fur le champ ; que huit jours après la douleur de la hanche étoit revenue avec plus de violence que la premiere fois; & qu'enfin la femme avoit des hémorroïdes intérieures & extérieures, une difficulté d'uriner, une constipation, & une impuisfance de marcher, principalement du côté droit. Vers la fin du mois de Décembre fuivant, il lui prit une fievre qui dura quatre mois fans relâche, avec plufieurs redoublemens, la plupart précédés de friffons; elle avoit une averfion pour toute forte d'alimens, des défaillances, des hoquets, des vomiffemens de fang, & un cours de ventre purulent ou fanglant, qui entraînoit des os, des chairs pourries, des cheveux, &c. Tout cela étoit fuivi d'épreintes, de coliques cruelles, de toux, de crachement de fang, d'infomnies continuelles, & de douleurs infupportables dans toutes les parties du corps, jusques dans la moëlle des os. M. Littre apprit auffi que cette femme avoit commencé à rendre des os les premiers jours du mois de Mars de l'année précédente, à la fuite des grands efforts pour aller à la felle. Le premier os qui parut, fut celui d'un bras d'un fœtus, dépouillé de fes chairs, qu'on lui tira avec beaucoup de peine du gros boyau, où il s'étoit engagé. Cet os fut fuivi pendant quelques jours de quelques autres; mais plus petits, avec des matieres épaiffes, purulentes, & d'une odeur cadavéreuse. L'on reconnut que ces os étoient ceux d'un fœtus d'environ fix mois; & ayant demandé à la femme de combien elle croyoit être enceinte, elle répondit qu'elle n'en favoit rien, qu'elle n'avoit pas même eu aucun foupçon de l'être, parce que fes regles ne lui avoient pas manqué depuis sa derniere couche; que fon ventre n'étoit pas groffi confidérablement; qu'elle n'avoit point fenti remuer l'enfant comme dans les groffeffes précédentes; que fon fein n'étoit pas devenu plus gros, & qu'il n'y avoit point paru de lait, & qu'enfin elle ne se fouvenoit pas d'avoir eu aucune des incommodités qu'elle avoit reffenties dans fes premieres groffeffes. Ĉependant, quelques jours après, on la fit fouvenir qu'au mois de Mai 1701, elle avoit eu une forte envie de manger du Maquereau, qu'elle n'avoit pu fatisfaire à cause de la cherté. On la fit encore fouvenir que dans le même temps elle avoit été dégoûtée des alimens ordinaires, & qu'elle avoit eu des maux de coeur. Or, de fortes envies de manger des alimens dont elle n'ufoit que rarement, les dégoûts, les maux de cœur étant des fignes de groffeffe, on peut conclure, dit M. Littre, que cette femme étoit devenue enceinte dans ce temps-là, d'autant plus que la grandeur des os du foetus marquoit la même chofe. M. Littre ayant touché la femme, trouva la matrice dans fon état naturel, rien n'en étant forti durant le cours de la groffeffe, que ce qui fort dans le temps réglé chez les femmes faines, & qui ne font point d'hémorroïdes noires & ulcérées, & fon ouverture étoit fi rétrecie par ces hémorroides, & par une dureté qui en occupoit toute la circonférence, qu'il ne put introduire deux doigts à la fois dans le rectum, fans de grands efforts, qui firent tomber la femme en foibleffe. Cet inteftin se trouvoit ulcéré intérieurement en plusieurs endroits, & percé d'un trou de la largeur d'environ un pouce & demi, autant qu'il fut permis d'en juger par le doigt. L'ouverture étoit fituée du côté droit à la partie poftérieure du boyau, & à deux pouces au-deffus du fondement, où à peine le doigt indice pouvoit atteindre. Alors il n'y eut plus lieu de douter du chemin que les os & les autres matieres étrangeres, rendues par le fiege, avoient pris. M. Littre examinant avec le doigt la `plaie, ou le trou d'un boyau, fentit la tête d'un fœtus, qui étoit fi fortement appliquée contre cette ouverture, qu'il ne put la déranger, & la face qu'il préfentoit fermoit fi exactement le trou, que la malade, depuis depuis trois jours, ne rendoit par le fiege aucune des matieres extraordinaires qui en fortoient auparavant. Cet habile Médecin crut ne devoir faire l'extraction de cette tête, qu'après avoir rétabli les forces de la femme, qui fe trouvoit trop affoiblie; ce qu'il fit par l'ufage des bons confommés, des œufs frais, de la gelée, du vin d'Alicante, &c.; après quoi il en tenta l'extraction, en détachant d'abord la peau de la face, & enfuite les petits os des mâchoires: à l'égard des grands os du crâne, tels que les pariétaux & les deux portions du coronal, comme leur volume ne permettoit pas de traverser l'ouverture latérale de l'inteftin, il crut devoir les diviser en plufieurs pieces, au moyen des pincettes courbes & tranchantes, & il travailla enfuite à réparer les altérations confidérables de l'inteftin & des parties voisines, ce qu'il fit par l'usage des injections déterfives, & autres remedes convenables. L'usage de tous ces différens moyens, prudemment employés pendant plufieurs mois, fut fuivi d'un fuccès des plus heureux, & la malade, M quelque temps après le traitement, jouit d'une parfaite fanté. Les differentes circonftances qui avoient accompagné cette groffcffe particuliere, ne permirent pas à M. Littre de croire que le fœtus eût été contenu dans la matrice, d'autant plus que la femme avoit été trèsbien réglée pendant tout ce temps-là; qu'il n'y avoit eu, durant le traitement, aucun écoulement de matiere étrangere par l'orifice de ce vifcere. Il fe perfuada donc que le foetus avoit été contenu dans une des trompes ou dans l'ovaire, & il le crut d'autant plus aisément, qu'il avoit vu deux exemples particuliers de foetus trouvés dans l'un & dans l'autre. Or, les membranes de ces parties, dit M. Littre, n'ayant pas de vaiffeaux considérables, & en affez grand nombre, le foetus a dû manquer de fuc nourricier, ce qui lui a occafionné des mouvemens convulfifs, qui ont donné lieu à la rupture de la poche où il étoit renfermé, à quoi ont pu contribuer auffi les efforts de la mere, tant pour vomir que pour aller à la felle; efforts caufés par la violence des remedes dont la femme faifoit usage, & cette poche étant rompue, le fœtus a dû tomber dans la capacité de l'hypogaftre, où étant mort peu de temps après, il contracta la pourriture dont il a été fait mention, & qu'il communiqua aux parties voifines. Ve. OBSERVATION. Sur des Foetus qui ont demeuré plufieurs années dans le ventre de leur mere, fans fe corrompre. LES Obfervations fuivantes feront voir que des foetus morts depuis long-temps dans le corps de leur mere, y ont resté sans se corrompre, & fans que la mere, pendant ce temps-là, fe trouvât fort in- commodée. Entre plufieurs exemples de ces faits finguliers, le plus récent eft celui de l'enfant de Joigny, petite Ville de Bourgogne qui a été trente ans dans le ventre de fa mere. La relation de ce fait extraordinaire fut envoyée à l'Académie Royale des Sciences par Meffieurs Bourdois & Chomereau, Médecins de cette Ville : elle eft conçue en ces termes. Une pauvre Blanchiffeufe de la Ville de Troyes, mariée depuis quatre ans, & qui avoit fait une fauffe-couche dans les premieres années de fon mariage, devint groffe une feconde fois. Au terme ordinaire, elle eut les douleurs & les fignes qui annoncent un accouchement naturel très-prochain. Ces fignes fe foutinrent dans le même état pendant deux jours: alors on remarqua que la matrice étoit vuide, quoique l'enfant remuat dans le corps de la mere avec plus de force & de facilité qu'auparavant. Dans le courant du mois fuivant, la femme eut quelques douleurs vives, mais paffageres, & tomba dans un état de foibleffe & d'affaiffement, qui fit craindre pour sa vie : elle s'en remit cependant peu-à-peu, & au bout de huit mois elle reprit les pénibles fonctions de fa profeffion : elle a vécu dans cette fituation pendant trente années, dont elle a paffé les cinq dernieres à Joigny, toujours groffe, n'ayant, depuis fon accident, ceffé d'être réglée, & d'avoir eu du lait dans fon fein. Enfin, le 22 Juillet 1747, elle mourut à l'Hôtel-Dieu de Joigny, d'une fluxion de poitrine, âgée d'environ foixante-un ans. A l'ouverture du cadavre, on trouva dans le bas-ventre une maffe ovale, groffe comme la tête d'un homme, attachée au fond de la matrice, & qui fembloit fortir de la trompe droite. L'on ouvrit cette masse, qui pesoit près de huit livres; on y découvrit un enfant, parfaitement confervé, fans être environné d'aucune liqueur. La peau de cet enfant étoit fort épaiffe; il avoit des cheveux, & deux dents incifives prêtes à percer à chaque mâchoire. L'enveloppe étoit en partie offeuse & en partie cartilagineufe; elle avoit prefque par-tout deux lignes d'épaiffeur, & quatre dans la partie contigue à l'arriere-faix, lequel avoit la même confiftance. Sa furface externe étoit garnie de petites éminences grayeleufes, & l'interne étoit comme moulée fur les parties de l'enfant qu'elle embrafsoit étroitement. Une ouverture dans l'arrierefaix fembloit défigner l'infertion du cordon umbilical, qui étoit defféché à un travers de doigt du nombril, comme fi l'on y eût fait une ligature; d'ailleurs, toutes les parties de la mere, & notamment la matrice, étoient très-faines, & dans l'état naturel. Cet enfant a été montré à l'Académie des Sciences, par le Chirurgien de l'HôtelDieu de Joigny. M. Morand*, qui fut chargé de l'examen de ce fait fingulier, en a trouvé, par fes recherches, plufieurs femblables dans les Auteurs; il fe borne néanmoins à l'hiftoire de trois feulement, qui ont paru les mieux conftatés; favoir, l'enfant de Leinzelle, en Suabe, en 1720; l'enfant de Toulouse, en 1678; & celui de Sens, en 1582. L'enfant de Leinzelle a été vu à l'Académie Royale de Chirurgie. M. le Duc de Wirtemberg, qui le garde dans fon Cabinet, avoit permis à fon premier Chirurgien de l'envoyer à Paris. Cet enfant a refté * Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, année 1748. quarante-fix ans dans le corps de fa mere, laquelle a vécu quatre-vingt-feize ans : il étoit renfermé dans une espece de boîte, groffe comme une espece de boule à jouer aux quilles, cartilagineufe dans l'endroit par où elle tenoit à la matrice, & fi dure ailleurs, qu'elle foutint les coups de hache avec laquelle elle fut ouverte. : La mere fentit les douleurs de l'enfantement pendant sept femaines, après quoi elle fe porta bien, à son fardeau près; cependant, elle eut depuis deux couches heureuses, & les enfans ont vécu le volume de fon ventre étant toujours le même, & lui caufant quelques incommodités lorfqu'elle fe donnoit certains mouvemens elle affura toujours qu'elle étoit restée groffe de fon premier enfant. > Celui de Toulouse a resté vingt-fix ans dans le ventre de fa mere, qui eut du lait dans le fein, & quelques fymptomes pareils à ceux de l'accouchement, pendant deux mois, avec des douleurs vives pendant trois, au bout duquel temps elle reprit un peu fes forces, & conferva jufqu'à la mort la même groffeur, fe plaignant toujours du poids qui l'incommodoit, & quelquefois de douleurs comme pour accoucher. L'enfant de Sens a resté 28 ans dans le ventre de fa mere. Il fut placé en 1659 dans le Cabinet des curiofités de Frédéric III, Roi de Danemark. Des quatre enfans. dont je viens de parler, les deux premiers, celui de Joigny & celui de Suabe, ont été formés dans la trompe; & les deux autres, celui de Sens & de Toulouse, l'ont été dans la matrice. Le foetus de Sens étoit ramaffé en boule, ayant les extrémités du corps pliées de maniere à favorifer l'arrondiffement de la maffe, les tégumens fort durs, les doigts des pieds comme pétrifiés & fi ferrés, qu'ils représentoient l'ouvrage d'un Statuaire qui les auroit imités avec fon cifeau. Le foetus de Toulouse étoit forti de la matrice, ouverte dans fon fond, & cette ouverture se trouvoit comme bouchée par un corps pierreux, contigu à la poche qui contenoit le foetus. En examinant l'hiftoire de ces enfans, fi l'on fait attention à l'état de leurs meres pendant la groffeffe, on n'y voit aucun fymptome particulier qui ait pu donner lieu de prédire l'événement dont il est question. Ces enfans ont été portés vivans jufqu'au terme, ou à-peu-près, de neuf mois; alors on a obfervé que ces meres ont éprouvé différens accidens, depuis que le temps ordinaire de l'accouchement fut paffé, jufqu'à celui où la nature travailla à façonner le fœtus, de maniere à ne point nuire à sa mère jusqu'à la mort, caufée par des accidens tout-à-fait indépendans de cette circonftance. On lit dans la Bibliotheque Italique, année 1728, tome I, une Observation fur un fœtus qui a refté près de quinze ans dans le ventre, & a été trouvé hors de la matrice, & renfermé dans ses membranes fans être corrompu ni defféché; mais gras, frais & plein de fuc, quoique la mere fût morte de la maladie vénérienne. Sur la Membrane Hymen. L'on a dit que dans les filles qui n'avoient permis dans le vagin l'introduction d'aucun corps capable d'y faire violence, on trouvoit pour l'ordinaire à son orifice, un cercle charnu & membraneux, parfemé de vaiffeaux capillaires fanguins. Ce cercle a une ouverture pour l'écoulement des menftrues; elle eft fi petite dans le premier âge, qu'à peine un petit pois pourroit la traverser ; elle se dilate dans la suite peu-àfe peu, en forte que dans les adultes elle pourroit admettre l'extrémité du petit doigt. Les anciens l'ont nommé Hymen; fon intégrité a été regardée comme un témoignage certain de la virginité, & l'on a appellé Fleur de virginité, l'écoulement fanguin qui accompagne la division de ce cercle, ou pour mieux dire, celle des vaisseaux qui s'y distribuent, occafionnée par la partie du måle, dont on a cru l'intro miffion néceffaire pour la génération; mais depuis que l'expérience a fait voir que la génération a eu lieu fans que l'on pût foupçonner aucune intromiffion, vu l'extrême rétreciffement du vagin, l'on a ceffé de regarder l'intégrité de ce cercle comme une preuve abfolue de la fageffe d'une fille, mais feulement comme une préfomption avantageuse pour celle en qui elle fe ren contre. VII. OBSERVATION. Sur l'extrême rétreciffement de l'orifice du Vagin. ON lit dans l'Hiftoire de l'Académie Royale des Sciences, année 1748, qu'une femme de Breft avoit le vagin fi étroit, qu'à peine il permettoit l'entré d'un tuyau de plume. Malgré cette difpofition elle devint enceinte, & accoucha heureusement après trois heures de travail, d'un enfant fort & puiffant. On trouve un semblable cas dans l'Histoire de la même Académie, année 1712, avec cette différence feulement que dans ce dernier, le vagin commença à fe dilater dès le cinquième mois; au lieu que dans la femme de Brest la dilatation ne fe fit qu'au moment des plus fortes douleurs, & qu'il fallut forcer les voies par le moyen du doigt. On lit dans l'Antropographie de Riolan, Livre II, Chapitre 35, page 197 qu'une femme, par les cicatrices qu'avoient produites les plaies des parties extérieures de la génération dans un accouchement laborieux, n'avoit au-dehors qu'une ouverture à permettre l'entrée d'un ftylet: malgré cette difpofition elle devint enceinte, & accoucha par les fecours de l'Art. On lit dans le même endroit, qu'une femme regardée comme imperforée, ayant accufé fon mari d'impuiffance, le Juge ordonna la vifite, dans laquelle, à fon grand étonnement, elle fut trouvée enceinte. ***** VIII. OBSERVATION. Sur une membrane qui fermoit l'orifice du Vagin. ON rencontre quelquefois à l'entrée du 1 vagin, au lieu de cercle ou de caroncules myrthiformes, une membrane affez forte qui ferme exactement ce conduit : cette membrane eft contre nature, auffi eft-on obligé de la divifer pour procurer l'écoulement des menftrues, dont la rétention pourroit caufer des accidens très-fâcheux. M. Saviard, ancien Chirurgien de l'Hôtel-Dieu de Paris, dit dans la quatrieme de fes Obfervations, qu'une fille imperforée, parvenue au temps de fes écoulemens périodiques, fe trouvant très-incommodée d'une pefanteur fous les os pubis, fe détermina à l'opération que l'on jugea néceffaire; elle fut faite avec une lancette à abcès, que l'on plongea dans la tumeur qui fe faifoit appercevoir à l'entrée du vagin : il en fortit deux pintes de fang, qui avoit la confiftance de lie de vin, & une odeur très-fétide, ce qui engagea le Chirurgien à mettre en usage, pendant trois semaines, des injections déterfives, auxquelles il fit succéder les dessicatives, qui terminerent la guérison. Cette membrane a donné lieu à des méprises confidérables, On lit dans A. Paré, / Livre XXIV, Chapitre so, qu'une fille fut déclarée enceinte par des Matrones, à cause du gonflement confidérable du ventre, & de la tenfion de la matrice, que produifoit un amas confidérable de fang menftruel mais cette prétendue groffeffe disparut lorsqu'on eut incifé la membrane, & que le fang, dont la quantité étoit de huit livres, fe fut écoulé. ; Siles Matrones, nommées pour juger de l'état de cette fille, avoient bien connu la difpofition naturelle des parties extérieures de la génération, elles ne feroient point tombées dans une faute auffi groffiere. Eh! à quelles erreurs ne font point exposées les ignorantes, qui font obligées de porter 1 leur jugement fur des filles foupçonnées d'avoir été déflorées. IX. OBSERVATION. Sur le terme de neuf mois, qui n'eft pas affuré, mais feulement le plus ordinaire, Accouchement pouvant être retardé & aller au-delà de ce terme. M. de la Motte n'adopte point le fentiment reçu des Auteurs, au fujet du terme de neuf mois complets. M. Mauriceau dit qu'un jour de plus ou de moins caufe toujours quelque chofe d'extraordinaire dans l'accouchement; mais M. de la Motte affure que entre plufieurs milliers d'accouchemens, il n'en a trouvé que deux fur lesquels il ait pu compter jufte pour le terme de neuf mois; il ajoute n'avoir jamais remarqué que quelques jours de plus ou de moins fuffent d'aucune conféquence au terme de la groffeffe. Un enfant, dit-il, doit être cenfé né à terme, lorsqu'il eft en état de se conserver la vie, & de prendre le mamelon de la Nourrice, en quelque temps que la mere accouche, foit que ce foit au feptieme, au huitieme, au neu- vieme, dixieme, onzieme, douzieme & même au treizieme mois : on ne doit point regarder ces accouchemens avancés ou retardés, comme l'effet de quelque acci- dent particulier, mais plutôt comme le produit d'une nourriture plus ou moins abondante que le fœtus a le foetus a prife dans le commencement de la groffeffe pour fon entiere formation, & qui le met en état de faire, fur les parois de la matrice, des irritations plus ou moins fortes, capables de la mettre en contraction, c'est-à-dire, de procurer un refferrement qui produife la fortie du foetus ou l'accouchement. Xc. OBSERVATION. Sur un moyen peu ufité de rappeller à la vie un enfant nouveau né qui fembloit en être privé, pour avoir eu le cordon umbilical long-temps comprimé. ON lit dans le fecond volume du Traité des Accouchemens de M. Smellié, Docteur en Médecine, Recueil 22, Obfervation II, que cet habile Accoucheur Anglois, après avoir donné ses foins à une femme dans un accouchement contre nature, il jugea par le défaut de battement des arteres du cordon umbilical, qui avoit été long-temps comprimé, que l'enfant étoit dans un péril imminent de perdre la vie. Les fecours ordinaires employés en pareils cas, & dont on a fait mention page 75, ayant été inutiles, il imagina de faire paffer de l'air dans le poumon, au moyen de la fonde à femme qu'il mit dans la bouche, A peine l'air y fut-il introduit, N. que l'enfant fe mit à bâiller, & ce fecours répété par intervalle, le fit revenir entié rement. XI. OBSERVATION. Sur un nouveau moyen de remédier aux accidens produits par le féjour de quelques portions du Placenta, reftées dans la Matrice. ON trouve dans le troifieme volume des Mémoires de l'Académie Royale de Chirurgie, année 1757, un moyen imaginé par M. Récolin, Membre de cette Académie, pour prévenir ou faire ceffer les accidens fâcheux qui proviennent de l'altération de quelque portion du placenta restée dans la matrice. Ce moyen qui a été employé plufieurs fois avec un heureux fuccès, confifte dans l'usage répété des injections d'eau tiede, faites dans la matrice même avec une seringue à femme, dont le tuyau fera dirigé comme il convient pour être porté dans la cavité de ce vifcere. On conçoit aisément que l'eau pénétrant 1 la fubftance de ces portions du placenta, les met comme en diffolution, ce qui en facilite la fortie, qui eft déterminée d'ailleurs par les chocs réitérés de l'eau pouffée à chaque injection. XII. OBSERVATION. Sur l'expérience qu'on a coutume de faire fur le poumon d'un enfant, pour juger fi la mere, accufée de l'avoir détruit, eft coupable ou non. QUO UOIQUE l'expérience du poumon jetté dans l'eau femble être décifive, comme il eft dit page 30, pour abfoudre ou condamner une mere accufée d'avoir détruit fon enfant; cependant il est prouvé par plufieurs faits que cette expérience ne montre pas infailliblement que l'enfant soit né mort, ou s'il a vécu quelque temps après fa naiffance. L'on a obfervé que les poumons d'un enfant mort dans le fein de fa mere, nagent quelquefois fur l'eau; ce qui arrive fi, dès qu'il eft né, on lui fouffle dans la bouche, ainfi que le pratiquent quelques Sagesfemmes, quand elles doutent de fa vie. Cela arrive encore lorsque l'enfant est mort long-temps avant de naître, la pourriture produifant dans les poumons une raréfaction qui les fait furnager, comme on voit dans les rivieres des gens noyés flotter fur l'eau après avoir été long-temps au fond. Quoique l'enfant foit né vivant, fes poumons ne laiffent pas quelquefois que d'aller au fond; cela arrive lorsque l'enfant, quoiqu'il foit né, ne refpire point, & meurt dans cet état: car c'eft une erreur de croire que l'enfant ne puiffe vivre quelque temps fans refpirer. On en voit qui, d'abord qu'ils ont reçu le jour, n'ont ni fentiment, ni refpiration, & qui étant réchauffés parles fecours ordinaires, commencent à attirer l'air & à crier. D'ailleurs, on en a vu qui font nés étant encore dans leurs enveloppes. Or, il eft certain que l'enfant ne refpire point tandis qu'il eft ainfi enfermé. Ouverkamp, dans fon Economie animale, dit que quelquefois les poumons d'un enfant mort avant fa naiffance, nagent fur l'eau, parce qu'à la faveur des efforts de l'accouchement & de la rupture de fes enveloppes, il refpire avant que de mourir. L'Auteur ajoute qu'il a fait cette obfervation fur quatre enfans nés de la même mere en différens temps. Il arrive quelquefois que de plufieurs morceaux qu'on a coupés au poumon d'un enfant qui aura vécu, les uns enfonceront dans l'eau, & les autres furnageront; ce qui vient de ce que, auffi-tôt que l'enfant est né, toutes les parties du poumon ne se rempliffent pas d'air également, parce qu'il faut aux unes plus de temps pour l'admettre, & aux autres moins. 3 L'on a vu un enfant qui, ayant pouffé quelques cris après fa naiffance, & par conféquent ayant refpiré, fut mis en terre quoique vivant, d'où étant retiré, fes poumons enfoncerent dans l'eau comme une pierre. Il réfulte de ces faits que fi, d'après l'expérience des poumons, l'on ne peut tirer une conféquence abfolument décifive, elle fournit du moins des motifs très-forts pour engager les Juges à examiner foigneufement la conduite de la mere qu'on accuferoit d'avoir tué fon enfant, fur le corps duquel un Chirurgien éclairé & attentif pourra, d'ailleurs, difcerner les caufes violentes de fa mort. FIN. TABLE DES OBSERVATIONS SUR des cas finguliers, ajoutés à l'Ouvrage de l'Auteur. PREMIERE OBSERVATION. SUR la Matrice double. Page 161 II. OBSERVATION. Sur les vices de conformation du baffin. 6 164 III. OBSERVATION. Sur un Fœtus de vingt-un mois, qui fut retiré de la trompe droite de la matrice, fans que la Mere en foit morte.. 167 IV. OBSERVATION. Sur un Fœtus tiré du ventre de fa Mere par le fondement. 171 Ve. OBSERVATION. Sur des Fœtus qui ont demeuré plufieurs années dans le ventre de leur mere, fans fe corrompre. 1.179 VI. OBSERVATION. Sur la Membrane Hymen. 186 VII. OBSERVATION. Sur l'extrême rétrecissement de l'orifice du Vagin. 187 VIII. OBSERVATION. Sur une membrane qui fermoit l'orifice du Vagin. 189 IX. OBSERVATION. Sur le terme de neuf mois, qui n'eft pas affuré, mais feulement le plus ordinaire, l'Accouchement pouvant être retardé & aller au-delà de ce terme. 191 3 Xc. OBSERVATION. Sur un moyen peu ufité de rappeller à la vie un enfant nouveau né qui fembloit en être privé, pour avoir eu le cordon umbilical long-temps comprimé. 193 XI. OBSERVATION. Sur un nouveau moyen de remédier aux accidens produits par le féjour de quelques portions du Placenta, reftées dans la Matrice. 194 XII. OBSERVATION. Sur l'expérience qu'on a coutume de faire fur le poumon d'un Enfant, pour juger fi la mere, accufée de l'avoir détruit, eft coupable ou non. 195 COPIE du Brevet en faveur de la Demoiselle BOURSIER DU COUDRAY. : AUJOURD'HUI, 19 Octobre 1759, le Roi étant à Verfailles Sa Majesté étant informée que la Demoiselle Bourfier du Coudray, après avoir, durant seize ans, exercé avec capacité, à Paris, la profeffion de Sage-femme, & étant retirée en Auvergne, auroit conçu le projet de remédier à l'impéritie trop commune parmi les femmes qui pratiquoient ladite profeffion dans ladite Province, & auroit fabriqué une Machine, qui, en imitant la nature, facilite les moyens de démontrer tous les dangers, dont les Accouchemens font fufceptibles, & les différentes opérations employées pour les combattre, & que cette Machine approuvée par l'Académie de Chirurgie de Paris, & les travaux de ladite Demoiselle du Coudray ont eu de fi heureux fuccès dans ladite Province, que le fieur de la Michodiere, Intendant d'icelle, & le fieur de Ballainvilliers, fon fucceffeur, ont rendu les témoignages qu'elle s'étoit empreffée de mériter; & Sa Majefté voulant lui en donner un de la protection qu'elle entend accorder à fon zele & à fon talent, & defirant qu'elle puiffe librement répandre dans les différentes Provinces du Royaume les mêmes connoiffances dont celle d'Auvergne reffent les avantages, Sa Majefté a permis & permet à la Demoiselle du Coudray de continuer à inftruire & former, à l'aide de ladite Machine, les femmes & filles qui voudront recevoir ses inftructions pour la pratique de ladite profeffion de Sage-femme: Veut & entend qu'elle puiffe librement aller & donner lefdits enseignemens dans telles Provinces qu'elle jugera à propos, fans qu'il puiffe lui être, pour raifon de ce, apporté aucun trouble, par quelque perfonne, ni fous quelque prétexte que ce foit. Mande Sa Majefté auxdits fieurs Intendans & Commiffaires départis 'dans lefdites Provinces, & à tous fes Officiers Jufticiers, & autres qu'il appartiendra, de tenir la main à l'exécution du préfent Brevet, que, pour affurance de fa volonté, Elle a figné de fa main, & fait contre-figner par moi Ministre & Secrétaire d'Etat de fes Commandemens & Finances. Signé LOUIS. Et plus bas, PHELYPEAUX. COPIE du Brevet qui autorife la Dame DU COUDRAY, Maitresse Sage-femme, à tenir des Cours d'inftruction publique dans toutes les Provinces du Royaume. AUJOURD'HUI, 18 Août 1767, le Roi étant à Compiegne: Sa Majefté toujours occupée du foin de pro- curer à fes Peuples les fecours dont ils ont befoin, princi- palement pour tout ce qui peut tendre à leur confervation, & bien informée de la fcience & de l'expérience que ladite Dame du Coudray, Sage-femme, a acquifes dans l'Art des Accouchemens; Voulant, d'ailleurs, la récompenfer des foins infinis qu'elle s'eft donné pour porter cet Art fi utile & fi néceffaire à un haut degré de perfection, Sa Majefté l'a nommée pour enfeigner l'Art des Accouche- mens dans toute l'étendue de fon Royaume; lui permet, à cet effet, de tenir des Cours publics & particuliers fur tout ce qui y a rapport, fans que, fous aucun prétexte, elle puiffe y être troublée. Mande & ordonne en conféquence, Sa Majefté, à tous Gouverneurs, Intendans & Commif- faires départis dans fes Provinces pour l'exécution de fes ordres, & à tous Magiftrats & Juges qu'il appartiendra, de la protéger & de lui donner toute l'aide & affiftance dont elle aura befoin; & afin de lui procurer les moyens de fe transporter dans toutes les Provinces où elle fera utile, Sa Majesté veut & entend que tant qu'elle tiendra des Cours publics d'inftruction dans quelque lieu de fon Royaume que ce foit, elle jouiffe, par chacun an, de la fomme de huit mille livres, qu'elle lui accorde à titre de gratification annuelle; & lorfque l'âge ou les infirmités ne lui permettront plus de tenir lefdits Cours, de trois mille livres feulement, pour lui faciliter les moyens de vivre dans fa retraite; lefquelles fommes lui feront payées dans les cas fufdits, à l'avenir, par chacun an, fa vie durant, par les Gardes de fon Tréfor royal, préfens & à venir, fur fes fimples quittances, à compter de ce jour, fuivant les Etats ou Ordonnances qui en feront expédiés en vertu du préfent Brevet, que, pour affurance de fa volonté, Sa Majefté a figné de fa main, & fait contre-figner par moi Confeiller, Secrétaire d'Etat & de fes Commandemens & Finances. Signé LOUIS. Et plus bas, PHELYPEAUX. EXTRAIT des Regiftres de l'Académie de Chirurgie. Du 13 Mai 1756. MESSIEURS ESSIEURS Verdier & Levret, qui avoient été nommés par l'Académie pour examiner une Machine inventée par la Dame du Coudray, Maîtreffe Sage-femme, reçue à Paris, établie à Clermont en Auvergne, pour démontrer la pratique des Accouchemens, en ayant fait un rapport très-avantageux, l'Académie a jugé cette Machine digne de fon approbation. En foi de quoi j'ai donné le préfent Extrait de nos Regiftres, ce premier Décembre 1758. MORAND, Secrétaire perpétuel. A P P R Ο Β ΑΤΙΟ Ν. J'A1 examiné, par ordre de Monfeigneur le Chancelier, un Manufcrit intitulé: Abrégé de l' Art des Accouchemens où l'on donne les préceptes néceffaires pour le mettre heureu fement en pratique, par Madame le Bourfier du Coudray, Maîtreffe Sage-femme de Paris. Je n'ai rien trouvé dans cet Ouvrage qui puiffe en empêcher l'impreffion; & je le crois très-utile aux Sages-femmes de la Campagne, peu fufceptibles d'inftructions plus étendues. A Paris ce 2 Juillet 1757. MORAND, Cenfeur Royal. APPROBATION de M. SUE l'aîné, Maître Chirurgien & Accoucheur, ancien Prévôt du College des Chirurgiens de Paris, & Adjoint Comité de l'Académie Royale de Chirurgie. J'ai lu avec attention l'Abrégé de l'Art des Accouchemens, composé par Madame le Bourfier du Coudray, ancienne Maîtreffe Sage-femme de Paris. Cet Ouvrage, qui d'abord n'avoit été entrepris que pour l'instruction des Sagesfemmes de Campagne, m'a paru pouvoir être très-utile à celles des Villes, par le grand nombre des remarques dé pratique que l'Auteur a jugé à propos d'y inférer : & fi l'on a égard aux Obfervations fingulieres que l'Editeur a placées à la fin de ce Traité, l'on conviendra que la lecture n'en peut être que très-intéreffante. A Paris, ce 20 Décembre 1758. Signé, SUE. APPROBATION du Cenfeur Royal. AI J'ai lu par ordre de Monfeigneur le Garde des Sceaux, un Ouvrage intitulé: Abrégé de l'Art des Accouchemens, par Madame du Coudray, Maîtreffe Sage-femme de Paris, Cet ouvrage contient des principes clairs & lumineux, fur-tout pour les Sages-femmes de la Campagne. Les remar ques fort intéreffantes que l'Editeur y a inférées, rendent l'Ouvrage encore plus utile; c'eft pourquoi nous les jugeons très-dignes de l'impreffion. A Paris, ce 3 Avril 1777. Signé, SUE. PRIVILEGE DU ROI. LOUIS, par la grace de Dieu, Roi de France & de Navarre A nos amés & féaux Confeillers, les Gens tenans nos Cours de Parlement, Maîtres des Requêtes ordinaires de notre Hôtel, Grand-Confeil, Prévôt de Paris, Baillifs, Sénéchaux, leurs Lieutenans Civils, & autres nos Jufticiers qu'il appartiendra; SALUT. Notre amé le fieur DEBURE pere nous a fait expofer qu'il defireroit faire imprimer & donner au Public: Abrégé de l'Art des Accouchemens , par Madame DU COUDRAY, Maîtreffe Sage-femme de Paris, Penfionnaire du Roi, pour démontrer l'Art des Accouchemens dans tout le Royaume, s'il Nous plaifoit lui accorder nos Lettres de privilege pour ce néceffaires. A CES CAUSES, voulant favorablement traiter l'Expofant, Nous lui avons permis & permettons par ces Préfentes, de faire imprimer ledit Ouvrage autant de fois que bon lui femblera, & de le vendre, faire vendre & débiter par tout notre Royaume, pendant le temps de fix années confécutives, à compter du jour de la date des Préfentes. FAISONS défenses à tous Imprimeurs, Libraires, & autres perfonnes, de quelque qualité & condition qu'elles foient, d'en introduire d'impreffion étrangere dans aucun lieu de notre obéiffance: comme auffi d'imprimer ou faire imprimer, vendre, faire vendre, débiter, ni contrefaire ledit Ouvrage, ni d'en faire aucuns Extraits, fous quélque prétexte que ce puiffe être, fans la permiffion ex preffe & par écrit dudit Expofant, ou de ceux qui auront droit de lui, à peine de confifcation des Exemplaires contrefaits, de trois mille livres d'amende contre chacun des contrevenans, dont un tiers à Nous, un tiers à l'Hôtel-Dieu de Paris, & l'autre tiers audit Expofant, ou à celui qui aura droit de lui; & de tous dépens dommages & intérêts. A la charge que ces Préfentes feront enregistrées tout au long fur le Regiftre de la Communauté des Imprimeurs & Libraires de Paris, dans trois mois de la date d'icelles; que l'impreffion dudit Ouvrage fera faite dans notre Royaume & non ailleurs, en beau papier & beaux caracteres, conformément aux Réglemens de la Librairie, & notamment à celui du dix Avril mil fept cent vingt-cinq, à peine de déchéance du préfent Privilege; qu'avant de l'expofer en vente, le manufcrit qui aura fervi de copje à l'impreffion dudit Ouvrage, fera remis dans le même état où l'approbation y aura été donnée, ès mains de notre très-cher & féal Chevalier, Garde des Sceaux de France, le fieur HUE DE MIROMENIL; qu'il en fera enfuite remis deux Exemplaires dans notre Bibliotheque publique ; un dans celle de notre Château du Louvre, un dans celle de notre très-cher & féal Chevalier, Chancelier de France, le fieur DE MAUPEOU, & un dans celle dudit fieur HUE DE MIROMENIL: le tout à peine de nullité des préfentes; du contenu defquelles vous mandons & enjoignons de faire jouir ledit Expofant, & fes ayans caufes, pleinement & paisiblement, fans fouffrir qu'il leur foit fait aucun trouble ou empêchement. VOULONS que la copie des Préfentes, qui fera imprimée tout au long, au commencement ou à la fin dudit Ouvrage, foit tenue pour duement fignifiée, & qu'aux copies collationnées par l'un de nos amés & féaux Confeillers-Secrétaires, foi foit ajoutée comme à l'original. Commandons au premier notre Huiffier ou Sergent fur ce requis, de faire, pour l'exécution d'icelles, tous actes requis & néceffaires fans demander autre permiffion, & nonobftant clameur de Haro, Charte Normande, & Lettres à ce contraires! CAR tel eft notre plaifir. DONNÉ à Paris le neuvieme jour du mois de Mai, l'an de grace mil fept cent foixantedix-fept, & de notre regne le troifieme. Par le Roi en fon Confeil. LE BEGUE. Regiftré fur le Regiftre XX de la Chambre Royale & Syndicale des Libraires & Imprimeurs de Paris, No. 1004, fol. 349, conformément au Réglement de 1723. A Paris, ce 12 Mai 1777. LAMBERT, Adjoint. De l'Imprimerie de STOUPE, rue de la Harpe.